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Contagion

Par Tedsifflera3fois

En pleine boulimie créative, Steven Soderbergh livre 3 films coup sur coup : Contagion, Piégée et Magic Mike. Le premier, avec un casting digne d’Ocean’s Eleven et un pitch de blockbuster, déjoue toutes les attentes : il s’agit d’un film ingrat, peu aimable. C’est pourtant là que se trouve sa singularité.

Synopsis : L’histoire d’une pandémie dévastatrice qui explose à l’échelle du globe…

Contagion
Contagion est un film-mystère. Visiblement, Soderbergh survole ses personnages et leurs situations particulières. Son propos semble être ailleurs, dans le grand tout dont il se fait l’observateur minutieux. Oui, mais que veut-il nous dire?

Certains y verront un pamphlet pour l’hygiène (pourtant, ici comme ailleurs, seul le hasard décide, on ne peut compter que sur la chance et l’isolation, programme peu réjouissant), d’autres pourront s’amuser de voir que le danger vient d’Asie. Les occidentaux sont en périls, victimes d’une mondialisation qui globalise tous les maux.

Mais ces sujets intéressent peu le cinéaste. Le film devrait être un récit apocalyptique digne de 28 jours plus tard. Pourtant, le blockbuster n’en est pas un. Et si tout simplement Soderbergh maitrisait mieux que personne l’art du contrepied? Avec un casting et un budget dignes d’Ocean’s Eleven, le réalisateur de Solaris et de Bubble livre le film qu’on n’attend pas. Il passe consciemment à côté de la tragédie annoncée pour étudier froidement les mécanismes scientifiques, politiques et humains liés à une pandémie.

C’est cette manière de présenter des faits et rien que des faits qui donne paradoxalement sa valeur à Contagion. Le scénario, à force de multiplier les points de vue et d’éviter soigneusement de trop s’attacher aux histoires personnelles, ne permet aucune narration captivante. La surprise du film, c’est qu’il n’y aura pas de surprise. Soderbergh veut raconter le réel, il s’efface derrière son sujet et se transforme en reporter. Contagion est un film d’investigation. Finalement, la question cruciale n’est pas “où ça va?” mais “d’où ça vient?”. Contagion est un film en trompe-l’oeil, qui n’a de cesse de passer pour ce qu’il n’est pas.

Ce qu’il est, voilà exactement ce qui continue de nous interroger une fois le déroulé du film terminé. Contagion est une oeuvre qui nous demande de l’interroger. Pourquoi ce film? Qu’est-ce que cet objet, plus théorique que saisissant?

Si jamais Contagion doit donner quelque chose à penser en dehors de son propre statut, alors il ne s’agit sans doute ni d’hygiène, ni de politique. Cela est affaire de contexte. Non, il s’agit de fragilité. D’une humanité pleine de certitudes, d’organisations, de mécanismes, de procédures, de protections. Et d’une humanité qui pourtant n’est rien d’autre qu’une ligne incertaine dans le cours du temps. Pas moins vulnérable que ne l’étaient les dinosaures.

Quand on y réfléchit bien, Contagion est peut-être bien plus inquiétant qu’un film de Romero. Contagion ne fait pas appel à nos peurs irrationnelles d’enfants. Contagion est certes un film catastrophe sans âme. Mais la catastrophe n’en est que plus pure. Contagion ne romance pas, il parle de logique, de réalité, d’actualité. Un virus comme la grippe aviaire est d’autant plus terrifiant qu’on s’en est sortis. Car entre la réalité et les zombies, il y a un abîme. Mais entre un vrai virus qu’on arrive à maîtriser et ce même virus qui nous anéantit, il n’y a qu’une légère différence de scénario. Un petit concours de circonstances qui pourrait faire basculer la réalité toute entière dans l’oubli. Contagion parle de ça, de cette mécanique qui peut nous sauver, la plupart du temps, ou un jour nous être fatale.

Note : 5/10

Contagion
Un film de Steven Soderbergh avec Marion Cotillard, Matt Damon, Laurence Fishburne, Jude Law, Kate Winslet, Bryan Cranston, Jennifer Ehle et Gwyneth Paltrow
Drame – USA – 1h46 – Sorti le 9 novembre 2011


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