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MASA. CRITICA. En Chine, dans les grandes villes, aux...

Publié le 26 avril 2012 par Fabrice @poirpom
MASA. CRITICA.

En Chine, dans les grandes villes, aux...

MASA. CRITICA.

En Chine, dans les grandes villes, aux croisements sans feux de signalisation, les cyclistes attendent d’être assez nombreux pour traverser ensemble.

Une masse critique. Apparition au sein d’un système d’un amas suffisamment important pour qu’un changement s’opère.

Une Masse Critique. Une ânerie apparue en 1992 à San Francisco, la ville des neo-babos bouffeurs de tofu à toutes les sauces. Une manifestation à bicyclette ou toute autre bricole sans moteur.

Ceci n’est pas une protestation. Mais une célébration.

En réunissant suffisamment de monde, cet atroupement ne bloque pas la circulation. Il devient la circulation.

En France, à Lyon notamment, la Vélorution organise ce genre d’événements. Un peu partout dans le monde, des Masses Critiques s’organisent chaque dernier vendredi du mois.

Comme à Caracas, la Terre tourne modérément rond, cet événement a lieu le dernier mercredi.

Le départ, en ce mois d’avril 2012, est donné Plaza La Castellana, à côté du MacDo géant. À 19h00. À l’heure où circulation automobile et enfer sur Terre sont synonymes dans cette ville.

Et ce mois-ci, les organisateurs, de vrais coussins péteurs, ont proposé une thématique.

Petite tenue et en couleurs.

À 18h30, bikinis, slibards, boxers, culottes, strings et marcels viennent remplacer les tenues civiles. Quelques téméraires paires de nénés et une audacieuse zézette font leur apparition à quelques minutes du départ.

Voir une paire de nichons et une quéquette, en plein quartier bourge de Caracas, à 19h00, ça fait un choc.

Tous ces corps. Des poils. Des bras tout secs. Des grosses cuisses. Des petites bedaines de trentenaires. Des sacs d’os. Des vergétures. Des seins en poire et une bite à l’air.

Un vrai carnaval. Des gens. Des vrais. Pas une seule couv’ photoshopée. Tout le monde vient comme il est.

Pour la couleur, des petits pots de peinture acrylique, lavable à l’eau, font leur apparition. Tout le monde y va de son slogan, de son dessin, de sa bêtise.

Il y a aussi des masques et des chapeaux.

Il y a des sourires. Sur toutes les gueules.

Pas une protestation. Mais une célébration.

U-Lee sourit moins. Une fois n’est pas coutume mais ça devient une habitude quand même, son vélo est HS. Fin de mois oblige, pas une tune en poche. Alors la réparation attendra. Là, elle peinturlure le visage de Marilou. L’idée originale était de faire un lapin. Mais après deux coups de pinceau, c’est Guy Fawkes, la gueule d’Anonymous, qui vient à l’esprit.

We do not forget. We do not forgive. We are Legion. Expect Us.

Ainsi grimée, Marilou y va de sa confession.

J’ai retiré ma culotte.

Une blague potache un peu féministe. Très bicimamis. Bonnasses à vélo.

We do not have panties. Expect Us.

Pour faire sourire U-Lee, pour de vrai, il y a une solution: l’emmener. L’installer sur le cadre, sans coussin, donc sans confort, et l’embarquer dans cette virée de cent cinquante cyclistes.

Une putain de banane. C’est la première chose qui vient à l’esprit en voyant son nouveau sourire.

La Masse Critique s’engage sur les voies de circulation. Et, cents mètres plus loin, devient la circulation.

À bord du VTT-duo-occasionnel. Les genoux cognent le popotin de U-Lee à chaque coup de pédale. La demoiselle tend ses jambes pour éviter de se faire cogner le mollet par une Timberland. La trajectoire est parfois… aléatoire.

L’embarcation est précaire. Mais fonctionne. Et fait marrer beaucoup de monde.

Sur la première partie du trajet, la Masse Critique se cale. Ceux qui organsient organisent, les autres gueulent des slogans à tue-tête et se marrent.

No llevo pantaleta. Y monto en bicicleta.

Des slogans, U-Lee en a mille. Promotion de la pratique du vélo en milieu urbain, invitation à la prudence et à la prise en considération par les autres usagers des vélos… Des messages importants en adéquation totale avec l’événement. Scandés, relayés par mégaphone, ces phrases sont formidables.

Mais celui-là, largement utilisé par Marilou qui s’égosille à tous les carrefours, reste le Numéro Un.

Je ne porte pas de culotte. Et je fais de la bicyclette.

À tous les carrefourts, sur tous les boulevards, devant les arrêts de bus, aux passages piéton: Numéro Un.

Sourires environnants systématiques.

Au bout de deux kilomètres, une info, un détail presque, circule au sein de la Masse. La destination, guère limpide au départ.

Plaza Bolivar.

Oui mais laquelle? Il y en a mille, à Caracas, des Plaza Bolivar. Le mec est un héros. La moitié des fontaines de la ville portent son nom.

D’après les informations de Google Maps, il s’agit de celle qui se trouve à un bon neuf kilomètres. À l’Ouest de la ville, après l’Avenida de las Fuerzas Armadas. Bien après.

Et neuf bornes avec un cul de vénézuelienne calé sur son cadre de vélo, ce n’est plus une masse critique mais bien un tour de force. Parce que le lascar qui a pensé le trajet ne pouvait absolument pas prévoir qu’un duo improvisé s’improviserait.

ImpossibLe d’en vouloir au mec. Mais, de temps en temps, Putain de sa race est une expression qui fait du bien. Surtout sur les faux-plats.

Une formulation bien hasardeuse, ce faux-plat.

Au fil des kilomètres, blagues et soutien psychologique fusent.

Hey! Bicitaxi, bicitaxi! Dale chámooo…

Transport de personnes avec véhicule à pédales. Très joli surnom.

À mi-chemin, le souffle n’est plus vraiment chaud. Il brûle gorge et langue. La sueur ne régule plus la température du corps. Elle pique les yeux à en perdre la vue. U-Lee, qui a fait tomber son haut quelques kilomètres en amont et beugle en soutifs, Petite tenue et en couleurs, a la délicatesse d’éponger régulièrement la sueur avec ledit vêtement.

Certaines côtes imposeront le pied-à-terre.

Putain de sa race.

L’arrivée, peu avant vingt-et-une heures, sur la maudite Plaza Bolivar se fait en fanfare. La même que les neufs kilomètres précédents. Des cris, des sonnettes, des siflements, des slogans.

Arrêt de la Masse. Des journaleux ont suivi la ballade, font leur petite interview et relaient l’info moins de deux heures plus.

U-Lee boîte un peu, la jambe légèrement ankylosée, mais surivt.

Une demi-gorgée d’eau et un vomi plus tard. Retour en solo. Arrivée en lambeaux.

Chocolat, eau fraîche, douche chaude, traitement de texte, dodo.

Pas une protestation.


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