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L’écologie, vue de mon clocher…

Publié le 18 mars 2012 par Gezale

Nous avions consacré l’an dernier plusieursarticles à l’ouvrage de Fabrice Nicolino « Quia tué l’écologie ? ». L’auteur, journaliste indépendant, s’intéressaitde près au rôle réel que jouent les quatre grandes associationsenvironnementales : le WWF (Fonds mondial pour la nature, Greenpeace, laFondation Nicolas Hulot et FNE (France Nature Environnement). Fabrice Nicolinoavait mis au jour les rapports troublants existant entre ces organisations etles pouvoirs politique,économique et financier – ce qu’on regroupe sous le terme d’oligarchie –, dansles pays occidentaux.

L’écologie, vue de mon clocher…

Eucalyptus

Le sujetpeut et doit être élargi. Car il est aussi des personnalités qui méritent qu’ons’y arrête un instant. Des personnalités dont on se rend compte, si on les suitdans la durée, qu’elles ont fait de l’écologie leur fonds de commerce. Onconstate alors à quel point elles veillent jalousement sur lui, l’entretenantméthodiquement. Plus intéressées qu’elles sont à le faire fructifier qu’àrégler véritablement les problèmes qui le font exister et les font vivre. Deplus, elles se réclament généralement de l’écologie comme si elles en étaientles propriétaires attitrés, dénonçant avec un bel ensemble tout nouveau venu etd’une manière plus générale, tout ce qui pourrait d’une façon ou d’une autreleur porter ombrage. En les dépossédant par exemple d’une parcelle de leurpouvoir ou de leur autorité.
Tout cepetit monde fonctionne en bonne entente en un cercle restreint. On y retrouvepêle-mêle des personnalités comme le photographe Yann Arthus-Bertrand,Nicolas Hulot – toujours lui –, Denis Cheyssou l’animateur de « CO2, mon amour », lemagazine écologique de France Inter. Gravitent autour des noms qui reviennentrégulièrement. Des noms dont chacun s’accorde à dire qu’ils font autorité dansleur domaine. Autorité scientifique ou autorité morale, indiscutables, cela vade soi. Érik Orsenna est un de ceux là.
Brillantesprit, au point d’avoir été élu à l’Académie française, il fut longtemps leporte-plume de François Mitterrand. L’homme ne manque ni de charisme ni detalent pédagogique – il commença dans l’enseignement – et peut apparaître àplus d’un titre comme le parfait humaniste, nourrissant sa réflexion auxsources de la littérature et de la culture française, européenne etinternationale. Autorité morale disions-nous, comme Martin Hirsch a pu l’êtredans son domaine. Cela, c’est pour l’image de respectabilité.
Spécialistedes matières premières, il a occupé ou occupe encore diverses fonctionshonorifiques liés au paysage, à la forêt, etc. La première interrogation à sonsujet nous vint lorsqu’il participa aux travaux de la fameuse « Commissionpour la libération de la croissance » dite « Commission Attali »,créée à l’initiative du président de la République. Les conclusions destravaux, d’essence largement libérale, n’avaient guère d’états d’âme sur lesressorts de cette croissance dont le président avait dit qu’ « il irait la chercher avec lesdents ». Que diable Érik Orsenna était-il allé faire dans cette galèresarkozyste ?
Laconfirmation de nos inquiétudes nous vint un peu plus tard, à l’occasion de ladiffusion du film document « Crise,krach et gueule de bois » en janvier 2011 sur France 2. Film danslequel Érik Orsenna déclarait, à propos des raisons d’espérer enl’avenir : « … Il faut changerles menaces en opportunités. Je voyage énormément. J’ai fait un livre surl’eau. Et je me rends compte que l’eau sera un des problèmes principaux que varencontrer la planète. Et comme par hasard, les deux plus importantes, les plusefficaces sociétés au monde dans le domaine de l’eau et de l’assainissementsont des sociétés françaises ». S’agissant des enjeux, on ne sauraitêtre plus clair ! M. Orsenna est un des lobbyistes les plus influents desmultinationales de l’eau. Qu’on se le dise !
