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« J’objecte à être tué en temps de guerre » (Jacques Vaché)

Par Poesiemuziketc @poesiemuziketc

Deuxième partie du chapitre 54 de France Delville…

Comme l’écrit Michel Carassou dans le Dictionnaire Général du Surréalisme et de ses environs (PUF, 1982), Jacques Vaché, né en 1895 à Lorient (Morbihan), est mort en 1919 à Nantes (Loire-At-lantique). Avec ses condisciples au lycée de Nantes Jean Sarment, Eugène Hublet et Pierre Bissérié, il avait formé, entre 1912 et 1914, une joyeuse équipe qui se réunissait pour jouer de mauvais tours aux bourgeois de la ville et pour éditer des journaux contestataires : En route, mauvaise troupe, puis Le canard sauvage. Jacques Vaché publia là ses pre-miers poèmes, marqués de l’influence symboliste. Dans le même temps, il dessinait pour ses amis des portraits d’acteurs et des compo-sitions inspirées par ses lectures de Poe ou de Mallarmé. Mobilisé fin 1914, il fut blessé en Champagne en septembre 1915. Revenu à Nantes pour y être soigné au début de 1916, il rencontra André Breton, qui fut frappé par son insubordination calculée et par son suprême détachement, mêlé à un humour hérité de Jarry. Retourné sur le front au milieu de l’année, Jacques Vaché lui écrivit – ainsi qu’à Fraenkel et à Aragon – ses lettres de guerre, où se manifestent une radicalisation de son refus, une volonté de désacraliser par

l’U-mour toutes les valeurs, aussi bien que la littérature et l’art.

«  J’objecte à être tué en temps de guerre  », avait-il écrit. Démobilisé, Jacques Vaché retourna à Nantes, et y mourut le 6 janvier 1919 pour avoir absorbé trop d’opium.

Man Ray, André Breton 1936, Dessin, Archives L. Treilhard dans Dictionnaire du Surréalisme, PUF) (c)DR

Breton ne douta jamais du caractère volontaire de cette fin. Il avait revu Jacques Vaché quatre ou cinq fois en 1917 et 1918, en particulier au cours de cette représentation des Mamelles de Tirésias durant laquelle, par provocation, Jacques Vaché avait tiré des coups de revolver. « Vaché est surréa-liste en moi », est-il affirmé dans le Manifeste du Surréalisme. Cette rencontre avait atteint profondément Breton qui venait alors de Mallarmé et de Valéry ; elle avait contribué à « détourner sa vie de son cours ». Chez Breton, et à travers Breton, le Surréalisme devait porter la marque indélébile de Jacques Vaché. (Michel Carassou).

André Breton.
Dans le même dictionnaire, et sous la plume cette fois de Gérard Legrand, André Breton est né en
1896 à Tinchebray-sur-Orne (Orne), et est mort à Paris en 1966. Le fondateur et principal théoricien du mouvement surréaliste déclarait en 1951 que nul ne pouvait contester que sa vie ait fait corps avec ce mouvement. Il avait précédemment remarqué qu’aucun de ceux qui quittèrent le Surréalisme à tel ou tel moment de sa trajectoire n’a jugé devoir le contester quant à son bien-fondé théorique. C’est au croisement de ces deux réflexions que peut s’apprécier la singularité intellectuelle et humaine de l’aventure qui fut celle de Breton.
Issu de la très petite bourgeoisie provinciale, aux attaches encore campagnardes, il passe son enfance et son adolescence à Pantin, puis à Paris, comme élève du lycée Chaptal (1906-1912). Initié à la poésie moderne par un professeur de rhétorique, et préoccupé de bonne heure par la pensée hégélienne (que son professeur de philosophie poursuit de ses sarcasmes positivistes), il opte, un peu au hasard, pour la carrière médicale et prépare le P.C.B. Il sent cependant se creuser en lui un « état d’attente » et de réceptivité, qu’il tient pour plus pré-cieux que tout le reste (1913). Il noue ses premiers contacts littéraires (Royère, Valéry, Apollinaire : ces deux derniers resteront pour lui d’importance majeure). Dans La phalange (août 1914), il publie quel-ques poèmes de structure mallarméenne. Mobilisé en 1915, absolu-ment dénué d’enthousiasme patriotique (il a même marqué déjà quel-que intérêt pour l’activité des socialistes et des anarchistes), il est versé dans le service de santé, et fait ainsi connaissance, à l’hôpital de Nantes, avec Jacques Vaché (1916). Celui-ci exerce sur lui une in-fluence déterminante, en lui révélant l’humour et en l’obligeant à s’interroger à fond sur la validité de sa vocation poétique.
Précisément, cette vocation trouve une dimension nouvelle, tou-jours à Nantes, quand Breton s’imprègne en profondeur de l’œuvre de Rimbaud. Si consacrer sa vie à l’art lui paraît désormais absurde, la poésie ne lui apparaît pas moins indispensable à sa vie.

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