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Etat de grâce - au-delà de l'engagement

Publié le 28 mars 2012 par Christophe Benavent

Etat de grâce - au-delà de l'engagement

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Ce fût au début de l'internet, et sans doute aussi en un temps où l'idée de bonheur était à la mode. Dans le monde nouveau qui naissait on espérait des extases, sans doute de celle qui 30 ans auparavant nourrissait des terrains vagues encombrés de sonos. Le modèle de Thomas et Novak introduisait l'idée de Flow pour comprendre la sidération de nos premiers écrans. Aujourd'hui ils sont bien plus riches, bien plus véloce, et nous avons tous depuis expérimenté ces nuits, ces jours, presque hypnotisés par des chats enflammés ou des parties infiniment recommencée de Tétris. Nous sommes sans doute moins hypnotisés mais sans doute plus addict.
L'expérience s'est adoucie, la surprise s'est fondue dans l'habitude, même si nos usages désormais requièrent des données massives dont les maîtres de la plomberie régulent les flots avec de nouvelles architectures. L'expérience plus que jamais est décisive pour le marché. Nous nous contentions de peu pour être étonné, surpris et transportés. On imagine mal aujourd'hui d'atteindre une telle intensité avec si peu de ressource. Pacman a enchanté les récréations des lycéens dans les années 80. Il faut bien plus de graphisme et de vidéo pour réveiller nos adolescents nonchalants. Les amours chuchotés sur ICQ réclament désormais une débauche de techniques pour faire rosir les joues.
Le ravissement, l'état de grâce, que le modèle du flow tentait de décrire avec cette idée d'immersion, de distorsion temporelle, d'acuité sensorielle, n'est peut être plus de mode mais correspond à une chose intemporelle, un principe fondamental, une clé pour comprendre comment les consommateurs produisent de la valeur dans l'expérience et trouve une utilité dans le rien qu'ils consomment.
Au cœur du modèle il y a l'idée forte de scyckenmihaly que le bonheur ne nait pas dans la satisfaction des attentes mais dans la jouissance qui jaillit de ce que les compétences excercée correspondent au défi qu'on relève. Si le monde a changé, nos nature reste identique. Longtemps nous avons cru que la valeur des choses se faisait dans l'aptitude à répondre à nos attentes. En définissant cette règle le marketing donnait de la substance à l'idée d'utilité des économiste qui rarement se sont penchés sur l'origine de cette chose essentielles de leurs calcul. Et cette doctrine a longtemps structuré la pratique : une chose vaut pour autant qu'elle réponde à des attentes, et que les remplissant elle produit un plaisir qu'on rapporte à la peine nécessaire pour l'obtenir. La valeur est un solde.
L'idée du bonheur romps avec cette hypothèse de satiété, en faisant de la joie non pas le comblement d'un vide, mais le résultat d'un exercice, celui d'appliquer les capacités que l'on a à un défi que l'on peut relever. Le flow est cet état de grâce, ce ravissement qui vient, quand on consacre toute l'intelligence, le savoir la maîtrise à relever un défi dont l'exigence est à la hauteur de nos capacités. Quand le défi est peu exigeant nous ressentons l'ennui, quand nos capacité sont insuffisantes nous souffrons de l'anxiété.
Observons que dans ce modèle il n'est plus d'attente, de besoin, de vide à remplir. Et que de ce point de vue il correspond assez précisément à un monde où on ne manque de rien, sauf d'exprimer des ressources qu'on possède. Il nous permet de comprendre qu'à mesure que nos ressources grandissent, pourvu qu'aucun nouveaux défis ne nous soit proposé, l'ennui nous envahit. Et à rebours, si le monde qui nous est donnés nous proposent des problèmes que nous ne savons résoudre, c'est une anxiété immense qui nous saisit. Les technologies imparfaites du début du siècle nous nous ainsi procurés des joies immenses car les défis qu'elle nous proposaient était à la hauteurs de nos compétences. Nous avons appris et sans doute les défis sont en en-deça de nos capacités. Désormais les technologies nous ennuient.
Le modèle de Thomas et Novak est passé de mode, car l ne correspond plus à l'esprit du temps. Nous avons appris à vivre en pianotant sur les écrans tactiles, à ne plus être surpris de dialoguer avec de presque inconnus, nous passons d'un écran à l'autre avec indifférence, les robots qui nous parlent dans des enveloppes en trois D nous sont des animaux familiers.
Et pourtant, il en reste une leçon très forte. Le plaisir que nous donnons ne tient pas dans la capacité à remplir des besoins que nos techniques réinvente nous condamnant à Sisyphe et nous enfermant dans cette malédiction de la satisfaction : à mesure que nos nos besoins se remplissent nos attentes grandissent. La joie que nous pouvons éprouver provient de cette adéquation entre ce que nous pouvons faire et des enjeux qui nous sont proposés.
Pour le marketing les conséquence sont claires. C'est en distribuant des capacités et en réglant le niveaux des enjeux que l'on peut produire chez nos consommateur le niveau optimal de plaisir. Ne cherchons pas à mesurer les attentes, ni a les satisfaire. Prenons soin de définir pour chacun le niveau d’enjeux et d'effort adéquat aux capacités, prenons soin d'ajuster les capacités au niveaux de défi proposé. Certaines industries ont bien compris l'enjeu. Dans les jeux vidéo des niveaux permettent à chacun des joueurs d'ajuster leur niveaux de compétences, et quand certains buttent sur des paliers, par des canaux sélectifs des solutions sont apportées. Le sport depuis longtemps à hiérarchisés les équipes moins par leur talent que par les enjeux qu'elles peuvent réussir, et par la techniques des handicap rectifient des compétences inadéquates.
La finalité du marketing n'est donc pas que de satisfaire les besoins mais de faire que les conditions de la consommation produisent la plus grande valeur pour chacun. C'est bien là l'idée centrale de l'expérience. Elle présuppose un engagement des consommateurs – sans celui-ci il n'y aurait aucun défi, elle nécessite des compétences. Mais surtout, alors qu'on accorde aujourd'hui à l'engagement un rôle primordial pour mesurer la performance, faudra-il mesurer aussi la plénitude de sa réalisation.
Si la satisfaction résulte d'une comparaison de ce qui était attendu et de ce qui a été obtenu, l'état de grâce est le fruit de la réalisation des talents. Dans le monde digital ceci peut être observé par la persistance des actions du consommateurs. La vertu de la grâce est de donner de l'appétit, celle de la satisfaction de l'éteindre. L'intensité et la continuité de l'usage serait ainsi les indicateurs de cet état de grâce.

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