Apparemment, cela n’a pas l’air de déranger outremesure M. Denis Cheyssou qui vient de l’inviter à nouveau dans son émission, endirect du Salon du livre, à l’occasion de la parution de son dernier ouvrageécologique « Sur la route dupapier ». Très grande consommatrice de bois autant que d’eau,l’industrie papetière occidentale fait de plus en plus appel à des boisimportés comme l’eucalyptus, à croissance extrêmement rapide, et dont laplantation, tout comme celle du palmier à huile, tend à se substituer un peupartout dans le monde, à des forêts primaires qu’on détruit. Sans que M.Orsenna n’y trouve grand-chose à redire, considérant la situation actuellecomme irréversible et, semble t-il, la culture de l’eucalyptus comme un moindremal.
Le même Denis Cheyssou avait pourtant commencé parse plaindre parce qu’aucun des candidats à la présidentielle ne prendraitsérieusement en compte l’écologie dans ses interventions, la reléguant ainsi auplan des sujets anecdotiques, à droite comme à gauche. S’agissant des candidatsde droite, nous n’en sommes guère surpris. Nous ne nous attendions pas à voircelui qui a été le coproducteur de l’enfumage dénommé « Grenelle del’Environnement » puis a ensuite déclaré « l’environnement, ça commence à bien faire » setransformer en écologiste exigeant. Mais à gauche, M. Cheyssou fait encorecomme s’il n’existait aucun autre candidat que celui du Parti socialiste, pourdénoncer l’indigence de son programme en matière d’environnement. Pas un mot dela campagne d’Éva Joly, pas plus que de laplanification écologique du programme du Front de Gauche. Jean-Luc Mélenchon ya pourtant consacré l’essentiel de son discours le 14 mars lors de son meetingde Clermont-Ferrand. Mais tout cela se passait il est vrai, loin, si loin de cepetit cénacle dont nous avons parlé.
C’est pourquoi M. Denis Cheyssou n’a rien entendu.Par chance, il avait aussi invité une indignée, pour lui permettre, selonl’expression consacrée, de pousser un « coup de gueule » : IsabelleDelannoy, accessoirement coscénariste avec Yann Arthus-Bertrand du film « Home », et collaboratrice dumême pour « La Terre vue duciel ». Une experte, donc, des questions environnementales, qui vientde créer à point nommé « uncollectif de femmes professionnelles de l’écologie » intitulé « Vertes de rage ! ». Cecollectif a lancé son « appel du 8mars, à toutes celles et ceux qui pensent que l’écologie devrait occuper uneposition centrale dans les débats à la présidentielle, ce qui n’est pas le cas ».Isabelle Delannoy se fait donc le porte-parole dudit collectif. On estsauvés !
Après cela, nous ferions preuve du plus mauvaisesprit à souligner ce dont il n’a pas été question dans l’interview.Qu’Isabelle Delannoy a écrit un livre intitulé : « Environnement : les candidats au banc d’essai ».Et que cela n’a vraiment, mais alors vraiment rien à voir avec son coup degueule. La preuve, c’est que lorsqu’on clique sur le titre du livre dans laprésentation de l’émission sur le site de France Inter, on se retrouvedirectement sur une librairie en ligne pour commander l’ouvrage. On comprendalors pourquoi elle n’est pas au courant du programme écologique des candidatsen 2012. C’est que le bouquin a été écrit en 2007, qu’il y en a encore à vendre2 neufs et 14 d’occasion à 1,99 €. Mais à ce prix là, c’est une affaire. Et onsera ainsi très heureux de savoir ce que pensent de l’écologie les candidat-e-sSégolène Royal, Philippe de Villiers, Olivier Besancenot, Dominique Voynet etJean-Marie Le Pen, et ça, foi d’écologiste, c’est du vrai recyclage !C’était le spécial copinage de « CO2, mon amour ».
Reynald Harlaut

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