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Chère France

Publié le 03 mai 2012 par Ladrevert

J’espère que tu me pardonneras cette familiarité, mais comme nous sommes à une époque sans style, et que je n’ose m’adresser au peuple, je me tourne vers toi – car si l’on est tous le con de quelqu’un, on ne fait jamais parti du peuple d’autrui dans le cœur de certains.

Je pensais me confesser dans l’intimité de mon blog (oui je sais c’est paradoxal comme tout le monde peut le lire) et boucler sur un dernier article sérieux, avec des références d’économistes, de sociologues sur le côté irrationnel des élections, un retour sur les derniers journaux satiriques et utopistes défaitistes… mais l’article aurait été d’un chiant d’une part, et en alignant trop de sujets je m’assurais que plus personne ne le lise. A l’époque d’internet et du tout connecté, notre faculté d’attention s’est fortement limitée. Ma lettre a d’ailleurs quelques chose de désuet, mais je trouvais le tweet sans âme.

Je pourrais essayer d’argumenter, mais les neuroscientifiques ont montré que nous faisons des choix pour des raisons émotionnelles… quant au soit disant esprit scientifique, les gens confondent dogme, axiome, fait, raisonnement… le corollaire c’est que je serais idiot de me compliquer la tâche, et que je me tire une balle dans le pied si la lecture de cet article nécessite un dictionnaire. Aïe !

Alors pourquoi cette lettre chère France ? je crois que je suis vieille école, je me suis nourri de toute notre histoire et culture, comme les romantiques quand j’étais jeune j’étais idiot, croyant à la vertu des femmes comme aux épitaphes des cimetières. Je pense avoir un devoir d’héritage, on se flagelle beaucoup sur notre passé à tel point point que nous ne voyons plus la formidable chance d’être de ce pays. Quant aux traditions, je pense que c’est l’esprit qui est important, c’est à dire notre panache et notre superbe !

Enfin voilà, ce que Le Rouge fantasmait en 1880 dans la conspiration des milliardaires,  Huxley dans son retour au meilleur des mondes analysait du futur dans les années 1950, dans lequel nous sommes, il n’y a rien de bien surprenant. Alors ce qui a changé : de magnifiques outils de communication, mais pas de message, pas d’utopie. Des analystes qui expliquent brillamment les enjeux à l’ère de la société mondialisée, accouchée de la seconde guerre mondiale, pourtant ce temps est passé. Quand les historiens du futur se pencheront sur notre époque ils chercheront la cause d’autant de passions pour autant de rien.

En ce moment se termine des élections présidentielles. C’est un système politique oligarchique qu’on tente de faire passer pour démocratique. En même temps à force d’infantiliser le “peuple” et de le déresponsabiliser, d’aucuns pensent que le théâtre de marionnettes d’un débat télévisé qui ressemble à un reality show et de mettre un bulletin entre 2 candidats qui pensent la même chose sur tous les sujets importants, c’est cela la démocratie. Il y a peut être même des personnes qui pensent que nous avons affaire à un choix.

On parle aussi beaucoup de respect et de considérer tout le peuple français, et en même temps les élections sont vécues comme un combat contre 11 – 17  – 50% de traitres. Tout le monde étant le traitre de tout le monde. Le point Goldwin est également souvent franchi, à savoir, que très rapidement tout le monde se traite de fasciste, de nazi, ou de pétainiste, parfois cela est mixé avec des termes qui ne veulent pas dire la même chose comme capitaliste, sans qu’en fait ce soit très clair dans l’esprit des gens ce que cela veut dire, ce qui est sûr c’est que les partisans de l’empire du bien sont là pour nous sauver, et qu’au nom du respect, de la liberté d’expression, si on ne pense pas comme l’empire du bien on est un fasciste, CQFD. En attendant une autre forme d’empire rigole bien, on ne remet pas en cause le système qui coule. On n’en parle pas.

Et certains paranoïaques adeptes de la théorie du complot pensent même qu’en plus de nous faire enfumés par les lobbys de castes ayant des intérêts financiers communs (pas besoin de complot pour pour cela en fait), il se pourrait qu’on facilite l’apparition de guerres dans certains pays moins développés où l’on pourrait lorgner sur des matières premières ou intérêts géopolitiques (un autre gros mot)… et que les instabilités engendrées permettraient d’accepter la restriction de libertés durement gagnées et la délégation du pouvoir vers des super structures sans visages et sans âme.

En fait le monde se complexifie, on ne sait plus bien ce que veulent dire les mots, c’est déjà arrivé il n’ya pas si longtemps, où certains ont joué avec les symboles à une époque en perte de repères, et où la corruption semblait fortement présente, sauf qu’on a vu ce que cela a donné les remèdes… alors on continue de mettre les gens dans des petites cases qui ne veulent pas dire grand chose, et surtout on s’arrête aux étiquettes.

Peut être que le monde a évolué, et que désormais il faut inventer de nouvelles solutions au lieu d’essayer de revendre d’anciennes qui ne marchent pas. Accepter la diversité et la complexité de notre monde, et réaffirmer fortement certaines valeurs. Peut-être cela n’a t il jamais été  un problème d’idée. Les neuroscientifiques ont montré que les gens disent ne pas vouloir électrocuter quelqu’un contre de l’argent mais qu’ils le font (mise à jour de l’expérience de Milgram). En fait si nous nous mentons à nous mêmes, il ne faut pas fantasmer une société idéale et se balancer des idées à la figure, mais peut être réfléchir grâce à l’introspection que nous avons fait sur nous mêmes, quelles structures mettre en place, pour nous garantir contre nos propres faiblesses.

Tu seras sans doute surprise chère France, mais nos chers présidentiables sortent leur calculette pour faire leurs comptes d’apothicaires. Visiblement le pays est au bord du gouffre, et on s’empoigne à coup de calculette. Surtout qu’en fait ce sera de la responsabilité du gouvernement qui est élu un peu plus tard, pas du président… enfin nous avons oublié les passagers du Massilia comme tant d’autres, et on a oublié que dans une autre république, chère France, Clémeanceau avait instauré un jeu dont il fut plus tard le dindon de la farce : quand on vote, on vote pour le plus con. On a vu ce que cela a donné lors de la dernière grande guerre pour gérer une crise.

Le paradigme politique du XXème siècle était un combat réactionnaire vs progressiste qui se déclinait dans les pays dans un combat droite – gauche (à inverser selon les pays). Aujourd’hui, le combat est entre les corporations, superstructures sans visages souhaitant toujours plus de contrôle, vs les individus, et donc les libertés.

Chère France, je suis triste de voir autant de passions, alors que titrait un journal avant même le résultat de ces élections : “La déception“. Nous sommes à ce point névrosé que certains pensent voter pour le plus mauvais candidat pour précipiter la chute.

Bref, nous avons la chance d’avoir un riche héritage et de vivre une époque formidable à bien des points de vue. Chacun a accès à un savoir inouï, et des solutions sont sans doutes sous nos yeux. J’espère que les meilleurs d’entre nous réussiront à insuffler cette flamme, cette nouvelle utopie, qui nécessitera l’implication de tous, et pas une fois tous les 5 ans. Aujourd’hui, dans les idées qui tournent, on voit le grand retour du hasard avec le tirage au sort, je trouve que cela ne manque pas de panache.

Pour ma part chère France, je ne serai pas très disponible en ce jour d’élection. J’ai repris des études le week end. Je suis heureux d’avoir cette opportunité, et de prendre ma vie en main pour que celle ci ait un sens, que je sache pourquoi je me lève. J’espère également pouvoir faire le bien à mon échelle sans me torturer du faible impact que je puis avoir sur le flux des évènements.

Merci d’avoir pris le temps de m’écouter, parait-il qu’écrire ses émotions est un excellent exercice, parfois cela fait du bien de partager avec quelqu’un.

Vive toi.



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