Magazine Animaux

Ours en Bigorre : Traitons les causes du problème plutôt que ses conséquences !

Par Baudouindementen @BuvetteAlpages

Communiqué commun Pays de l'Ours-ADET/FERUS, le 4 juin 2012
Depuis quelques semaines, un ours (probablement Cannellito, dernier ourson de la célèbre ourse Cannelle) défraie la chronique en Bigorre (Hautes-Pyrénées): il a tué quelques dizaines de brebis.
A chaque incursion d’un ours dans ces vallées le même scénario se reproduit. Aucune leçon n’ayant été tirée des expériences précédentes, les mêmes causes produisent les mêmes effets …
Le podium des dégâts depuis 20 ans en France est en effet détenu par les Hautes-Pyrénées :

  • Franska, lâchée en 2006 à Bagnères de Bigorre, en 2007 : 127 bêtes ;
  • Papillon, l’emblématique ours béarnais, en 2004 : 70 brebis tuées ;
  • Néré, en transit des Pyrénées Centrales vers le Béarn en 2000 : 65 brebis tuées.

Pourtant, aucun de ces ours ne posaient et/ou ne posent de problème ailleurs :

  • Franska, sans problème en Slovénie, a été jugée normale par des experts internationaux ;
  • Papillon a toute sa (longue) vie durant été un ours tranquille ;
  • Néré, inconnu des services en Pyrénées Centrales ne pose aucun problème en Béarn ;
  • Et Cannellito n’est pas plus prédateur que les autres quand il séjourne en Béarn.

Utilisation de l'appellation d'origine controlée Barèges Gavarnie contre l'Ours

Rien ne permet donc de classer ces ours dans la catégorie « ours à problème » du protocole prévu pour gérer les comportements atypiques.
Il est dès lors clair que l’explication de ces situations ne provient pas des ours, mais du choix des éleveurs locaux de laisser leurs troupeaux sans gardiennage ni protection.
L’ours brun est un animal opportuniste qui profite de toute source potentielle de nourriture à sa portée. Toutefois, il est possible de le dissuader d’attaquer les troupeaux et de maintenir les dégâts dans des mesures raisonnables via l’embauche de bergers et l’utilisation de chiens de protection, mesures en grande partie financées par l’Etat.
C’est ainsi que cela se passe en Pyrénées Centrales et en Béarn (et partout ailleurs en Europe …), et c’est ainsi et seulement ainsi que l’on règlera le problème en Bigorre également.
Nous avions prévenus lors des crises précédentes que cela se reproduirait dès qu’un ours réapparaîtrait dans le secteur si l’on ne réglait pas les problèmes de gestion et de protection des troupeaux. Malheureusement, nous avions raison.
Nous le répétons donc : appliquer le protocole « ours à problème » sur un ours dont le comportement est normal ne sert à rien. L’effaroucher, le capturer, l’équiper d’un émetteur comme certains le préconisent ne résoudra pas le problème de fond à l’origine de son comportement.
Comme par le passé, les dégâts ne cesseront que quand l’ours aura quitté la vallée, et la même situation se reproduira, indéfiniment, dès qu’un ours reviendra, tant que l’on n’aura pas modifié des pratiques de gestion des troupeaux inadaptées.
Nous appelons le Gouvernement à ne pas céder aux demandes excessives et non justifiées d’intervention sur cet ours et à s’attaquer enfin aux vrais problèmes de l’élevage pyrénéen, dont l’ours n’est pas la cause, mais seulement le révélateur. 

Plus que poser des problèmes, cet ours pose les questions auxquelles il faudra bien répondre un jour !
Pays de l'ours - Adet / Ferus

Lire aussi

  • Utilisation de l'appellation d'origine controlée Barèges Gavarnie contre l'Ours
  • AOC Barèges-Gavarnie : une imposture ou une belle aventure ?

Extrait : Gérard Bozzolo à propos des pratiques de l'AOC Barèges-Gavarnie en pays Toy.

Gérard Bozzolo, une des plumes régulières de la Buvette des Alpages, est enseignant en Zootechnie à la retraite à l'ENSAT Castanet-Tolosan (31). 
Il est aussi l'auteur de "Appellations d'origine contrôlée et productions animales" (Editions Tec & Doc Lavoisier).

(...) Dans la partie relative aux conditions techniques de production (NDLB: du décret de l'AOC Barèges-Gavarnie) du système d’élevage, l’assertion de la conduite d’élevage en liberté durant l’estive, justifiant la qualité de la viande produite, résulte d’un fait d’opportunisme. Il entérine la facilité prise par les éleveurs de laisser leurs troupeaux sans surveillance étroite et régulière. En particulier, les moutons ne mangent pas habituellement la nuit, par contre, tirent avantage d’une forte activité de pâturage à la tombée de la nuit et tôt, au lever du soleil, lorsque les conditions météo sont propices et que la rosée n’est pas très abondante.
Or, cette mise en vacances des animaux sur les parcours d’altitude correspond à un laisser aller préjudiciable à la qualité fourragère des estives et constitue, aussi, un risque face aux pertes accidentelles, sanitaires et à la prédation.
L’origine du décor patrimonial dans les AOC repose souvent, dans sa dimension historique, sur un fond de chanson de geste que la connivence admet sans trop d’exigence de véracité pointilleuse au titre d’une certaine expression du folklore territorial. Dès lors que cet ingrédient se transforme en prérecquis incontournable dans la pratique d’élevage, le bon usage loyal et constant devient une épine conflictuelle qui oppose des divergences d’intérêts. C’est le cas de la cohabitation avec une espèce sauvage emblématique en danger sévère d’extinction : l’Ours des Pyrénées.
Le succès d’une AOC ne peut pas se bâtir sur l’éradication d’une telle espèce associée à la notoriété pyrénéenne, d’autant que techniquement, le libre pâturage et le non regroupement nocturne des moutons laissés sans surveillance, peuvent être sévèrement critiqués.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Baudouindementen 13860 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte