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Pierre-Napoléon Bonaparte: La vérité sur la vie du Prince Corse

Publié le 11 mars 2008 par Corsicanova
Si Napoléon le Grand naquit sous une bonne étoile, un 15 août 1769, jour de l'Assomption et « fête nationale » en Corse, et dans la France d'autrefois. Il n'en sera pas de même pour son neveu, Pierre Bonaparte, qui naîtra quelques jours seulement avant que son oncle l'Empereur arrive pour son dernier exil sur l'Ile de Sainte Hélène, dans un Monde hostile à sa famille…

Septième des dix enfants de Lucien Bonaparte frère cadet de Napoléon) et d Alexandrine Jacob de Bleschamp, il naît à Rome le 11 octobre 1815, après que son père, fait en 1814 par Pie 7 prince romain de Canino, se fut durant les Cent-Jours, réconcilié avec l'empereur son frère.
Pierre se trouvera ainsi parmi douze autres enfants (sept filles et cinq garçons), Les parents, en raison de leurs obligations mondaines, ne pouvaient s'en occuper directement. Cinquième garçon de cette nombreuse fratrie, Pierre, intelligent et très sensible, souffrira tout particulièrement de ce manque d'affection de la part de ses parents.

Canino, situé dans le Latium à plus de soixante kilomètres au Nord-Ouest de Rome, est un vaste domaine au cœur de la Maremme. Sa superficie est de huit mille hectares dont trois mille de bois avec également de nombreux marais le long de la mer Tyrrhénienne. Dans ce territoire sauvage, inhospitalier, insalubre, le paludisme est endémique. Le domaine comprend également les terres et le château de Musignano, près de Canino.

Pierre grandit au sein de cette nature rude où de nombreux bergers surveillent plusieurs milliers de têtes de bétails, bovins et ovins.

Pierre a de bons précepteurs.
Cependant, Lucien et Alexandrine tiennent à ce que leurs enfants aient une solide formation. Ils confient donc l'éducation de Pierre et d Antoine à deux précepteurs : l'abbé CASANOVA et le Père Maurice de BRESCIA. Ces éducateurs ne sont pas de simples religieux « de base » : ils ont une grande compétence dans de nombreux domaines. Maurice en particulier, père franciscain et grand ami de Lucien, comptait parmi les personnes les plus instruites d'Italie. Lucien appréciait tout particulièrement ses connaissances en astronomie et en archéologie, sciences auxquelles le Prince de Canino consacrait une grande partie de son temps.
Ainsi Pierre, doué pour les études malgré son caractère indépendant, réussit grâce à ses précepteurs à acquérir une solide culture générale et littéraire.

Outre son frère Antoine, les compagnons de Pierre étaient également le nombreux personnel employé aux champs, et surtout les bergers, pour la plupart d'origine corse. Si le rôle de ces bergers était de s occuper des troupeaux, il était aussi de défendre la propriété et leurs maîtres contre les incursions de bandits, très nombreux et très entreprenants, qui infestaient la région.
Les bergers, pour remplir leur mission, étaient armés de fusils de chasse et accompagnés de gros chiens dressés à garder les troupeaux et les personnes. Pierre aimait se trouver parmi eux. Il écoutait leurs histoires de chasse et de bandits. Le contact permanent avec ces hommes simples et rudes lui fit aimer la nature et les exercices physiques. Courir dans les bois, poursuivre le gibier au galop étaient ses grandes passions. Il pratiquait également l'escrime et le tir à l arc.

Notre jeune Prince, issu d une famille déchue de ses fonctions souveraines, est un jeune homme ardent à la recherche du destin exceptionnel pour lequel il se sent prédestiné. Cette quête va l'entraîner dans des aventures rocambolesques, à Canino il nourrira l'espoir de rentrer en Corse et soulever la population contre le Roi au nom de Napoléon II !

