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Bernard Arnault Pdg de LVMH s'offre le luxe de se prendre une veste nationale

Publié le 10 septembre 2012 par Didiertestot
par Didier Testot.
C'est donc ce week-end que Bernard Arnault le Pdg de LVMH a décidé de faire du bruit. Lui plutôt discret, accordant très peu d'interviews, laissant le soin traditionnellement à son équipe de communicants historiques de parler à sa place auprès des journalistes est venu occuper tout le week-end médiatique après avoir confirmé son souhait de devenir belge. Cet homme du Nord aura voulu faire un coup dont il a le secret.
Il a toujours su le faire dans ses affaires, dernière en date, surprenant les héritiers Hermes, en grimpant au capital du groupe de luxe.
Bernard Arnault Pdg de LVMH s'offre le luxe de se prendre une veste nationale
Bernard Arnault est l'homme le plus riche de France, mais il n'est pas connu des Français, sauf pour ceux qui lisent les pages glacées des magazines de mode ou de luxe et encore.
Cet homme a, en une trentaine d'années seulement, su conquérir, batir, développer, élargir, un groupe de luxe devenu leader mondial : LVMH comme Louis Vuitton Moët Hennessy.
Qui sait sauf les analystes financiers que le groupe outre Louis Vuitton, possède les marques Fendi, Donna Karan, Loewe, Marc Jacobs, Céline, Kenzo, Givenchy, Thomas Pink, Pucci, Berluti, et Rossimoda, ou que LVMH est numéro un mondial du champagne avec Moët Hennessy ?
 Dans les Parfums & Cosmétiques : Christian Dior, Guerlain, Givenchy et Kenzo. Les montres : TAG Heuer et Hublot. Et dans la distribution sélective : DFS et Miami Cruiseline...

Bernard Arnault Pdg de LVMH s'offre le luxe de se prendre une veste nationale

(Capture écran site LVMH, photo Karl Lgerfeld)


Le groupe familial Arnault détient 46,1 % de LVMH
Un groupe leader mondial et dont Bernard Arnault a su au fil du temps se renforcer au capital pour en détenir aujourd'hui 46,1%. C'est un savoir-faire unique, car peu de familles arrivent au fil du temps avec les acquisitions et l'évolution d'un groupe de taille mondiale, à en garder autant. Et c'est la clé de l'histoire médiatique de ce week-end, pas encore abordé à ce jour. On parle de résidence fiscale, nationalité, investissements productifs en Belgique, le premier communiqué  de samedi voulait montrer le "patriotisme" de Bernard Arnault :
"Contrairement aux informations publiées ce jour, Monsieur Bernard Arnault précise qu’il est et qu’il reste résident fiscal français.L’obtention éventuelle de la double nationalité franco-belge ne change rien à cette situation ni àsa détermination de poursuivre le développementdu groupe LVMH  et les créations d’emplois qui en sont la conséquence en France. Il rappelle que le groupe LVMH embauche, chaque année, plusieurs milliers de personnes en Franceet ce depuis plus de 20 ans et qu’il contribue massivement aux exportations françaises.
Monsieur Arnault, originaire du Nord de la France, a de nombreux liens avec la Belgique tant sur le plan personnel et familial que sur le plan professionnel. Son groupe privé (Groupe Arnault) a de nombreux investissements en Belgique,  et entend les développer. C’est dans cette perspective que Monsieur Bernard Arnault a sollicité la double nationalité franco-belge." Puis finalement, par l'AFP, pour une interview "exclusive", Bernard Arnault voulu lancer la réplique : "Je suis et je resterai fiscalement domicilié en France et à ce titre, je remplirai, comme tous les Français, l'ensemble de mes obligations fiscales....Notre pays doit compter sur la contribution de chacun pour faire face à une crise économique profonde dans un cadre budgétaire particulièrement contraint". En réalité, Bernard Arnault peut faire ce qu'il veut, mais il veut que cela se sache et que ceux qu'ils estiment responsables de la situation, en soient pour leur frais.
Les holdings de la conquête de Bernard Arnault
D'ailleurs, si la fortune de Bernard Arnault a connu une telle progression au cours des dernières années, sa stratégie fiscale, et les connaissances de ses plus proches conseillers, en matière de droit des sociétés, ont fait la différence. Vous ne pouvez pas faire un tel parcours si vous ratez votre stratégie fiscale et juridique. Et puis les politiques (compte rendu du Livre d'Airy Routier, L’Ange Exterminateur,
la vraie vie de Bernard Arnault, Albin Michel, Paris en 2003 http://www.annales.org/gc/2004/gc76/arnault60-68.pdf ), y ont largement contribué.
Les questions fiscales et de contrôle, ont donc toujours été au coeur de la stratégie de Bernard Arnault. Bâtir un groupe de luxe, sans ce savoir-faire juridique, lui aurait permis de grandir mais jamais d'avoir en 2012, encore 46,1% de son capital.
Les holdings de Bernard Arnault qui lui ont permis ce miracle de contrôle familial : Financière Agache,
Bernard Arnault Pdg de LVMH s'offre le luxe de se prendre une veste nationale

