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Gouvernance européenne « à multiniveaux » : comment conjuguer démocratie et efficacité ?

Publié le 19 avril 2012 par Jblully

Gouvernance européenne « à multiniveaux » : comment conjuguer démocratie et efficacité ? - gouvernance-europeenne©christemo-FotoliaFace aux difficultés des Etats, à l’intérieur de l’Union européenne, régions et villes se sentent pousser des ailes. « Pourquoi ne ferions-nous pas mieux ? Que l’on nous donne cette opportunité ! », pensent-elles, à une large majorité, et de plus en plus ouvertement. Précisément, le Comité des régions, qui les représente officiellement à Bruxelles, s’est engagé dès 2009, dans un Livre blanc, à promouvoir une culture de la gouvernance « partagée » impliquant la participation des élus de tous les niveaux au processus européen. Trois ans plus tard, aiguillonné par la crise, il enfonce à nouveau le clou avec un projet de « Charte de la gouvernance », assortie d’un baromètre de la dynamique constatée en matière d’autonomie politique, juridique et fiscale des autorités locales et régionales.

Certes le Traité de Lisbonne a ancré ce principe dans le fonctionnement de l’UE. Mais, pour les représentants des régions et des villes, il y a encore loin de la coupe aux lèvres. Or, la Commission européenne fait les yeux doux aux régions et aux villes, en multipliant les forums à leur intention. Celle-ci souligne en effet, à juste titre, que les villes devraient faire l’objet d’une attention majeure car elles comptent près de 70 % de la population de l’UE. Dans ces conditions, pourquoi ne pas les faire davantage bénéficier du FEDER ou du FSE ?

Le Comité des Régions, organe purement consultatif (et dont la compétence n’est pas universelle), voit là, bien évidemment, l’occasion de se rendre incontournable en arguant de sa proximité du terrain. Celle-ci est d’ailleurs revendiquée par nombre d’acteurs et de citoyens, qui estiment, non sans raison, que cette proximité permet de mieux répondre aux besoins.

Toutefois, cette revendication, sous couvert de « surfer sur la vague » de la décentralisation la plus large (« tout sauf Bruxelles…et Paris ! »), ne saurait masquer une forte ambition : celle de jouer, en tant qu’institution, un rôle politique sensiblement accru !
Pourquoi, en effet, ne pas davantage associer des acteurs « de terrain » à des processus qui in fine les concernent ? Cela semble parfaitement logique et naturel…mais, à y regarder de plus près, pose de nombreux problèmes politiques et pratiques :

- Ce sont les Etats qui sont signataires des traités et, à ce titre, seuls responsables de l’application des politiques décidées au niveau communautaire. Or on voit mal l’Etat aujourd’hui, surtout en France, et indépendamment du courant politique au pouvoir, abandonner ce rôle prééminent.
- Que faut-il entendre par région ? L’Europe est morcelée en un agrégat de structures (97, 270 ou …1.300, selon les critères retenus), dont les compétences et les ressources sont hautement différenciés. Où positionner le curseur, pour que le processus soit pertinent ? Comment, plus près de nous, intégrer le fait métropolitain, qui s’affirme de jour en jour ?
- La codécision offre aux élus du Parlement européen la possibilité de faire entendre leur voix « politique » mais aussi leur voix « régionale ». Mais quel est l’impact réel de cette double sensibilité ? Outre qu’en France, l’ancrage régional de ces élus est rarement très affirmé, l’organisation des travaux en groupes paneuropéens a tendance à diluer le fait régional au profit de la négociation tactique.
- De nombreuses politiques doivent être conçues à un niveau nécessairement transrégional pour éliminer les maillons faibles et d’homogénéiser les infrastructures.
- Sur le plan pratique, la multiplicité des acteurs ne peut que compliquer des circuits, déjà jugés complexes et rebutants. En effet, le souci de dépenser utilement passe souvent après celui de dépenser d’une manière administrativement conforme aux procédures, ce qui n’est pas toujours bien compris, et encore moins accepté.

Face à cela, la solution ne consiste sûrement pas à confier toutes les clés aux administrations nationales. Mais les confier aux régions, si c’était envisageable, ne serait pas meilleur, compte tenu de leur hétérogénéité et face à l’impossibilité, pour le moment du moins, de définir un mode de décision à la fois représentatif et impartial ?

La solution se trouve certainement bien davantage dans les capitales européennes qu’à Bruxelles. C’est un véritable remodelage des relations entre Etat(s) et régions qu’il faut mettre au point, pour rendre les autorités globalement plus représentatives et, en même temps, plus efficaces dans la gestion de ressources financières devenues moins abondantes. Et, au-delà de cela, contribuer à redonner au citoyen une image plus positive de l’Europe, celle-ci ayant un effet démultiplicateur puissant, que beaucoup sous-estiment ou feignent d’ignorer !

Pourquoi nos responsables politiques ne profiteraient – ils pas des débats électoraux actuels pour faire un peu de pédagogie au service de tous ?


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