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TF1: trop lisse pour une Ferrari

Publié le 04 juin 2012 par Davidme

TF1: trop lisse pour une Ferrari
Il y a des mariages qui s'ils sont attendus et souhaités sont forcément voués à l'échec. C'était le cas du mariage entre Laurence Ferrari et TF1, il y a quatre ans. La semaine dernière sur fond d'audiences en baisse, de campagne présidentielle ratée puisque TF1 a été pour la première fois devancée par France 2, et de rumeurs faisant état de son limogeage possible, Laurence Ferrari qui présentait le 20H depuis quatre ans a finalement annoncé son départ. Un départ inéluctable finalement tant les deux parties n'étaient pas faîtes pour s'entendre.
En effet, lorsqu'elle a remplacé PPDA en 2008, Laurence Ferrari était présentatrice de Dimanche+ sur Canal+, elle était reconnue pour sa connaissance des sujets et pour sa pugnacité dans l'interview. Une pugnacité qui avait d'ailleurs été à l'origine de son recrutement par Canal+. Souvenez-vous. En 2006, Laurence Ferrari alors dans sa première vie à TF1, joker dans les journaux du week-end, réalise une interview très remarquée de Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, que la journaliste bouscule et qualifie d'office de "candidat à la présidence de la République". A cette époque, elle est aussi co-actionnaire d'une boîte de production - Story Box Press - qui produit certains documentaires, profondément journalistiques, qui mêlent enquêtes et reportages. Bref, à cette époque, Laurence Ferrari est recherchée et chassée par TF1 pour ses qualités de journaliste; et aussi pour son côté atypique de people-journaliste à la tête bien remplie.
D'ailleurs, lorsqu'elle arrive à TF1 en 2008, lors des longues interviews promotionnelles dans toute la presse, Laurence Ferrari explique qu'elle veut modifier le journal le rendre plus dense avec moins de sujets qui seraient plus développés. Elle veut mieux hierarchiser le journal et elle espère même imposer une "enquête de fond" chaque jour. Non, nous ne parlons pas là de l'actuel JT de Pujadas sur France 2 ou du JT que Catherine Nayl, directrice de l'info de TF1, entend mettre à l'antenne l'an prochain, mais bel et bien du JT que Laurence Ferrari espérait faire en 2008 et que quatre ans après elle n'a pas pu faire.
TF1: trop lisse pour une Ferrari
Dans cet échec, il y a forcément une part personnelle (j'en ai moi-même parlé ici). Des échos au sein de la rédaction témoignent d'une intégration qui ne s'est jamais vraiment faite, mais d'autres assurent le contraire. Il y a aussi des choix douteux comme par exemple l'interview d'Ahmadinejad, le président iranien, où Laurence Ferrari est apparue voilée. Mais il y a aussi et surtout le moule TF1. Cette chape de plomb tellement forte et imposante qu'elle pourrait même transformer Edwy Plenel en journaliste lisse. Car c'est bien aussi de cela dont il s'agit. TF1 est aussi une machine à lisser les aspérités. Ainsi, Laurence Ferrari qui portait des robes sexy et des blousons de cuirs sur Canal+ a été contrainte de s'habiller comme une ménagère surtout pas sexy pour ne pas perturber l'auguste téléspectateurs de TF1. Pis, elle a dû remiser les sujets d'enquêtes de fond pour des enquêtes de "vie" sur le beau temps, les piqûres de guêpe ou que sais-je encore.
Finalement, TF1 est la quintessence de la chaîne lisse qui doit plaire au plus grand nombre. Pour être lisse, il ne faut pas déranger, il ne faut pas changer les habitudes. C'est aussi cela qui a perdu Laurence Ferrari et avec elle toute l'info de TF1. De nombreux témoignages soulignent que jamais la direction de l'information de TF1 n'a vraiment donné les moyens à Laurence Ferrari de changer -un peu- la formule du journal. Les torts sont peut-être partagés, mais signe des temps, Anne-Sophie Lapix qui démontre sur Dimanche+ (encore) un talent extra d'intervieweuse a déclaré qu'elle n'était pas candidate à la succession de Laurence Ferrari... Comme si l'échec de Ferrari était bien plus que l'échec d'une personne. L'échec d'une maison, TF1, qui va devoir totalement se réinventer. Laurence Ferrari, elle, est en partance pour la nouvelle chaîne du groupe Canal+, Direct8. En partie pour retrouver des aspérités et une liberté totale.


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