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Flou ou volte-face, ce qu'il faut comprendre des propositions de Sarkozy

Publié le 17 avril 2012 par Juan
Flou ou volte-face, ce qu'il faut comprendre des propositions de Sarkozy Il voulait montrer qu'il avait appris, compris, changé. Que son second quinquennat, s'il y en avait un, serait différent car celui d'un président muri par l'expérience crise. Mais il voulait aussi faire croire que son volontarisme était intact, qu'il avait réussi de grandes choses, que son bilan n'était pas si mauvais que cela.
Dimanche sur la place de la Concorde, devant les quelques 25.000 participants qui furent finalement décomptés, son premier ministre eut cette formule improbable: je ne rougis de rien. Présumé coupable, il venait lui aussi plaider innocent.
Depuis le début de l'année, les annonces du candidat Sarkozy se partagent en trois catégories: les fausses annonces, les annonces gratuites, et les voltes-faces.
Fausses annonces
Les fausses annonces sont ces mesures présentées comme nouvelles alors qu'elles sont en place, ou occultées alors qu'elles existent tout autant. Après le rétablissement de l'impôt de Bourse (supprimé par Nicolas Sarkozy en 2007), Nicolas Sarkozy a proposé ce weekend la création d'un dispositif de faillite civile comme il en existe en Alsace et ... en France. Samuel Laurent rappelle, dans le Monde du 17 avril, Jean-Louis Borloo avait proposé, en 2003, « un régime similaire, la procédure de redressement personnel (PRP), qui est ouvertement inspirée de la loi en vigueur en Alsace-Moselle.»
Il y a aussi l'agenda caché du candidat sortant, ces 45 milliards d'euros de hausse d'impôt décidées dans les précédentes lois de finances qui pèseront sur les ménages et les entreprises entre 2012 et 2017. Le gel du barème de l'Impôt sur le revenu ou le relèvement quasi-général de la TVA en sont deux des plus symboliques et des plus coûteuses.
Annonces gratuites
Les annonces gratuites regroupent toutes ces mesures, dont certaines rapidement votées depuis janvier, qui ne sont que des effets d'affichage. Le président sortant sait qu'il n'y a plus d'argent dans les caisses de l'Etat, et il s'est évertué à imaginer des mesures « gratuites ». Quel est le point de commun de toutes ces annonces ? Il s'agit de libéralisations plus ou moins volontaires.
1. Augmenter la surface constructible (mesure déjà votée): cela n'aura aucune incidence sur la construction
2. Etendre la faculté du congé parental jusqu'au 18 ans de l'enfant.
3. Fractionner les congés maternités. Mi-mars, le candidat sortant a proposé: « qu'on étudie la possibilité de fractionner dans le temps les congés maternité au lieu de les prendre en une seule fois, ça peut arranger les entreprises et les salariés »
4. Réduire le nombre de normes. Il y a 15 jours, le candidat sortant a proposé de supprimer deux normes dès qu'une nouvelle norme serait créée. L'an dernier, il se félicitait du nombre record de lois et réformes adoptées dans l'avant-dernière session parlementaire.
5. Créer « une maison de soins à côté de chaque hôpital pour désengorger les urgences et les hôpitaux ». Evidemment, Nicolas Sarkozy ne prévoyait aucune promesse budgétaire
6. Autoriser des accords compétitivité/emploi: « Et si la loi laissait les gens discuter les gens entre eux ? » Sarkozy plaide pour la flexibilité de la durée de travail, entreprise par entreprise.
7.  Fusionner délégués du personnel, comité d'entreprise et comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) dans les entreprises de 50 à 300 salariés, devant la CGPME. Quelle grande idée !
Volte-face
La dernière catégorie est incroyable. Il fallut attendre l'entrée officielle de Nicolas Sarkozy le 15 février 2012 pour les entendre. Nicolas Sarkozy avait des idées « fortes » à proposer. On les attendait.
Il y eut cette affaire du blocage des loyers. Le 29 janvier, il dénonçait l'idée de François Hollande: « C'est très simple: plus personne ne louera et plus personne ne construira. C'est exactement le contraire de ce qu'il faut faire. Cela n'a marché nulle part, même à l'époque de l'Union soviétique ». Trois mois plus tard, dans une interview à Femme Actuelle, il approuve le dispositif allemand qui offre aux locataires la possibilité de bloquer une augmentation de loyer supérieur à 20% aux prix du marché. C'est la volte-face: « Il ne s'agit pas de bloquer les loyers mais bien d'un encadrement. C'est en cela qu'elle est intéressante. Je l'appliquerai ». Notez la différence.
Dimanche 15 avril, à la Concorde, puis lundi matin sur France 2, c'est plus énorme encore. Nicolas Sarkozy promet l'incroyable.
« Après ce que nous avons fait pour sauver l’Euro, je veux poser non seulement le problème des frontières mais aussi celui du rôle de la Banque Centrale Européenne dans le soutien à la croissance. C’est une question très importante que nous ne pourrons pas éluder. Car si l’Europe ne veut pas perdre pied dans l’économie mondiale, elle doit absolument renouer avec la croissance. »
Il voulait que la BCE obéisse aux injonctions politiques, en particulier pour soutenir la croissance. Il voulait aussi que la BCE officialise ses interventions en faveur des Etats.
« On nous avait dit que la Banque centrale ne pourrait pas intervenir pour sauver l’Euro. Et la Banque centrale s’est donné la liberté nécessaire pour sauver l’Euro en fournissant de la liquidité aux banques. Ce qui était un tabou devant la crise est tombé comme une frontière de papier. »
Pour sa grande amie Angela Merkel, c'était presque une déclaration de guerre. Nicolas Sarkozy se ralliait à la grande idée de la quasi-totalité de ses opposants. Dès lundi matin, la grande union franco-allemande que Nicolas Sarkozy nous vendait pour défendre sa « responsabilité » dans la gestion des affaires du pays était ruinée. Le gouvernement allemand fit savoir, lors d'un simple point presse le lendemain: «La conviction profonde du gouvernement allemand est que la BCE exerce son mandat de manière totalement indépendante de la politique»
La France forte, c'était donc la vire-volte chaque weekend. Ou bien...
Hollande inspire de plus en plus Sarkozy, résume l'Express. Et pourtant, le candidat sortant continue ses outrances sur l'irresponsabilité de son rival socialiste.
Fallait-il qu'il soit en doute.


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