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Spider-man 3

Publié le 10 juillet 2012 par Kinopitheque12

Sam Raimi, 2007 (États- Unis)

Spider-man 3

MISE EN PLACE
La première scène, très courte, remet Spider-man à sa place, parce qu’il est personnage de fiction, sur un écran de télévision et fait de Peter Parker son propre spectateur et quasiment son premier fan. Depuis le premier épisode déjà, Sam Raimi s’intéressait à l’homme, voire à l’adolescent, qui incarne Spider-man plus qu’au super-héros. Son intention est la même avec le numéro trois.

La seconde scène présente en un triangle classique les relations qui unissent les personnages et les principaux thèmes choisis pour ce film. Nous sommes au théâtre, Mary-Jane est sur scène et interprète « They say It [love] ‘s wonderful » ; au premier rang, les yeux rivés sur elle, Peter Parker en admiration et fou amoureux ; au balcon, l’ancien ami et nouvel ennemi de Parker, Harry Osborn, qui a également été l’ancien petit ami de M-J et qui ferme le triangle de ses regards portés tantôt sur l’actrice, tantôt sur Parker. L’amour (précisément la difficulté pour un couple de faire face aux épreuves susceptibles de déstabiliser l’équilibre qu’il s’efforce d’instaurer) et l’amitié sont deux des principaux thèmes abordés dans ce nouvel opus des aventures de l’homme-araignée. Les troisième et quatrième scènes décomposent le triangle : Harry Osborn se retrouve seul face au masque du nouveau Bouffon Vert, M-J et PP s’embrassent sous un ciel étoilé dans un hamac-toile d’araignée.

SPIDER-MAN ET JANUS
Le troisième sujet traité est sous-jacent dans la scène du théâtre mais est au centre de la première scène avec Marko Flint (Sandman) apparaissant peu après : « nous avons toujours le choix de faire le bien ». Ce thème touche tout le monde : le futur homme de sable choisit dès le début la criminalité pour arriver à ses fins (soigner sa fille), Harry Osborn lutte avec lui-même pour décider de venger son père de Spider-man ou de pardonner et retrouver son ami, PP lutte avec lui-même pour décider de venger la mort de son oncle ou de pardonner, le nouveau photographe du Daily Bugle (« the other guy » qui n’est autre que la matérialisation du mal que Parker a lui-même semé) sombre dans la vengeance sans se poser d’autres questions… Quand ces luttes ont lieu, elles se voient sur les visages : comme dans le second épisode la moitié du visage de PP est parfois dans l’ombre (avec, attitude ridiculisée, changement de coupe de cheveux assombrissant le visage), et lorsque Harry décide de renoncer à la vengeance, le mal qui l’a possédé laisse des cicatrices sur la moitié de son visage.

ARACHNOPHILIE
Deux ou trois éléments ont fait pour moi tout l’intérêt de Spider-man façon Sam Raimi : la double lecture qui peut être faite de l’histoire, et qui, avec une bonne mise en scène, a donné un goût cinéphilique à ce gros bonbon sucré (respectivement pour les deux premiers épisodes : « l’éjaculation arachnéïde » et « la transfiguration christique », pour reprendre les expressions de Chronic’art, ou plus simplement « de l’adolescence à l’âge adulte » et « la perte de confiance en soi »), la sensation de plaisir et de vertige procurée par les balancements de l’homme araignée entre les gratte-ciels qui va d’ailleurs souvent de pair avec les incroyables scènes d’actions. Heureusement ces ingrédients sont bien présents dans ce nouveau jus d’araignée, même s’il est vrai que la double lecture paraît un peu diluée et que l’efficacité du produit sur nous semble moindre. Nous regrettons un équivalent de la magistrale scène « Doc Oc à l’hôpital » (excellentissime Spider-man 2, 2004), démonstration parfaite de la maîtrise du réalisateur et pur plaisir de spectateur : rien d’équivalent ici. Encore que… Nous irons donc chercher notre plaisir ailleurs.

PLÉTHORE DE BAD GUYS
Sam Raimi décide de s’attaquer à trois thèmes et ceux qui ont suivi ont compté quatre méchants ou quasi méchants (le nouveau Bouffon, l’homme de sable, « the other guy » transformé en Venom, et l’Araignée elle-même devenue mygale noire de latex lorsque le jeune homme qui l’incarne est imbu de lui-même et perd de vue les valeurs qui l’ont fait). Lourd programme. Mais programme tenu, et clairement qui plus est.

QUELQUES CARIES MALGRÉ TOUT, MAIS ÇA SE SOIGNE
Comme un trop plein de sucre ne peut être complètement bon pour la santé, il est évident que le film suspend sur sa toile quelques maladresses. Les deux premiers films en comportaient et les mêmes n’épargnent pas ce troisième volet : Spider-man et le drapeau américain, un public applaudissant et explosant de joie à la vue des exploits du héros, et même ce coup-ci un pompier en premier plan et cadré plein centre ému par le courage de Spidey (la combinaison New York-post 11/09 oblige… nous préférions le discret clin d’œil de l’épisode 1 et l’apparition des deux tours dans un reflet du masque rouge). Ces semblants patriotiques et démagogiques sont cependant tolérables, d’autant plus que le réalisateur les tourne aussi en dérision : la remise des clés de la ville est un passage réellement amusant où Spider-man se met lui-même en scène sous fond de fanfare – avec des gamins trottant partout en costume bleu et rouge – « NY loves Spidey » – et jusqu’au remake du baiser à l’envers, non plus avec M-J comme partenaire mais avec la très concurrente Gwen Stacy (superbe Bryce Dallas Howard, que l’on peut classer aisément parmi les éléments perturbateurs). Certes, d’inutiles explications viennent s’ajouter à ses maladresses : « non Harry, ce n’est pas réellement Spidey qui a tué ton père » (le jeune Osborn ne pouvait-il se rendre compte par lui-même des mauvais choix de son père?), oui c’est une substance venue de l’espace qui rend Peter Parker un peu plus mauvais (PP n’est-il pas suffisamment complexe pour qu’une colère, ou qu’un sentiment de suffisance ne s’empare de lui sans en appeler pour autant aux E.T. ?- voyons-là un résidu du kitch originel du comic book).

MAESTRIA ET FINAL
Sur le plan de la stricte réalisation, quelques autres scènes assurent au film une plus-value qualitative et c’est ici que nous irons chercher le plaisir manquant tout à l’heure : la création de l’homme de sable et ses premiers efforts de transformation motivés par le médaillon de la petite fille est un passage réussi même si entièrement synthétique ; une courte attaque de ce même méchant tournée quasi entièrement caméra à l’épaule ajoute réalisme et mouvement à l’action ; enfin la scène du clocher est une parenthèse néo-gothique très plaisante (Vertigo toujours… Raimi comme Burton avec Batman, 1989, en pleine évocation hitchcockienne).

La toute fin du film est excellente, parfait reflet de la seconde scène évoquée : l’ami retrouvé Harry n’est plus, le couple peut à nouveau exister et M-J ne peut achever la chanson commencée « I’m thru with love » (rappelez-vous Tout le monde dit I love you de Woody Allen). Peter tend alors une main vers M-J et celle-ci toujours amoureuse la prend avec plaisir. Sam Raimi clôt magnifiquement sa trilogie et craignons à présent qu’un réalisateur de commande ne s’engage sur une suite affadie des aventures de l’homme araignée…


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