Très affecté par les décès de son frère Paul servant dans la marine anglaise, et de sa sœur Jeanne, marquise Honorati, puis très lié avec son cadet Antoine, aussi tête brûlée que lui, il participe en 1831, avec ses cousins Napoléon-Louis et Louis-Napoléon, à l'insurrection des Romagnes.
La Charbonnerie française avait été très active dans les évènements de Paris. En 1830, ceux-ci avaient entraîné la chute de Charles X et l avènement de Louis-Philippe. Ensuite, les Carbonari italiens se soulèvent en 1831 contre l'autorité du Pape.
Les fils de Louis BONAPARTE et d Hortense, Napoléon-Louis et Louis-Napoléon, étaient membres Carbonari et participaient à cette insurrection. Pierre a alors 16 ans. Il bout d impatience, et veut prendre part à cette révolte aux côtés de ses cousins germains, en particulier Napoléon-Louis.
Profitant de l'absence de son père, il quitte Canino avec son frère Louis, sans en informer personne. Lucien en est averti par un éducateur. Or, il ne souhaite aucunement déplaire au Saint-Siège auquel il doit sa principauté. A sa demande, les gendarmes arrêtent très rapidement les jeunes fugitifs, et les incarcèrent à Livourne. En raison de son jeune âge, Pierre bénéficie d un régime de faveur de la part de ses gardiens. Il restera six mois en prison de mai à novembre 1831.

A sa sortie de prison de Livourne, Pierre, interdit de séjour dans les Etats du Pape, s'embarque pour les USA en janvier 1832. Il va y rejoindre son oncle Joseph - ex-Roi d Espagne - qui réside à Pointe Breeze, sur la Delaware, entre Philadelphie et New-York.
Il passera d abord quelque temps à New-York, en compagnie de ses cousins germains qui s y trouvent déjà. Il s agit de Louis-Napoléon et Jérôme-Napoléon - dit « Plon-Plon » - fils du Roi Jérôme. Il se rend ensuite chez son oncle Joseph mais la vie facile et oisive qu'il y trouve ne lui convient pas du tout. Il lui faut du mouvement, de l'action pour avoir l'impression d'exister.

Une occasion se présente. La Colombie et l'Equateur deux Républiques associées d Amérique du Sud sont en guerre depuis de nombreuses années, et cette guerre civile est sur le point de se terminer. Nous sommes en juillet 1832.
Il demande à prendre du service dans l'armée du Général Président de la Nouvelle Grenade (Colombie actuelle), SANTANDER, et cette demande est acceptée. SANTANDER apprécie chez ce jeune homme ses qualités de cavalier et son ardeur au combat. Il le prend auprès de lui comme Aide de Camp, avec le grade de commandant. Pierre n a alors que 17 ans !
Il prend part à plusieurs batailles et en particulier à la prise de Santa Fe de Bogota. Sa bravoure, sa fougue, son mépris du danger et son dévouement lui valent la sympathie et l'estime du Général Président SANTANDER. Celui-ci lui propose, la guerre terminée, de rester dans l'armée colombienne.
Mais les puissances européennes s opposent farouchement à une possible « montée de popularité » d un membre de la famille impériale. Cette proposition n'a donc aucune suite au grand désappointement de Pierre.

Libre de tout engagement, il parcourt en touriste la Cordillère des Andes, mais ne tarde pas à être victime des « fièvres ». Malade, affaibli, il rentre à New-York en janvier 1833.
Quelques mois après, le Pape Grégoire XVI l'autorise à revenir s installer a Canino où il arrive en mai 1833. Il a 18 ans.

Depuis son arrivée à Canino, il mène une vie très simple. Sa principale occupation est la chasse. Mais sa conduite n'est pas toujours irréprochable aux yeux de la police pontificale. Par exemple celle-ci l accuse d avoir tendance à s immiscer dans les affaires de police de la région.

