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Toi aussi, viens participer au débat sur Newsring !

Publié le 21 août 2012 par Variae

J’ai été contacté par Newsring pour « participer au débat ». Une fois de plus. C’est un rituel bien connu des blogueurs et autres polygraphes du web, qui ont l’habitude de voir apparaître dans leur boîte mail l’invitation d’un(e) jeune représentant(e) d’un site d’information ouvert aux contributions d’internautes, pour, justement, contribuer. Newsring est tout particulièrement coutumier du fait, le site de Fréderic Taddéi ayant articulé son modèle autour de débats de blogueurs et d’experts divers et variés, tribunes contre tribunes, les journalistes permanents du site (à fort taux de rotation, si j’en crois la valse des expéditeurs des mails d’invitation) voyant leur métier évoluer vers la curation de contenus gratuits.

Toi aussi, viens participer au débat sur Newsring !

Les blogueurs et assimilés en ont vite déduit qu’ils étaient de fait transformés, sous couvert de novlangue bien transparente, en supplétifs bénévoles de journalistes de plein droit – tendance lourde d’une presse en crise, misant de plus en plus sur le participatif et le contributif. Ces mêmes blogueurs (oui, ils sont facétieux) ont adopté le principe suivant : systématiquement demander, aux émissaires de ces sites, combien ils comptent rémunérer le billet demandé. Pour se voir toujours opposer la même réponse – chez Newsring en tout cas – je cite celle reçue hier matin : « Les contributions ne sont pas rémunérées, il s’agit d’un site Internet où tout le monde peut débattre librement et donner son opinion. ».

Douce naïveté (feinte, réelle, malgré elle?) de ces mails ingénus. Ces malheureux journalistes, envoyés toquer de porte en porte de blogueur, comme des VRP de l’info 2.0 (« Bonjour, je représente Newsring.fr » [sic]), n’ont visiblement pas conscience que tout, dans leur requête, souligne au contraire la relation commerciale, laborieuse, qu’ils voudraient dissimuler. Ne viennent-ils pas démarcher, mois après mois, de possibles contributeurs pour solliciter leur intervention (« Nous souhaiterions que vous puissiez participer à ce débat et que vous nous fassiez part de votre opinion. »), aveu implicite du service demandé ? Ces contributeurs étant les uniques fournisseurs de ce site dit d’information ? Il serait plus sérieux de commencer par reconnaître cette évidence, quitte à admettre ensuite de ne pas avoir de crédits à distribuer ; voire d’habiller le tout en échange de services réciproque – un troc non monétarisé, mais compris comme tel, du genre « vous m’offrez un texte, je vous offre de l’exposition ».

C’est l’interprétation qu’a fini par valider, il y a quelques mois, une autre rabatteuse de Newsring, que j’interrogeais (déjà) sur la valorisation du contenu qui m’était (déjà) demandé. Pourquoi réclamer un paiement alors qu’on vous offre une tribune ? « Sur newsring, comme sur les plateaux de télévision ou de radio, nous ne rémunérons pas les invités ou les personnes qui viennent débattre. »

J’avais trouvé cette réponse tout à fait sublime.

Sublime. Sublime de ne pas remarquer que, dans le monde de la TV et de la radio, un contributeur régulier devient un chroniqueur, avec tout ce que cela implique.

Sublime d’essayer d’utiliser l’obsession contemporaine du « je passe à la télé », sans se dire que dans l’idée de « passer à la télé », justement, ce qui fait rêver les gens est plus le fait de s’afficher sur TF1 que sur un obscur canal de la TNT – je laisse au lecteur le loisir d’appliquer le raisonnement au monde des sites d’information.

Sublime comparaison, surtout, entre journalisme bénévole et participation à un débat télévisé, parce qu’à la réflexion, tout est affaire de point de vue, et qu’en temps de crise, on pourrait songer à promouvoir le travail gratuit par un patient travail sur les mots, et la perception que l’on a des choses. « Plutôt se changer soi-même que l’ordre du monde » (sagesse antique). Mais oui!

Appliquons cette belle méthode. Aller chez son boulanger et lui demander le don d’une baguette : Entre nous, c’est comme dans une famille, je ne payais pas ma mère quand elle me donnait du pain. Se rendre dans une station service et s’offusquer que le pompiste réclame qu’on lui paie le plein : Quand vous me remplissez mon réservoir, c’est comme une sorte de sponsoring pour mon déplacement, et on ne paie pas les sponsors. To be continued.

L’argent, le salaire, ces vieilles antiennes. Vive le journalisme révolutionnaire !

Et si ça ne marche pas, si le pompiste ou le boulanger se révèlent moins réceptifs que le webcontributeur moyen à ce raisonnement pourtant imparable … vous pourrez toujours en débattre sur Newsring.

Romain Pigenel


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