société devenue belge déjà en 2008, oui en 2008, donc sous Nicolas Sarkozy, ami de Bernard Arnault, ce que personne n'avait vu à l'époque.
Pourtant cela indique que Bernard Arnault avait vu le vent venir. Mais dans les holdings de famille, Jacques Rober a été celui de la conquête . Personne sauf Arnault ne connait ce holding, et cette cascade de holding comme le rappelait l'Expansion en 2007  dans un article intitulé : "Les cascades de Bernard Arnault".
Nous sommes au coeur du sujet et tout au long de sa vie de dirigeant, il a eu à démontrer son savoir-faire face parfois au gendarme de la Bourse (Commission des opérations de Bourse), sur ces sujets capitalistiques et ses conseillers, le principal d'entre-eux, Pierre Godé, est l'homme de l'ombre qui a soutenu et conseillé, le "petit Bernard" depuis le début, après son père Jean Arnault. Comme feu Antoine Bernheim chez Lazard sans qui tout cela n'aurait pas pu être finalisé.
Méthodes comptables, provisions, prime d'émission, traité d'apport, amortissements, mali de fusion, ... seul un expert pourrait voir derrière ces expressions techniques la main de Pierre Godé, ancien professeur de droit commercial à Nice, le meilleur professeur de droit commercial qu'il m'ait été donné de rencontrer dans ma vie d'étudiant.
Aucun de ses élèves ne séchait les cours, car il était charismatique, et pas seulement parce qu'il est très grand ! Son amphi était plein, et c'est en 1984 qu'il parti pour faire le job chez Arnault. Nous étions tous déçus. Mais il nous avait dit "qu'il ne pouvait refuser le job",  et le voilà Vice-Président de LVMH !

Bernard Arnault Pdg de LVMH s'offre le luxe de se prendre une veste nationale

Pierre Godé Vice-Président LVMH (photo capture écran site LVMH)

Bernard Arnault a donc oeuvré toutes ses années pour cela, ce qui n'enlève rien à sa réussite entrepreneuriale, avoir su faire de Louis Vuitton, une machine à cash que le monde entier lui envie, et transformer nombre de marques en grandes marques, avec un savoir-faire reconnu. Et cela personne ne devrait le contester, c'est dur, il fallait de l'intelligence, des idées, de l'intuition aussi, de ce côté là Bernard Arnault est un grand dirigeant qui aura su s'entourer également pour réussir à ce que aujourd'hui, ces marques soient connues mondialement. Il a aussi connu des échecs (lors de la bulle internet) et voulu faire un "coup" chez Carrefour. Son avantage, il peut se le permettre, même si son image en a souffert, à chaque fois. L'évènement de ce week-end n'est donc pas simplement fortuit, il a été longuement pensé, d'ailleurs les Belges le savent, eux, depuis longtemps : RTBF Info
Simplement, Bernard Arnault a choisi son moment, le lendemain de l'élection à la Présidence de François Hollande, histoire de marquer les esprits. Même si en 2007/2008, il savait déjà ce qu'il devait faire, car la droite allait le décevoir comme nombre de dirigeants d'entreprises !
Pourtant derrière cette agitation, Bernard Arnault a un seul problème, le même que tous les dirigeants de PME qui ont créé et développé leur entreprise : sa succession et les droits de succession. J'ai dans le passé vu des patrons de PME sortir de la Bourse, à un moment propice, pour réussir au mieux cette transition. Lui, 4ème fortune mondiale, mais Français, n'a pas l'opportunité des Warren Buffet, Bill Gates, d'aménager au mieux sa succession, en tout cas s'il reste à Paris !
Mais en France, cela reste un sujet tabou, pourtant quand on a passé autant de temps, avec une telle réussite, pour construire le numéro un mondial du luxe, payer oui, mais comme on le souhaite, pour que les enfants (deux mariages), puissent aussi en profiter, c'est humain.
Bernard Arnault, homme du Nord, qui dans sa jeunesse vivait dans le quartier chic de Croix (Lille), et  qui a eu pour voisins les frères Willot (repreneurs de Boussac), les familles Mulliez (fondateur d’Auchan), Prouvost, Masurel, Dewavrin... a aujourd'hui les mêmes problématiques. A ceci près qu'il  a le plus d'argent.
S'il a choisi d'être au centre des attentions, alors que la discrétion est plutôt la stratégie des hommes du Nord, en pleine crise économique et sociale, c'est qu'il pense qu'il doit le faire maintenant, quelque soit le prix "médiatique" à payer.
Mais les politiques qui sont les premiers à fréquenter les dirigeants du CAC40 seraient bien inspirés, de faire leur devoir.

Et s'ils avaient géré notre argent depuis 30 ans, comme Bernard Arnault a su gérer le sien, la France serait un pays dynamique et prêt à conquérir le Monde !
Vos gueules les Mouettes !
Bernard Arnault n'est pas exempt de reproches, car s'il rate aujourd'hui sa sortie, c'est sans doute, qu'il n'a pas mesuré l'état de la France, à trop s'isoler dans son bureau que ses proches disent inaccessible et à fréquenter uniquement les soirées luxueuses, sans se rendre compte de la réalité, d'une France désespérée et sans repères. Lui qui vient du Nord, sait-il que certaines familles en sont à la troisième génération de chômeurs ? C'est aussi la réalité de la France.
J'aurais aimé plutôt qu'il nous impose sa fondation d'art contemporain au Jardin d'Acclimatation, qu'il fasse partager son savoir-faire de dirigeant à des jeunes qui voudraient avoir quelques clés de la réussite, à la manière d'un Xavier Fontanet (ancien Pdg d'Essilor) qui oeuvre en ce sens.
Oui, il le doit à la France qui lui a donné une occasion unique d'accomplir son oeuvre, comme à François Pinault et à d'autres grands dirigeants français, qui sans l'aide de l'Etat et de ses représentants, n'auraient été peut-être que des patrons de PME, mais sans doute raté le CAC40, des dirigeants de PME qui restent les grands oubliés de la crise depuis 2007 !

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