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Réciprocité ne veut pas dire protectionnisme : le chemin est encore long…

Publié le 19 juin 2012 par Jblully

 Réciprocité ne veut pas dire protectionnisme - © Anton Balazh - Fotolia.comLa Commission européenne menace deux grands équipementiers chinois du secteur des télécommunications – ZTE et Huawei – de sanctions commerciales (Voir Les Échos, 1er juin 2012). Elle prend ainsi la mesure des pratiques déloyales (dumping, subventions massives d’État…) qui affectent les échanges commerciaux. Si la perspective de rétorsions reste à confirmer – les États-membres doivent, en effet, se mettre d’accord dans les semaines qui viennent – elle sera un signal fort tant les groupes européens des télécommunications souffrent aujourd’hui de la concurrence non loyale de certains opérateurs émergents.

Surtout, les institutions européennes sont, désormais, plus sensibles au vœu de réciprocité exprimé, de façon croissante, par les opérateurs économiques et les décideurs politiques des États-membres. Une première bataille a été gagnée : le terme « réciprocité » n’est plus un « gros mot » ; mais une seconde reste à mener : faire en sorte que ce terme ne soit plus assimilé à du protectionnisme par plusieurs pays européens. On le voit avec le projet de texte du Commissaire Barnier sur les marchés publics internationaux où les avancées sont loin d’être acquises. Dès lors, il est plus facile de parler de loyauté, d’équité ou de « fair trade ».

C’est dire combien il est important de convaincre nos partenaires européens – entreprises comme politiques – les plus réticents de l’aptitude d’une approche réciproque à rétablir des conditions de concurrence loyale. Aujourd’hui, les industriels européens soumis à des pressions de la part de leurs partenaires commerciaux perdent deux fois :

- une fois sur les marchés émergents dont ils sont exclus de par l’insécurité juridique et l’opacité qui entourent les règles des marchés publics ou de propriété intellectuelle par exemple ; selon la Chambre de commerce européenne en Chine, un cinquième des entreprises implantées dans ce pays souhaitent en partir compte tenu du contexte économique actuel mais aussi pour des raisons liées aux difficultés d’accès au marché ;

- une seconde sur le marché européen au sein duquel ils font l’objet de pratiques de dumping ou de concurrence très forte d’opérateurs qui bénéficient d’aides d’État mirifiques ; c’est la situation que connaît le secteur des télécommunications, suédois notamment, à tel point que ces sanctions arriveront peut être trop tard. C’est aussi celle que rencontrent, d’ores et déjà, d’autres secteurs (éolien, photovoltaïque) où les entreprises, allemandes par exemple, sont déjà fortement touchées par la concurrence de « champions nationaux » des pays émergents fraîchement émoulus grâce aux soutiens financiers des autorités chinoises.

Au demeurant, le fait que l’UE réagisse sur ce dossier – ce qu’elle fait d’ailleurs via les instruments anti-dumping depuis longtemps – montre que l’application de la réciprocité dans les échanges internationaux ne passe pas par la construction d’un nouvel arsenal juridique. Loin s’en faut. Les outils existent et il convient de les utiliser pour explorer jusqu’au bout la logique juridique. Il convient aussi d’associer le plus grand nombre d’acteurs possible : États et entreprises. Enfin, il faut probablement davantage s’inspirer des pratiques normatives telles que le Règlement européen Reach dans l’industrie chimique qui instaure un haut niveau de règles en matière environnementale et de sécurité des produits et qui s’impose aux partenaires étrangers dès lors qu’ils exportent sur le territoire européen.

S’engager sur d’autres normes, d’autres référentiels comme la responsabilité sociale et environnementale (RSE) peut être un nouvel axe pour se défendre des distorsions de concurrence dans le monde. Certains groupes mondiaux en ont déjà compris l’intérêt et empruntent, d’ores et déjà, cette voie…


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