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Baisse des taxes sur les carburants : une mesure populiste !

Publié le 26 août 2012 par Raphael57

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Ce qu'il y a de bien avec l'économie, c'est que même en expliquant un grand nombre de fois un mécanisme économique, il se trouve toujours un politique pour affirmer qu'une idée saugrenue est une idée lumineuse... Je fais référence à la déclaration du ministre de l'économie, Pierre Moscovici, qui a assuré que les prix des carburants allaient baisser la semaine prochaine.

C'est en effet un classique, dès que les prix des carburants sont en hausse, apparaissent les propositions populistes - j'expliquerai ci-dessous en quoi elles sont populistes - consistant soit à réduire les taxes sur l’essence ou à ressusciter la TIPP flottante (appelée depuis 2010 taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques, TICPE), soit à bloquer les prix des carburants :

Aux États-Unis, le président Obama réfléchit à l'idée de puiser dans les réserves stratégiques pour faire baisser les prix...

Une seule certitude : les prix des carburants ont bien évolué à la hausse pour atteindre des niveaux très élevés, comme en témoignent les chiffres publiés par la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) à partir des données fournies par les stations-service, et que l'on peut retrouver sur le site suivant :

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[ Source : http://www.prix-carburants.gouv.fr ]

Certaines stations services n'hésitent pas du reste à se payer sur le gras le dos du consommateur :

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A ce stade, il faut rappeler comment se forme le prix du litre d'essence. En France, au prix HTT (hors toutes taxes) de l'essence est ajouté une Taxe Intérieure sur la Consommation de Produits Énergétiques (TICPE, ex-TIPP) perçue sur les volumes vendus, ainsi qu'une TVA appliquée sur le prix TICPE comprise. On obtient alors le prix TTC de l'essence :

Prix-carburants-f.png

[ Source : Le Figaro ]

Mais comment se forme le prix HTT de l'essence ? Celui-ci dépend essentiellement du cours du baril de pétrole et de la marge des transporteurs, distributeurs et raffineurs. Mais cette dernière, même si elle est en hausse, ne suffit pas à expliquer la hausse des prix actuels des carburants. On en déduit donc que les hausses actuelles TTC que nous connaissons, sont essentiellement liées au cours du baril de pétrole et au taux de change euro/dollar. Pour le dire autrement, le cours du baril est élevé en raison notamment des tensions géopolitiques en Iran et de la baisse de l'euro par rapport au dollar qui renchérit les importations en dollar comme le pétrole.

Pour l'essentiel donc, le prix de l'essence dépend de paramètres sur lesquels l'État n'a que peu d'emprise. Cela n'empêche pas la multiplication des déclarations populistes,  les uns accusant l'État de s'enrichir sur le dos du consommateur quand les prix du pétrole augmentent (partiellement faux puisque la TICPE étant perçue sur les volumes, une forte hausse du prix de l'essence réduira la consommation de carburants, donc les recettes de TICPE), les autres appelant au boycott des stations services (comment réussir cela dans un monde dépendant au pétrole et face à un énorme monopôle ?).

Or, le principe de l’incidence fiscale permet de montrer que, sous couvert d’aider les consommateurs, ces baisses de taxes seront captées par les producteurs de pétrole et ne profiteront que très peu aux consommateurs. Une preuve éclatante en avait été donnée avec l'échec de la TIPP flottante mise en place par Lionel Jospin en 2000 : le prix du litre d'essence n'avait baissé que de 1 centime mais la mesure avait coûté 2 milliards d'euros au budget de l'État, selon le rapport du député PS Launay !

Si le gouvernement baisse dans les prochains jours la TICPE, qui a rapporté 25 milliards d'euros en 2011, le manque à gagner pour le budget de l'État sera conséquent par ces temps de disette. Certains chiffrages indiquent ainsi qu'une baisse des taxes de 10 centimes par litre durant trois mois coûterait... 1,25 milliard d'euros ! Ce nouveau déficit devra dès lors être financé par de l'endettement et/ou d'autres hausses d'impôts, même si l'État souhaite par ailleurs mettre les pétroliers et distributeurs à contribution. 

J'avais exposé ce principe de l'incidence fiscale dans une petite vidéo, réalisée lorsque la Maison Blanche envisageait de réduire les taxes sur les carburants durant l'été 2008. Dans le cadre d'un modèle simple (vers la 5e minutes de la vidéo), j'explique pourquoi il n'y a pas grand chose à attendre d'une telle mesure...


Baisse des taxes sur le pétrole par Economiste57

N.B : l'image de ce billet provient du site forum-auto


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