Le 20 avril 1836, avec son frère Antoine, il chasse dans les bois voisins de Canino. Soudain, à la place d un gibier, surgit le fameux bandit SALTAMACHIONE. Celui-ci, auteur de plusieurs crimes, est très recherché par la police. Craignant d'être pris pour cible, Antoine tire sur le bandit et le blesse. Ils le remettent ensuite aux autorités. Les deux frères pensent être félicités pour cette arrestation. Ce fut tout le contraire, peut-être à la suite d un rapport de police malveillant. Quoiqu'il en soit, le Pape Grégoire XVI décide de faire arrêter les jeunes gens.
Le 3 mai 1836, soit une quinzaine de jours après l'arrestation mouvementée de SALTAMACHIONE, Pierre et Antoine, retour de la chasse, arrivent sur la place de Canino. C'est jour de marché ; il y a foule. On signale à Pierre la présence du lieutenant de carabiniers de la Garde pontificale CAGIANO di AZEVEDO. Pierre, qui le connaît très bien, va à sa rencontre. Le lieutenant lui dit être à Canino par simple routine. Pierre l'invite à prendre un verre avec un de ses subordonnés au café voisin. Antoine, de son côté, est rentré au château.
Tout en devisant avec Pierre, le lieutenant observe la place, où plusieurs carabiniers ont pris position, sous les ordres d un capitaine. A un signal, le lieutenant et son second bondissent sur Pierre et lui arrachent son fusil. Pierre, pensant à un guet-apens, se défend de toutes ses forces et d un coup de couteau de chasse, blesse mortellement le jeune lieutenant.
Maîtrisé, blessé, Pierre sera finalement arrêté et incarcéré à Rome. Il est condamné à mort le 26 septembre 1836. Après 9 mois dans la prison pontificale du château Saint-Ange, le Pape le graciera… Mais il doit à nouveau quitter Canino qu'il aime tant pour l'Amérique.
Voilà comment, à la suite d un malheureux concours de circonstances et de maladresses policières, Pierre en est arrivé à poignarder mortellement un jeune officier de gendarmerie. Il partageait pourtant le verre de l'amitié avec celui-ci sans méfiance aucune



Revenu en Europe, il part à Corfou, qu'il doit quitter à la suite d une fusillade avec des Albanais. Il s'installe à Mohimont, dans les Ardennes belges, avec sa maîtresse Rose Hesnard et s y fait oublier pendant dix ans.

Ce brillant cavalier de fière allure, passionné de chasse et d'armes à feu, croit son heure arrivée avec la révolution de 1848. Le 26 février 1848, dès le début de la Révolution qui chasse Louis-Philippe, Pierre au risque de se faire arrêter, rentre précipitamment à Paris. Il se met aussitôt à la disposition du Gouvernement Provisoire. Louis BLANC, l'anarchiste, lui adresse une lettre pour lui annoncer sa nomination au grade de Commandant à titre étranger dans la Légion Etrangère.

Il termine la lettre par ces mots :
« Le Gouvernement Provisoire vient de vous donner une marque de confiance qu'en ma qualité de Corse, je suis heureux de vous annoncer.
Salut et Fraternité. Le 15 avril 1848
Louis BLANC Membre du Gouvernement Provisoire.

Pierre profite de cette nomination assortie d un congé illimité en raison de l'absence d un poste vacant pour se présenter aux élections du 23 avril. Il est élu dans deux départements, la Corse et l'Ardèche.
Il choisit de représenter la Corse, et malgré l'aimable lettre de Louis BLANC, il se range aux côtés de LAMARTINE contre l anarchie. Cette élection lui permet de rester en congé à Paris.
A ces élections sont également élus le Prince Jérôme BONAPARTE, fils du Roi Jérôme, et le Prince Lucien MURAT.

Quelques mois plus tard Pierre, incité par le Président Louis Napoléon Bonaparte et ses ministres, décide de partir en mission en tant que commandant dans la Légion étrangère dans le sud algérien, à Zaatcha, dernière poche de résistance à la colonisation française.
Arrivé en Algérie le 9 octobre 1849, il se bat héroïquement quinze jours après à Zaatcha, à la tête d'une troupe de 400 hommes dont 200 légionnaires. Il met en déroute un fort contingent rebelle.
Son comportement au feu lui vaut les chaleureuses félicitations de son chef, le colonel CARBUCCIA ainsi que celles du Général HERBILLON, commandant le secteur.
Une lettre du Gouverneur de l Algérie l'autorise à se rendre à Paris. Considérant que sa présence à la Légion n'est plus indispensable, il regagne la France en s embarquant à Philippeville pour Marseille le 8 novembre 1849. Il aura passé un mois en Algérie. Son retour est vivement critiqué à la Chambre par ses collègues de l opposition qui crient à la désertion.
Il se justifia par la suite dans un ouvrage intitulé « Un Mois en Afrique »

