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Mouhzin, Moudhik : triste, amusant.

Publié le 13 mars 2012 par Parolededemocrate
«Mouhzin, moudhik», c’est ainsi que l’on qualifie la situation à Homs et en Syrie: amusant et triste.
En Syrie, les blagues sont un passe-temps comme un autre, une tradition sans cesse renouvelée par l’actualité et le quotidien des Syriens. La dictature terrible des Assad fut l’occasion malheureuse pour les Syriens, toujours prompts à de nouvelles "noukta", de soulager leur malheur en racontant des blagues sur le régime qui les opprime, trouvant ainsi dans l’humour un exutoire efficace pour garder un peu de dignité. La révolution syrienne a été et continue d’être une source d’inspiration riche et incroyable, forçant le respect des millions d’arabes qui les entendent, et qui se demandent: comment, dans leur malheur, peuvent-ils avoir le cœur à rire? Il se trouve que Homs a une place particulière en Syrie vis-à-vis de l’humour, et ceci à double titre: les Homsiotes sont aussi bien connus pour la finesse de leurs blagues que pour être le sujet des blagues des Syriens.
L’humour est vu et utilisé comme une arme efficace pour garder haut le moral des révolutionnaires dans une bataille qui dure. Tout doit être traduit en blague. Lors d’une manifestation à Homs et constatant l’absence des forces assadiennes qui ont l’habitude de ne jamais tarder pour tirer sur la foule, l’un des manifestants appelle au téléphone les forces du désordre pour s’assurer que tout va bien! Les Homsiotes usent également de l’humour pour gagner la bataille psychologique contre le régime assassin des Assad: dans leurs chants, ils disent qu’il est agréable pour eux de dormir sur le bruit des coups de feu, des berceuses qui manqueront après la chute du régime! C’est également un moyen de dénoncer le soulèvement plus que timide de la grande ville d’Alep, on raconte à ce propos: «Quand la ville de Deera s’est soulevée, les Syriens de Hama sont descendus et ont crié: Ô Deera, Hama est avec toi jusqu’à la mort! Et quand la ville de Hama s’est soulevée, les Syriens de Homs sont descendus et ont crié: Ô Hama, Homs est avec toi jusqu’à la mort! Et donc, lorsque la ville de Homs s’est soulevée, les Syriens de Alep sont descendus et ont crié: Ô Homs, Hama est avec toi jusqu’à la mort!!!»
L’humour se fait noir à Homs
Mais le sujet même des blagues des révolutionnaires n’est qu’un rappel supplémentaire de la catastrophe qu’ils vivent. «Mouhzin, moudhik», c’est ainsi que l’on qualifie la situation à Homs et en Syrie: amusant et triste. Et depuis la reprise du quartier de Baba Amr par les gangs de Bachar, après des semaines de bombardements intensifs sur la plupart des quartiers de Homs, l’heure est plus à la tristesse. On ne rit plus beaucoup à Homs. C’est plutôt la colère qui gagne les coeurs: bientôt un an de manifestations, un an où on a montré notre courage et notre volonté de conquérir notre liberté, un an où il a fallu, chaque jour, défier les balles du régime criminel, secourir les blessés, compter les morts, les enterrer en organisant des funérailles qui sont une nouvelle occasion pour le régime de nous tuer. Un an où le régime nous coupe eau, électricité et moyens de communications quand il l’entend. Et qu’a fait le monde? Un sentiment de dégoût face à un silence désormais complice: Où est l’Humanité? Où est le monde? Où est la communauté internationale? Où est la fraternité entre les peuples? Où sont les Arabes? Où sont les musulmans? Où sont les droits de l’Homme? Crient, en vain les Syriens témoins du nouveau massacre d’Al-Adawiya et Karm Al-Zaytoun, à Homs. L’humour se fait noir à Homs. «Un nouveau massacre», constate un révolutionnaire, «Ici, on parle de massacres comme d’autres parlent de produit de consommation; on attend tous le prochain massacre pour voir les nouveautés de la société des Assad… Père et fils… since 1970. Toutefois, il faudrait qu’ils renouvellent leurs équipes de marketing, ce sont toujours les mêmes campagnes de pub qui accompagne la sortie des nouveaux massacres.»
«Mouhzin, moudhik», bientôt un an et le monde regarde cette situation «Mouhzin, moudhik»…
Et si le monde a fini par aimer ce spectacle? Le monde regarde notre souffrance comme on regarde une pièce d’opéra ou un film, avec son lot de rebondissements, de personnages auxquels on s’attache, et bien sûr son suspense divertissant… alors, Baba Amr, tiendra ou tiendra pas? Quel sera le nouveau massacre? Tiens, Kofi Annan est optimiste après sa rencontre avec Bachar le criminel! Un beau spectacle! Après tout, «Mouhzin, moudhik», amusant et triste, ne sont elles pas les deux composantes d’un bon drame? «Mouhzin, moudhik», jusqu’au moment où Bachar, en Canio syrien, tuera son peuple, comme son père avant lui, et sonnera la fin de la pièce en criant «La commedia è finita!» Syrien qui rit, Syrien qui pleure. Syrien qui vit, Syrien qui meurt. Un drame ici qui est un spectacle ailleurs!
 
sources de l'article: http://syrie.blogs.liberation.fr/homs/2012/03/homs-un-beau-spectacle-.html

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