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Qu’est-ce qu’une Femme de Journée Internationale ?

Publié le 09 mars 2008 par Argoul

En ce « jour de mémoire » du 8 mars - encore un ! – on en vient à se demander ce qu’est une femme. Puisque l’on commémore, serait-elle un monument figé d’hier ? une race disparue ? une repentance de plus ? La Beauvoir – dont on commémore aussi le centenaire de son exploit d’être née – disait, avec cet aplomb agaçant des intellos français qui s’attribuent volontiers la citation d’un autre (Erasme), qu’« on ne naît pas femme, on le devient ». C’est vrai et faux à la fois, ce qui fait que tout le monde est content. Mais c’est aussi creux qu’une Journée Internationale. Pom ! pom ! flonflons, manif – et demain tout recommence comme avant. Le degré zéro de la politique – si l’on entend par « politique » le débat dans la cité donc la volonté de faire avancer les choses. Pour la plupart, nos politiciens ne commémorent ou ne défilent que pour se faire mousser, pas pour changer quoi que ce soit à cet ordre des choses par lequel ils sont parvenus. D’où ma question initiale : qu’est-ce qu’une femme ?

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Beauvoir avait raison en partie, pour son époque catholique, bourgeoise et tranquillement machiste, qui considérait la femme comme une matrice à reproduire la lignée, et pour laquelle le père payait la famille du mari. Femme pondeuse, femme objet, femme pétasse, ces trois incarnations de l’idéal bourgeois ne sont plus – Dieu merci ! – d’une actualité brûlante. Ou alors dans quelques provinces reculées où l’on « adore » seulement la Vierge Marie et sa propre mère (outre le chocolat). Le grand nivellement du tout, qui caractérise notre temps, aurait vu volontiers les femmes devenir des hommes, tandis que l’on aurait célébré la féminité des mâles. Androgynes au pouvoir, circulez, y a rien à voir ! Cette idée s’est répandue un temps, juste après 1968 – qu’on commémore également cette année. Paul Morand disait déjà, d’une génération antérieure, « c’était une jeune fille d’aujourd’hui ; c’est-à-dire, à peu près, un jeune homme d’hier. » (L’Europe galante) Il évoquait même ces « femmes, longs vases entrouverts, grands enfants chauds » (Fermé la nuit) – de quoi être condamné aujourd’hui pour pédophilie par les hystériques de la bien-pensance et du politiquement correct qui préfèrent cacher le sein plutôt qu’acquérir la maîtrise de le voir.

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Mais Beauvoir avait tort parce qu’elle croyait trop Rousseau, qui avait fait de son Emile un orphelin, « page blanche » de « l’Education », chargée toute seule d’épanouir le drôle (à la campagne, sans filles et sans télé). Ce pourquoi Jean-Jacques, en bon intello français fils de ses seuls œuvres et forcément irresponsable, a abandonné tous les niards qu’il a pu faire aux servantes à la bonne charité publique… La biologie fait homme ou femme ; elle continue aveuglément son travail sans que le « devenir » souhaité ne soit pris en compte : pas d’hérédité des caractères zaquis en biologie plus qu’en économie. C’est à l’éducation et à la politique de refaire à tout instant que ce qu’on veut advienne. Mais avec les bases qui sont données.

Un petit garçon n’est pas une petite fille, tout parent le sait. Il naît légèrement plus de garçons parce que ces êtres-là sont plus fragiles : à la naissance, avant 2 ans, à l’adolescence ; ils meurent aussi plus tôt à l’âge cacochyme. Question d’hormones. Une fois née, la petite fille ne sera pas élevée pareil, même si nombre de parents aiment les « garçons manqués ». C’est qu’une éducation est le fait de toute la société, pas seulement du couple. Le regard des autres sur la fille ne sera pas le même que sur le garçon : on n’attendra pas les mêmes comportements, on valorisera certaines orientations, la nature fera le reste. Car – tout parent le sait – les petites filles sont plus futées que les petits garçons. Et cela jusqu’à l’adolescence.

Mais, de ces différences biologiques et culturelles, il n’est nul besoin d’en faire une hiérarchie. Au contraire ! Homme et femme se complètent.
· Pour élever les enfants avec chacun son tempérament pour protéger et corriger, stimuler et ouvrir. Les parents sont des tuteurs autour desquels s’enroulent les vrilles des jeunes pousses, avant d’être assez solides pour se soutenir d’elles-mêmes. « Dans tous les temps et tous les pays, c’est la femme qui décide si le monde doit pardonner une faute ou ne pas la pardonner », disait Samuel Butler (Nouveaux voyages en Erewon, VIII).
· Dans la vie professionnelle et dans la culture, ce qui faisait dire à Molière devant le Roi Catholique - ce qui était alors révolutionnaire ! - « Je consens qu’une femme ait des clartés de tout. » (Les Femmes Savantes I,3) Une femme n’est pas réduite à la trilogie allemande du 19ème : « kinder, küche, kirche » (les gosses, la cuisine et l’église). Les modèles d’aujourd’hui – Madonna, Carla, Gavalda – ne sont plus les modèles d’hier – Brigitte, Yvonne, Simone. Il y a des femmes flic et des femmes soldat, des femmes pilote et des femmes chercheur, il y aurait même, a-t-on dit, de vraies femmes politiques.

Qu’est-ce que cela change pour les enfants ? Ils rêvent tous, comme Isidore Ducasse, qui se disait comte de Lautréamont, être « fils de la femelle du requin, dont la faim est amie de la tempête, et du tigre, à la cruauté reconnue. » (Les chants de Maldoror, I). Autrement dit fils de deux parents différents, complémentaires et modèles.

Entre mâle et femelle, c’est l’éternelle histoire, contée par Cervantès dans Les Nouvelles Exemplaires : « l’homme est de feu, la femme d’étoupe, le diable arrive et souffle. » Les réactions devant le désir et la beauté restent éternelles : « l’existence d’une très jolie femme ressemble à celle d’un lièvre, le jour de l’ouverture » écrivait Paul Morand dans Le Réveille-Matin. Reste à fonder ou recomposer la famille pour élever les enfants sans seulement les ‘laisser’ grandir, ni sacrifier forcément sa culture ou sa vie professionnelle. Question de vouloir, d’organisation, d’habitudes.

Il est des cultures où la femme reste subordonnée aux désirs du mâle et propriété du clan. L’on y dit haut et fort « bats ta femme chaque matin ; si tu ne sais pas pourquoi, elle le sait. » L’inverse même de notre civilisation, si bien résumée par Luther (cité par Heinrich Heine) :
 
 « Qui n’aime point le vin, les femmes ni le chant,
 Il restera sot toute sa vie durant. »

C’est chaque jour que ça se passe, pas besoin de faire une commémoration pour ça !


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