Pierre ne prend aucune part au coup d Etat du 2 décembre 1851, immobilisé par une chute de cheval qui lui a cassé une jambe.
Malgré ses idées démocratiques, il refuse de suivre certains de ses collègues députés qui voulaient s'opposer au Coup d'Etat. Il soutient son cousin par esprit de famille.
Mais le Président s éloigne de plus en plus de Pierre et lui refuse toute intégration dans l'armée et tout emploi dans l'administration.
Pierre est d'autant plus découragé que sa compagne Rose vient de mourir au début de 1852.

Malgré son immense chagrin, Pierre se console quelques mois plus tard.
En effet, il épouse secrètement Justine Eléonore Nina RUFFIN, 19 ans, fille d'un ouvrier fondeur de cuivre, en Corse, le couple y rencontre un ancien précepteur des enfants de Lucien, l'abbé Casanova, qui accepte de le bénir, sans mariage civil préalable.
Le mariage de Lucien avait causé un conflit avec Napoléon Ier. L'union de Pierre en causera un autre avec Napoléon III, pour les mêmes raisons. Mais elle durera toute sa vie.

Retiré en Corse dans la région de Calenzana (Haute Corse près de Calvi), il y occupera plusieurs fonctions électives.
En Avril 1852, Pierre, désappointé, part pour la Corse où il sera élu Conseiller Général. Après quelques mois dans un appartement de la citadelle de Calvi, il s'installe avec Nina à Grotta Niella, maison au bord d'une plage de sable blanc, à 4 kilomètres de la cité.
Avant son départ, le ministre de la Justice lui propose de convaincre le cruel bandit SERAFINO, qui terrorise la région de Calvi, d'accepter un passeport pour l'Amérique. Cette mission lui convient parfaitement, mais le bandit refuse. Il sera abattu par les gendarmes quelques temps après avoir assassiné un ami de Pierre, maire d un village voisin. Après cet assassinat, Pierre n avait pas accordé le passeport que le bandit était revenu lui quémander.

Le climat de Calvi ne convenant pas à Nina, Pierre achète un terrain à Luzzipeo, sur le territoire de Calenzana, à 10 kilomètres au sud de Calvi. Il y fait construire un château, utiliser comme pavillon de chasse, près des ruines d une tour génoise la « Torra Mozza » - qui domine la baie de Crovani ; il y écrira une biographie de SAMPIERO CORSO.

Il loue également une chasse dans les environs et achète dès qu'il le peut 25 hectares qu'il met en culture. En novembre 1852, après avoir emménagé dans son château, il part rejoindre Nina à Paris.

C'est le moment où Louis-Napoléon BONAPARTE est proclamé Empereur des Français. C est le moment aussi où Napoléon III épouse Eugénie de MONTIJO. Pierre est invité en qualité de témoin. Il signe le registre, mais ne voit pas les mariés. Le lendemain 30 janvier 1853, le mariage religieux est célébré en grande pompe à Notre Dame. Pierre n'est pas invité.
Quelques jours plus tard Pierre, humilié et déçu, repart pour la Corse où il s installe à Luzzipeo avec Nina.

