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Restructuration de PSA : qui sont les coupables?

Publié le 13 juillet 2012 par Copeau @Contrepoints

PSA a commis de lourdes erreurs stratégiques, expliquant sa situation. Mais il est surtout victime des politiques économiques, des syndicats ou encore du coût du travail. Ce sont des vies humaines qui sont en jeu. Politiques, syndicalistes, il serait temps d'abandonner l'idéologie, et de penser à l'être humain. 

Par Vladimir Vodarevski.

Restructuration de PSA : qui sont les coupables?
Les politiciens et  responsables syndicaux font assaut d'indignation face au plan de restructuration de Peugeot - Citroën. L'expression "crime social" a ainsi été employée. La SA Peugeot - Citroën apparaît comme un fossoyeur de l'emploi. Cependant, toutes ces déclarations manifestement excessives et théâtrales apparaissent comme une composante d'un plan de communication. L'idée est de montrer que le gouvernement se mobilise pour l'emploi. Que ce sont les entreprises, par leur comportement, qui sont fautives. Et que le gouvernement essaie vaille que vaille de préserver l'emploi, malgré ces mauvais comportements.

Le gouvernement est d'autant plus véhément qu'il paraît totalement impuissant. De même pour l'opposition. Ces suppressions d'emplois interviennent malgré la politique économique menée depuis des années, par les différents gouvernements qui se sont succédés, sans grande différence entre la droite et la gauche. De même pour la politique menée par les syndicats. Même si Peugeot - Citroën a certes sans doute commis des erreurs stratégiques, ce plan de restructuration est aussi une illustration de l'échec de la politique économique menée par la France, et soutenue par la classe politique et les syndicats.

Sous la présidence de Jean-Martin Folz, le groupe Peugeot - Citroën visait un objectif de 4 millions d'automobiles vendues. Il a accru ses capacités en Europe. Ce qui est apparu comme une erreur.

D'autre part, la structure familiale du groupe l'a également handicapé. La famille Peugeot a toujours voulu maintenir une participation de contrôle dans le groupe. Elle accepte d'être diluée quand les circonstances l'exigent, comme aujourd'hui, comme sous la présidence de Jacques Calvet. Mais elle regagne son niveau de participation, quand le groupe propose des rachats d'actions auxquels elle ne participe pas. La comparaison avec Toyota fait ainsi contraste. La famille fondatrice de Toyota ne possède plus qu'un petit pourcentage d'un groupe qui fait partie des plus importants constructeurs mondiaux d'automobiles. A contrario, le groupe Peugeot - Citroën ne s'est pas autant développé. Il n'a ainsi qu'une part de marché de 3,4% en Chine, alors qu'il fut un des premiers à s'y installer, faute d'investissements. Et c'est seulement aujourd'hui qu'il passe à la vitesse supérieure, en concevant des véhicules spécialement pour les pays émergents, plutôt que de recycler ses vieilles plateformes. Ce qui est présenté comme une qualité, être un groupe familial, ne l'est pas forcément.

Cependant, Peugeot - Citroën est aussi victime de la politique économique. Ainsi, le groupe a pu penser pouvoir augmenter ses capacités quand le marché européen était porteur. Mais, le marché était porteur car la BCE avait une politique monétaire très accommodante. Peugeot - Citroën a notamment profité de la croissance en Espagne, provoquée par les taux bas de la BCE, et les crédits à la construction des caisses d'épargne régionale d'Espagne, qui ont entraîné une croissance économique, et des ventes de voitures. Ceci est un bel exemple de mal investissement provoqué par une politique d'expansion monétaire, tel que cela est décrit par les économistes du courant autrichien.

Le groupe Peugeot - Citroën peut aussi s'estimer victime des coûts du travail en France. La gauche a instauré les 35h, et démantèle aujourd'hui la loi TEPA, qui était une usine à gaz, mais qui avait au moins le mérite de redonner de la valeur au travail salarié, en supprimant les charges sur les heures supplémentaires. Les 35h ont à la fois augmenté le coût du travail, et augmenté l'intensité du travail pour les salariés. L'Allemagne avait ouvert la voie, mais de façon plus flexible. Et, dès que les effets néfastes sont apparus, les Allemands ont rectifié le tir, organisant une stagnation, et même une baisse des salaires. Rien de tel en France.

Les syndicats sont aussi responsables, refusant le pragmatisme économique allemand, au profit de l'idéologie, provoquant une augmentation du coût du travail finalement néfaste à l'emploi.

Aujourd'hui, le gouvernement semble enfin conscient du problème du coût du travail. Mais, au lieu de diminuer la dépense, comme en Allemagne, il cherche à la reporter sur d'autres. Les entreprises paieront peut-être moins de charges, mais le consommateur en paiera plus.

Le seul fait qu'un plan de 8 000 suppressions d'emplois dans un pays de plus de 60 millions d'habitants déclenche autant de réactions montre le désarroi des politiciens et des syndicats. L'État fait beaucoup de promesses. Il contrôle plus de 50% de la richesse créée dans le pays chaque année. Et pourtant, cette politique provoque des licenciements. Et pourtant, ces licenciements sont vécus comme un drame ce qui signifie que les licenciés ont peu d'espoir de retrouver un emploi. La politique économique, à base d'expansion monétaire, de déficit, et de réglementations ne serait donc pas favorable à l'emploi ?

Pire, le gouvernement veut une concertation avec Peugeot - Citroën. Alors que l'État est omniprésent dans nos vies le gouvernement veut se reposer sur l'entreprise privée. Un plan de sauvegarde de l'emploi n'est rien d'autre que l'obligation faite à une entreprise de reclasser ses salariés, malgré le poids de l'État dans l'économie.

Il ne reste qu'à espérer que tout cela ne soit que gesticulations. Il serait regrettable d'empêcher Peugeot - Citroën de retrouver des forces. Rappelons que ce groupe privé produit plus en France que le groupe automobile dont l'État français est actionnaire. Qu'il a une stratégie de montée en gamme pour continuer à produire en France, notamment dans les petits véhicules, alors même que Volkswagen ne produit pas la Polo en Allemagne. Un redressement de Peugeot permettrait un redressement industriel en France. L'Etat devrait accompagner ce redressement plutôt que de le fustiger. S'il veut vraiment dépenser de l'argent public en faveur de l'automobile, qu'il finance plutôt la reconversion des salariés de Peugeot - Citroën, ou un accompagnement de quelque nature que ce soit, plutôt que d'entraver le redressement d'une firme pour qui la France reste un centre industriel primordial.

Ce sont des vies humaines qui sont en jeu. Il serait temps d'abandonner l'idéologie, et de penser à l'être humain.

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