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Coupé-décalé : 10 après, des décibels toujours au top

Publié le 03 septembre 2012 par Africahit

Coupé-décalé : 10 après, des décibels toujours au topAu vu des succès populaires, médiatiques et même pécuniaires de Dj Arafat, Molare, Abou Nidal, JJK, Rico, Abdel Montiny à Logobi ou Claire Bahi, en passant par Charlie Watta, les duos togolais Toofan et nigérian P. Square…, il ne serait pas surfait de déclarer qu’en 10 ans d’existence, le coupé-décalé a conquis la planète.

Des scènes hebdomadaires de la célèbre émission de Rti 1, Tempo, aux hit-parades des chaînes internationales telles que Trace TV ou de Rfi et Mtv, les déhanchements et psalmodies des faiseurs de ce rythme intègrent le quotidien et l’imagerie populaire contemporaine. A chaque sortie, à Abidjan, Paris, Bamako, Ouaga, Libreville, d’une star du coupé-décalé, c’est l’hystérie. Sans exagération. «Voir Kédjévara, Debordo, Serges Beynaud, Dj Mix 1er, Bébi Philip, Shaggy Sharoof, Dj Léo ou Arafat et vivre» semble être, désormais, le leitmotiv de jeunes d’ici et d’ailleurs.

Si, face au r’nb, à la soul et au hip-hop, on ne peut pas affirmer que le coupé-décalé est assis sur le toit du monde de la musique urbaine, il faut, toutefois, lui accorder une… reconnaissance universelle. En outre, une question se fait tout aussi jour: doit-on encore parler de coupé-décalé ? A cette question, bien des critiques musicaux préfèrent parler d’ «African électro dance». Tant la reconnaissance d’un genre musical, à proprement parler, ne pèse pas dans la balance, face au partage par cette nouvelle génération de musiciens d’une musique métissée sur fond d’ambiance héritée du rap, zaïko, ragga et de biens d’autres rythmes urbains des capitales africaines dont le zouglou et le gnaman-gnaman (ainsi que ses dérivés tels que le ziguéhi). Au point que même le mythique groupe Magic System, fer de lance du zouglou, n’a pas pu résister à la déferlante du coupé-décalé.

Un moule de (re) création

En fait, tout le monde y a succombé. Un peu comme si c’était le creuset de (re) création artistique qui convenait aux socio-styles émergents. «Ne m’appelez plus atalaku», «Demain t’appartient», «Belle ambiance», respectivement de Meiway, Alpha Blondy et Koffi Olomidé, s’appropriant ce genre, en sont des illustrations de poids parmi tant d’autres.

Comme quoi, le défunt «président» des «coupeurs décaleurs», Douk Saga, et ses ouailles, sans, dès le départ, avoir apporté une musique élaborée, sont des pionniers qui méritent le respect des uns et des autres. Bien plus, ils ont su se défaire d’un certain narcissisme et de l’étiquette de «petits voyous insouciants» pour arborer celle d’artiste au sens plein du terme. En y comptant les frasques, bien sûr.

Dans le rétroviseur…

Le coupé-décalé est une danse apparue en 2002, en Côte d’Ivoire et dans la communauté ivoirienne vivant en France, notamment dans les milieux ivoiriens de Paris (la Jet set). Il s’inscrit dans le mouvement culturel (ou le concept) plus global qu’est la Sagacité. La danse mimant les pas de guerrier dans les fêtes de génération en pays attié, le mot «coupé» provient du nom d’une ville de cette région dénommée Akoupé, dans le sud-est forestier ivoirien. En nouchi, l’argot ivoirien, «couper» signifie tricher, voler ou arnaquer et «décaler», partir ou s’enfuir, donc couper-décaler peut se comprendre comme arnaquer quelqu’un et s’enfuir. La personne trompée est généralement originaire de l’Occident. À ses débuts, les paroles mettaient souvent en valeur ceux qui ont utilisé la ruse pour faire fortune.

Le coupé-décalé est apparu à Paris, vers 2000/2001. Au fil du temps, la danse se popularise sous l’impulsion de groupes de Dj ivoiriens tels que Dj Jacob et l’on nomme la danse «Décalé-coupé», puis «Coupé-décalé», pour des raisons esthétiques. Grâce à son aîné, le show-maker Joss Men Joss, en l’occurrence.

Certains techniciens et arrangeurs sont des pionniers de ce mouvement musical tels que : David Tayorault, Max Héro, Freddy Assogba, Koudou Athanase. Plus tard, ces derniers inspireront la 2e génération d’arrangeurs que sont Bébi Phillip, Champy Kilo, Patché, Elvis Segon et Serges Beynaud. Des figures qui deviendront emblématiques émergent. Il s’agit d’abord des créateurs: La Jet set, composée de Douk Saga, Molare, Boro Sangui, Solo Béton, Chacoolé, Lino Versace, Kuyo Junior et Serge Defalet. DJ Jacob soutiendra le mouvement. Conscient de la popularité grandissante du coupé-décalé, David Monsoh, producteur ivoirien reconnu en Europe, (notamment de Koffi Olomidé, Fally Ipupa, Ophélie Winter) insiste pour créer un mouvement musical. Ainsi, Douk Saga sort le premier morceau dénommé «Sagacité» (promo de son album) en 2003. Le clip vidéo «Sagacité» promeut la danse, mais aussi les concepts qui accompagnent le coupé-décalé: «Farot farot» (faire le malin), «Boucantier» (homme qui fait parler de soi, qui fait son «boucan»), «Travailler» (distribuer des billets de banques). Mais force est de constater que depuis la disparition de Douk Saga, en 2007, ses héritiers ont mis beaucoup d’eau dans leur vin. Au sens propre comme au figuré. Faisant moins le « m’as-tu vu » et moins narcissiques, soit ils sont devenus de vrais artistes, soit ils ont quitté la scène.

Depuis 2009, le coupé-décalé a intégré la deuxième phase de son évolution avec un succès incontestable. Une variété de mélodies et concepts, une gamme de pas de danse encore plus élaborés et complexes. Qui en donnent une jouvence permanente.

Rémi Coulibaly



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