Dans ce site sauvage où il passera plusieurs années, Pierre semble avoir été très heureux. Dans cet endroit rêvé pour la chasse, il retrouvera de nombreux amis, parmi lesquels Olinthe BONACORSI, « u sgio Lintu ». Ce riche propriétaire terrien Calenzanais, dernier descendant d une illustre famille florentine, l a certainement reçu plusieurs fois à Calenzana dans sa magnifique demeure seigneuriale entourée d un grand parc. Un autre de ses grands amis est le Capitaine BIANCONI, un vieux capitaine du premier Empire, Chevalier de la Légion d Honneur et maire de Calenzana (mon ancêtre) Il lui est tout dévoué.
Nina l'accompagne souvent à la chasse dans des conditions très pénibles. En son absence et malgré son amour pour elle, Pierre, coureur de jupons, disparaît assez fréquemment derrière un bosquet avec une jeune paysanne. De ces escapades naîtront plusieurs enfants illégitimes, qui deviendront de bons petits Calenzanais...
Ses séjours en Corse furent certainement les plus agréables de Pierre. Plus tard, en 1864, il rendra un vibrant hommage aux Calenzanais en publiant un court récit accompagné d un poème épique sur « La bataille de Calenzana ».

Il répondait ainsi à l attachement des Calenzanais et des habitants du canton qui votèrent pour lui à une très forte majorité - surtout à Calenzana et Lunghignano, lors des législatives du 7 juin 1863.
Mais Napoléon III ayant fait opposition à sa candidature, le candidat officiel ABBATUCCI fut élu. Pierre, bien que déçu une nouvelle fois par l Empereur, lui écrit le 10 juin 1863 :
« Je constate ma position hybride, qui fait de moi une espèce de paria, un Masque de Fer du XIXème siècle. Je ne suis ni Prince, ni citoyen, ni électeur, ni éligible, ni apte à exercer des fonctions publiques quelconques ou une industrie qui assure mon avenir. »

Cependant, il accepte en juillet 1864 la présidence du Conseil Général de la Corse. Après avoir passé l'été de cette année à Luzzipeo, il quitte définitivement la Corse pour la Belgique. Il confie en partant à son vieil ami le capitaine BIANCONI la gestion de ses propriétés.

Et c est durant cette période qu' 'il fera édifier de ses deniers la fameuse fontaine du village surmontée de son buste en bronze et encore en fonction aujourd�hui.


Le 2 octobre 1867, dans leur château des Epioux, le maire belge de Lacuisine procède au mariage civil des deux amants, mais si irrégulièrement que Napoléon III refuse d'en reconnaître la validité. En fait, les relations de l'Empereur et de son cousin, qu'il a cependant fait prince en 1856, sont si mauvaises que le souverain lui interdit de faire usage de son second prénom.
Evidemment, Nina ne sera jamais reçue aux Tuileries, et Pierre y a difficilement accès, tant on y craint ses incartades. Si ses proches parents causent bien des soucis à Napoléon III, ceux-ci sont minces à côté du scandale que provoque, le 10 janvier 1870, l'assassinat du journaliste Victor Noir, de son vrai nom Yvan Salmon, par le prince Pierre Bonaparte, dont ce n'est pas la première victime.

Ce jour-là, en effet, se présentent au domicile de ce dernier deux rédacteurs du quotidien La Marseillaise, M.M. Fonvielle et Noir, que le maître de céans prend pour les envoyés d Henri ROchefort - alias marquis de Rochefort-Luçay, qu'il avait provoqué en duel pour avoir traité les Bonaparte de bêtes féroces. Or les deux émissaires sont mandatés par Pascal Grousset, du journal corse La Revanche, pour demander réparation des injures dont Pierre l'a abreuvé dans un article paru dans L'Avenir de la Corse. Il en résulte un malentendu qu'aggrave Noir en frappant au visage son hôte, qui a froissé et jeté sans la lire, la lettre de Grousset.
S'estimant en état de légitime défense, Pierre sort un revolver et abat son agresseur, qui s écroule dans l'escalier en cherchant à s enfuir, tandis que son meurtrier continue à tirer sur Fonvielle qui crie à tue-tête "A l'assassin".

