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Warrior

Par Onrembobine @OnRembobinefr

Titre original : Warrior

Note:

★
★
★
★
½

Origine : États-Unis
Réalisateur : Gavin O’Connor
Distribution : Joe Edgerton, Tom Hardy, Jennifer Morrison, Nick Nolte, Frank Grillo, Kevin Dunn, Denzel Whitaker, Bryan Callen, Maximiliano Hernandez, Kurt Angle, Jake McLaughlin, Paul Weaver, Yves Edwards…
Genre : Drame/Arts-Martiaux
Date de sortie : 14 septembre 2011

Le Pitch :
À son retour au pays, après avoir vécu un traumatisme sur le champ de bataille, le soldat Tommy Conlon décide de reprendre les arts-martiaux mixtes, dans lesquels il excellait étant plus jeune. Projetant de participer au Sparta, un grand tournoi qui offre une prime de 5 millions de dollars, il demande à son père, un alcoolique repenti qu’il n’a pas vu depuis très longtemps, de l’entrainer. Brendan Conlon, le frère de Tommy, lui aussi pratiquant d’arts-martiaux mixtes, décide également de s’inscrire à la compétition en vue d’empêcher la banque de saisir sa maison….

La Critique :
À quoi reconnaît-on un bon film « sportif » ? Dans tous les cas, la réponse est la même : c’est précisément quand le sport -quel qu’il soit- est utilisé pour valoriser un scénario qui ne parle pas que de sport. Mais après tout, un bon film de combat (ou d’arts-martiaux, de baston, c’est au choix) peut aussi être un film avec un script squelettique qui enchaine les combats, comme l’étaient les deux Un Seul deviendra invincible avec Scott Adkins, ou encore Kickboxer avec Van Damme. En l’occurrence, des longs-métrages pas franchement portés sur l’intellect, mais qui envoient du lourd au niveau des séquences de baston. Il y a plus désagréable, surtout pour les amateurs -nombreux- de la chose. Un film sportif, qui parlerait par exemple de foot ou de course à pied, nécessite par contre un scénario solide. Sinon, mieux vaut regarder carrément un match à la télévision non ? Mais la frontière est mince c’est certain. Un film de baston est aussi, dans un certain sens, un film sur le sport et cela même si le film de baston est un genre à part entière, y-compris dans la catégorie qui rassemble tous les films qui traitent d’une discipline sportive, quelle qu’elle soit.
Warrior, en traitant des arts-martiaux mixtes, est à la fois un film sportif et un film de baston. Ce qui fait que Warrior est un chef-d’œuvre se trouve donc ailleurs, à savoir, dans les pages de son scénario.
À l’instar de Rocky, de Raging Bull ou des plus récents et formidables The Wrestler et Fighter, Warrior ne se repose jamais sur le simple fait de filmer des mecs baraqués en train de se taper sur le coin de la tronche. Warrior raconte une histoire. Une belle histoire qui prend aux tripes et qui trouve dans les pugilats, un écho fracassant qui conduit irrémédiablement au K.O.

Œuvre viscérale, le film de Gavin O’Connor convoque au fond des thématiques très shakespeariennes. On y pénètre les arcanes d’une famille meurtrie par l’alcoolisme d’un père en pleine rédemption. Un homme vieillissant, harcelé par les fantômes d’un passé sordide, qui tente de recoller les morceaux d’une famille dont il a provoqué l’éclatement. Ses deux fils, brouillés, ont suivi des chemins radicalement différents et ne partagent que la haine qu’ils ressentent envers leur géniteur. Deux frangins que le MMA (Mixed Martial Arts) se chargera de réunir.

Le MMA justement est utilisé par O’Connor de la même façon que la boxe ou le catch l’étaient respectivement dans Rocky et dans The Wrestler. Deux références prestigieuses qui ne font pas d’ombre à Warrior. Car au fond, ce n’est pas la nature du combat en lui-même qui compte, mais bel et bien les motivations et les enjeux psychologiques qui l’animent.
Pour autant, les amateurs de MMA seront à la fête. On est ici à des millions de bornes de tous les films qui se contentent d’aligner les combats mal filmés. Warrior combine le fond et la forme. Le fond, c’est la recherche de rédemption, le rachat d’une âme cabossée et la quête de personnages éreintés par la vie qui tentent dans un dernier élan, de sauver ce qui leur est cher. La forme, quant à elle, réside dans la formidable réalisation d’un Gavin O’Connor virtuose. Il pénètre dans la cage et filme les affrontements brutaux avec une maestria qui confère à son métrage un côté immersif impressionnant. On sent bien l’entrainement que de tels combats a du demander aux acteurs et l’investissement d’un cinéaste qui a bien pris conscience de l’importance de retranscrire le plus fidèlement un sport violent.

Et les acteurs justement parlons-en. Tom Hardy tout d’abord, qui s’impose comme l’animal du lot. En dehors de l’octogone, le comédien britannique est une tombe. Il parle peu et quand il le fait, c’est souvent pour se montrer sec et méchant. Quand il rentre dans l’octogone, son physique impressionnant saute au yeux. Avec ses 15 kilos de muscles en plus, Hardy est plus vrai que nature. Ses combats sont courts et extrêmement violents. Animé d’une rage qui explose lorsque la caméra s’attarde sur son regard plein de haine, Tommy, le personnage de Tom Hardy, est une bête qui s’exprime dans une cage où l’adversaire n’a aucune chance. Joel Edgerton est l’antithèse d’Hardy. Brendan, son personnage, est plus tactique, moins porté sur la brutalité. Son style de combat est différent. Plus axé sur les clés et les prises au sol, il reflète un tempérament plus réfléchi et plus posé, même si la rage qu’il exprime envers ses ennemis est aussi le reflet des problèmes qui motivent son désir d’en découdre dans l’arène.
La rage est aussi au cœur de Paddy, le père des deux personnages, incarné avec une justesse plus que touchante par un Nick Nolte en état de grâce. Le comédien buriné trouve sans conteste ici l’un de ses plus grands rôles. En un seul regard, il bouleverse et même si au fond le réalisateur ne s’attarde jamais inutilement sur ses échanges avec ses deux fils, l’émotion n’en est que plus réelle. C’est ça le talent. Ne jamais en rajouter des louches et se concentrer sur ces petits moments de flottement qui valent souvent bien plus que de longs discours.
Se rattachant à ses souvenirs de gloire et à sa cassette de Moby Dick, Paddy est une sorte de Capitaine Achab (le personnage central de Moby Dick), qui en lieu et place d’un baleine géante, poursuit un idéal de réconciliation qui apparaît sans cesse plus utopique.

Reposant sur plusieurs métaphores toutes plus pertinentes les unes que les autres, Warrior arrive à toucher au cœur plus d’une fois. Y-compris grâce au seul personnage féminin du casting, à savoir celui qu’incarne avec sobriété Jennifer Morrison.
Warrior trouve le ton juste et ne va pas chercher midi à quatorze heures. Il se concentre sur ses personnages, repose sur une mise en scène qui sait remarquablement bien s’adapter à son sujet et qui compte plus d’un morceau de bravoure. En cela et pour tout un tas d’autres raisons qui confinent aux ressentis de chacun, Warrior est un grand film. Une œuvre phare sur la famille, l’amour, l’amitié, le pardon et l’accomplissement de soi. Un film qui prend pied dans une réalité sociale douloureuse et qui ne cesse de laisser entrevoir une lueur d’espoir. Un K.O. total !

@ Gilles Rolland

[Critique] WARRIOR

Crédits photos : Lionsgate


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