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LA PHILOSOPHIE DES MEDIAS - CHRISTIAN DUTEIL -[SITE:nananews-indispensable]

Publié le 25 février 2012 par Giraudet @dogiraudet

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La philosophie des médias

Christian Duteil

Paradoxe de la société du spectacle : le message «publiciste » cher à la communication qui s’est emparée du concept cher au philosophe pour mieux le manipuler et le galvauder, repose rarement sur une idée et encore moins sur une constellation d’idées. Plus il est pauvre de contenu, plus il va toucher la masse, gagner en expansion, infiltrer le système de communication, « faire un tabac » comme on dit.

Loin de penser, l’interprétation d’un message nous conduit à une opinion commune et conforte le plus grand nombre dans le flou artistique de ses préjugés gloutons. C’est ce qui s’est passé, par exemple, avec le slogan, très peu politique en 1995, de Jacques Chirac « Manger des pommes » repris par la station Europe 1. Et la rose socialiste n’avait guère constitué un préalable plus digne de pensée en 1981 malgré le faste cérémonial du Panthéon. Comme d’ailleurs le slogan de la « France forte » de Giscard repris par le candidat président en 2012 . Car, on oublie que la densité du contenu d’un message est sans doute inversement proportionnelle à sa diffusion.

L’efficacité de la communication n’est pas toujours compatible avec la pensée, avec la méditation, avec des questions concernant la valeur de l’objet signifié. Dans l’ordre de la communication fort concurrentiel qu’il ne faut pas confondre avec le monde de l’information, la valeur du contenu n’est jamais mise (ou remise) en question. Le système d’interprétation est ici soumis aux lois du marché qui décident du sens de toute chose en fonction de sa valeur d’échange.

Au contraire, la philosophie ne s’appuie pas du tout sur le même type d’échanges ni le même système d’interprétation. Elle ne transmet guère de messages, elle cherche plutôt à valider des idées et à forger des concepts. Penser, pour elle, c’est prendre le temps, s’installer dans le silence de la méditation, sonder toutes les perspectives, toutes les orientations en suivant un mode d’exploration minutieux qui exclut « la dictature de l’instant ». Elle induit, en cela, un usage du langage très différent  et un autre rapport aux temporalités.

 C’est pourquoi, la philosophie, à la télévision, même sur des chaînes spécialisées ou thématiques, ne cherchera pas l’exploit et la surenchère ! Le philosophe met en effet en œuvre une pensée qui résiste à ce mode d’échange où c’est le regard qui en impose. Penser est plutôt un acte de retrait et de résistance. Résistance aux lieux communs, aux opinions toutes faites, aux messages faciles et prétentieux qui n’interrogent jamais leur bien fondé et ne se mettent jamais en question.

Le philosophe est bien sûr l’ennemi du marketing, un ennemi des stratégies de communication et des réponses morales que soulève une question et pour lesquelles on requiert plutôt l’autorité feinte du psychologue et/ou du sociologue. Depuis Platon, elle lutte contre les sophistes et les nouveaux sophistes sont aujourd’hui innombrables. Le nouveau sophiste, c’est peut-être l’attaché de communication des "Hommes de l'ombre" qui fait négoce de l’idée en vantant des solutions attractives avant même d’avoir évalué l’idée elle-même, de savoir si elle s’impose ou non. On peut manger des pommes ou distribuer des roses comme l’ont fait des militants socialistes dimanche dernier au marché de Neuilly sur Seine, en plein Sarkoland mais est-ce là la bonne attitude et la réponse adéquate pour donner du sens à la pratique politique ? Penser, ce n’est pas la recherche d’une réponse de ce genre même dans notre société de spectacle !

Car si la pensée est une recherche de sens, cela ne veut pas dire qu’elle se soumet au bon sens, à ce que tout le monde partage comme étant digne de sens. Le philosophe se méfie du consensus des préjugés et des présupposés du café du commerce qui fleurent bon le populisme et la démagogie. L’intellectuel au risque de passer pour un aristocrate de la culture (à ne pas confondre avec civilisation !) s’arrête souvent à des questions incongrues et difficiles, joue avec brio avec les paradoxes et les oxymores. Il va jusqu'à la limite du sens, intervient sur la structure métalinguistique de ce qui se dit et interprète pour créer de nouveaux concepts.« Le philosophe s’intéresse parfois à des choses apparemment insensées comme celle de savoir si Socrate assis est le même que Socrate debout. Au mieux, il apparaît pour le vulgaire comme un original en voie de disparition, au pire comme le fou du roi nu sur l’échiquier du monde, alors qu’il veut signifier simplement par là qu’on ne peut penser que debout, c'est-à-dire libre.

 Christian Duteil.

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