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Jour 22. sous les auspices de l’opus 35.

Par Pantsavarts

« Jouer de ce violon plein de cendres, jouer avec les oiseaux sur la crête, jouer avec Sara comme avec toi Carl, jouer pour ne pas rêver, oui jouer, ne pas rêver pour ne pas aimer, oui jouer, ne pas aimer pour ne pas souffrir, oui jouer, et se perdre, encore »

Je ne vis que d’écho, en écho, ces échos. Et je ne suis qu’écho d’ailleurs là ou souvent, je m’envole avec mes mots, et je reviens avec les tiens Anatoly . Je m’approche de nos limites, oui. Je m’approche car c’est proxémie, c’est là c’est ici c’était toi, c’était moi, et là c’est Jeu, un Je pluriel, voilà Jeu c’est Je pluriel, c’est le jet du dé, c’est le lancer, c’est le retomber, le mouvement. C’est le rebond. Et qui colle là qui colle aux doigts, au  je dois ou je choisis, je dois ou je dois ou… Mais alors choisis le choisis !

« Et si tu vois bien, mes bouts de doigts sont bleus alors où s’abreuvent comme tu le dis nos limites, qui tiendra le col et moi la corde et qui restera alors pour chanter l’ode si trop s’en va d’ancien et qu’alors rien de neuf ne se pose sur le violon de mon coeur. »

Si tu laisses aller ce violon, jusqu’au bout de la tension sur une fin de note bleue , un scherzo, juste. Si tu t’abreuves comme tu le dis de tes limites en bleu, celle du Jeu, comme si énergie est dans ces limites, comme si plonger, transforme tout, transporte tout, transfère les émotions au dedans comme au dehors ou si l’inverse n’est pas encore plus intensément bleu, si l’inverse intensifie encore cette harmonique. si d’avancer sur la note que tu poses, l’ode à la fin, l’ode a faim et se rapproche. Mais jusqu’où aller, jusqu’où ?

« Et sous la nouvelle étoile que fait le bruit du violon quand on s’en pince des cordes raidies sous le froid du désert ? »

J’entends moi le bruit du violon tu vois, le concerto pour violon en D majeur, l’opus 35 de Tchaikovsky. Comme des ailes ouvertes dans le désert, comme si chaque note laissait planer quelques grains de sables dans une lumière saturée. Comme si sous cette nouvelle étoile la nuit prenait feu, si la lune jaillissait de toutes les ombres, si elle oui elle nous approchait de  ses lèvres. Comme si. Et si je suis avec toi, là t’ouvrant quelques portes, laissant entrebâiller les possibles, dans un antre sommeil qui n’est pas lui, mais qui peut être là sous cette nouvelle étoile comme tu la vois, juste comme.

« La mort est rose et la vie est douceâtre/ les violons sur la paume plutôt les cordes et le vin plutôt que les palmes seules/ la vie dans l’eau et le combat de trop/ un/ deux / trois/ c’est ça ferme les yeux je n’y crois pas/ non ne plus croître après tout on ne croit plus rien »

Et toutes ces croyances qui éclatent quand tu parles de la mort rose, car tu laisses le vin mouiller les cordes et cela gâche un peu ton jeu. Laisse le vin à sa place, dans la coupe à tes lèvres, laisse le vin se faire partage comme la musique. Partage de l’eau, de la vie, partage de l’intention qui mène plus loin toujours, un, deux, trois, plus loin encore.

« Je ne sais plus dormir mais plus calmer mes peines non plus ni savourer l’amertume du chêne ni prendre en bouchon le liège pour fermer la bouche et ne plus affronter les mots ni laisser le violon prendre son temps ni ne plus arrêter mes doigts je ne sais plus mais je le rêve »

Tu ne sais plus dormir Anatoly, mais tu dors, tu dors et tu rêve, quand tu fermes les yeux, que ta respiration se calme, se fait plus profonde, c’est calmer tes peines, c’est savourer ce qui est bon. tu vois le rêve déjà, tu es dedans, comme dans un salon immense où chacun peut avoir sa place, son espace, intime dans un extime. Un temps présent, cadeau, espacé par ce qu’il veut pour s’espacer.

« quand le soleil te fait plisser les yeux c’est l’ombre qui se cache devant tes pupilles, quand le soleil au goût de la lune s’enflamme c’est pour brûler les traces de nos mausolées »

Et tu reprend ce voyage avec mes mots, oui se laisser plisser les yeux, déjà les fermer, les ouvrir à la danse sur la face interne des paupières. laisser aussi le goût changer, comme si une impression neuve peut tout changer et que là tu peux avoir le goût de la lune dans ta bouche ou dans ton coeur.

Je te laisse terminer Anatoly. Car tout dans tes mots, tes impressions, tes regards, tout est voyage. tout s’écarte pour te laisser passer. Et se resserre pour te garder.

« J’ai fait un voyage au long pays de brume, seul au matin les couleurs de la fortune, aux gris de graisses cuites à coté des cuisines et le chant des oiseaux joyeux au matin. J’ai fait un voyage sans mon violon. Dans les bras de ma mère comme dans le silence, les chemins de terre à la calme confiance. C’est ici notre Mère. « 

Dans les bras, de ta mère, c’est ainsi. vis le encore plus intensément, autant que tu le veux. Et qui sait peut être plus encore.

« Fuis au fond des sources, fuir au fond des terres pour éviter la ville, pour éviter la ville et ses décombres, et ses morts innocents, fuir au fond des forêts où je pourrai composer et comprendre, ou comprendre et composer, et laisser le violon jaillir comme l’aube »

« Jouer de ce violon plein de cendres, jouer avec les oiseaux sur la crête, jouer avec Sara comme avec toi Carl, jouer pour ne pas rêver, oui jouer, ne pas rêver pour ne pas aimer, oui jouer, ne pas aimer pour ne pas souffrir, oui jouer, et se perdre, encore »

Jouer c’est ainsi que tout commence là où aussi ça finit.

Et je vais laisser Anatoly avoir le dernier mot. C’est avec les mots suivants qu’il est parti.

“Il est encore venu mettre ses pas au fond du silence accompagner la danse regardez mieux le ciel s’affranchir des rumeurs comme des humeurs peut être finir en transe

Elle est encore aimée elle ne sait pas qu’au fond de la science se torturer tue la cadence pour encore suivre l’étape de la chair en principal elle ne laissera aucune issue le sexe n’est qu’un hommage à la chair si l’amour est un nom mage contre la perte

J’ai tenu des violons sur Vérone sur Prague et j’ai balancé des crédences dans la Volga mais ce n’est plus un jeu c’est le vent qui pousse le temps vers la tempête orage sur le fleuve avant le grand incendie tu parlais d’une petite fille à la robe de sang tu en parlais mais je la connais elle est gravée sur mes mains qui glissent sur les cordes un document aux réfugiés qui continuent le chemin sans le connaître et sans le voir oui tant que le vent qui nous pousse est dans nos têtes il n’y a plus de place pour la raison

J’ai tenu des violons en pure perte mes mains étaient trop contractées pour en jouer voilà tu le sais Carl mon jeu n’est qu’une parade à la fragilité qu’une parade à la mauvaiseté du monde et de l’homme son chien”

Anatoly Tchervenko

Jour 22. sous les auspices de l’opus 35.


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