Le cousin de l'Empereur prévient lui-même le secrétaire particulier de celui-ci et se laisse confortablement incarcérer à la Conciergerie, pendant que les amis du mort organisent des manifestations anti bonapartistes à l'occasion des funérailles et dont le polémiste virulent Rochefort se repent d'avoir eu la faiblesse de croire qu'un Bonaparte pouvait être autre chose qu'un assassin. En fait, le défilé populaire tourne court, dès que la dépouille mortelle de la victime est inhumée au cimetière de Neuilly.
La Haute Cour de justice, seule habilitée à juger un prince de la famille de l'Empereur se réunit à Tours le 21 mars 1870 et entend les avocats de la partie civile évoquer les tristes antécédents de l'accusé, qui n'en est pas moins acquitté, mais condamné aux dépens et à verser une pension aux parents Salmon. Napoléon III prit la peine d écrire à son cousin pour lui conseiller de partir à l'étranger, mais Pierre n'en fait rien.

Il faut le désastre de Sedan pour l'y décider. En se rendant dans sa chère Belgique, il salue une dernière fois, en gare de Jemelle, le souverain déchu partant en captivité.
Son hôtel parisien est pillé puis incendié par les communards, et femme et enfants vont vivre aux Epioux, que, complètement ruiné, Pierre doit bientôt mettre en vente.

Auparavant, l'autoritaire Nina a obtenu de son indocile et infidèle époux que soit célébré au consulat de France à Bruxelles un mariage inattaquable. C'est chose faite le 14 novembre 1871. Sont ainsi régularisés la situation matrimoniale des conjoints et le statut des enfants.
Puis, les emmenant avec elle, Nina, devenue princesse, abandonne à son triste sort un mari diabétique et hydropisique, pour aller ouvrir à Londres une boutique de modes, dont l'enseigne fait scandale. Rejetée par les fervents de l'Empire, elle emménage à Paris au 17 de la rue de Grenelle pour s'occuper sérieusement de l'instruction de son fils, restée rudimentaire.

Quant à Pierre, il se met en ménage avec une nouvelle maîtresse, Adèle Dideriche qui, en 1873, lui aurait donné un fils mort en bas âge, sollicite la générosité de ses neveux et nièces, taquine les muses à l'instar de ses père et mère, puis en 1877 demande à rentrer en France.

Il vient alors habiter à Versailles 15, dans un hôtel tenu par des Corses, rue Colbert, et y meurt le 9 août 1881. Ses dernières années seront particulièrement difficiles en raison de son très mauvais état de santé, du manque d'argent et d'une certaine solitude (la date et l'adresse de la maison mortuaire sont controversées). Sans tenir compte de son désir de reposer simplement au Pré-Lacroix sous un arbre, en forêt ardennaise, il est enterré au cimetière des Gonards.

Après de bonnes études payées par Napoléon (Jérôme) et Mathilde, Roland entre à Saint-Cyr en 1878, en sort sous-lieutenant au bataillon du 36ème de ligne caserné à Saint-Cloud, épouse le 17 novembre 1880, grâce aux intrigues de sa mère, la richissime Marie-Félix Blanc, qui meurt le 2 août 1882, après avoir mis au monde une fille Marie.

Devenue princesse Georges de Grèce, celle-ci est la maîtresse du ministre Aristide Briand et une disciple du psychanalyste Sigmund Freud.

Le 16 juillet 1886, Roland est rayé des cadres de l'armée en tant que membre d'une famille ayant régné sur la France, et ce bien qu'un sénatus-consulte du 18 mars 1804 ait rendu non dynastes Lucien et ses descendants.
Transformé en géographe et en botaniste, il se fait construire, le somptueux hôtel de l'avenue de Iéna, où sa mère meurt le 13 octobre 1905, à l âge de 74 ans, un quart de siècle après son mari, auprès de qui elle repose avec son fils et sa bru.

De son côté, Jeanne épouse le comte Christian de Villeneuve-Esclapon, marquis de Vence, dont la descendance est toujours représentée.


Sources :
- Mes recherches personnelles
- Le Dictionnaire du Second Empire, Fayard, 1995. Qui comporte tout de même beaucoup d'erreurs au sujet du Prince Pierre Napoléon Bonaparte !
- Pierre Napoléon Bonaparte, Prince corse par Jean Tarissi de L'Academia Corsa.
- Pierre Napoléon Bonaparte par Eugénie de Grèce.

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