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La légende des Bondurant (Western épique, vous avez dit ?)

Par Borokoff

A propos de Des hommes sans loi de John Hillcoat ★★★☆☆

Shia LaBeouf - Des hommes sans loi de John Hillcoat - Borokoff / Blog de critique cinéma

Shia LaBeouf

1931. À Franklin (Virginie), en pleine période de Prohibition (1919 à 1933), au début de la Grande Dépression, les frères Bondurant règnent en maîtres absolus sur le trafic d’alcool dont ils ont fait leur spécialité. Lorsque Rakes (Guy Pearce), le cruel pour ne pas dire sadique Adjoint Spécial (Special Deputy) débarque de Chicago, c’est avec l’ambition de réduire à néant tous les commerces illicites d’alcool dont celui, florissant, des Bondurant. Mais s’il a fait de l’intimidation, la brutalité et la violence physique sa spécialité, Rakes voit bientôt dans sa mission un combat personnel et une lutte certes acharnée mais obsessionnelle contre les Bondurant. Prêt à provoquer une véritable guerre entre l’État et les trafiquants et à en découdre avec les Bondurant, Rakes sembe pourtant sous-estimer le courage et la force de caractère des trois frères. Une rumeur circulerait même comme quoi Jack (Shia LaBeouf), Howard (Jason Clarke) et Forrest (Tom Hardy) seraient invincibles. Une légende ?

Adaptation du roman The Wettest County in the World (Pour quelques gouttes d’alcool, Éditions de l’Archipel, 2010), écrit par Matt Bondurant en hommage à son grand-père, Des hommes sans loi (Lawless en anglais) est l’occasion d’assister à nouveau à une collaboration entre John Hillcoat et Nick Cave (après Ghots… of The Civil Dead, 1990 et The Proposition, 2005 notamment), qui signe le scénario et les compositions du film.

Les musiques sont d’ailleurs intimement liées au scénario. Elles donnent à la fois le rythme à l’action tout en permettant l’enchainement des péripéties.

Jessica Chastain - Des hommes sans loi de John Hillcoat - Borokoff / Blog de critique cinéma

Jessica Chastain

Comment qualifier Des hommes sans loi ? Est-ce un western ou un film de gangsters en hommage à Scarface d’Howard Hawks (1932) et aux polars noirs des années 50 aux États-Unis ? Un peu des deux sans doute, tant Des hommes sans loi oscille entre plusieurs genres. C’est d’ailleurs ce que l’on pourrait essentiellement reprocher au réalisateur australien ; d’hésiter souvent sur le ton à donner à son film, dont l’intrigue se dilue parfois dans des digressions sentimentales et des parenthèses un peu longues comme ces frasques amoureuses entre Jack et la fille d’un pasteur jouée par Mia Wasikowska. De même, on n’est pas certain de saisir la pertinence ni l’utilité du personnage de Maggie (Jessica Chastain), ancienne danseuse de Chicago venue se retirer en province et qui tombe amoureuse de Forrest.

Certes, il ne faut pas oublier que Des hommes sans loi est d’abord l’adaptation d’un roman familial et autobiographique, ce que rappelle la voix-off de l’auteur qui raconte l’histoire, mais les scènes de bluette entre les frères et leurs petites amies auraient gagné à être plus courtes.

Mais concentrons nous sur le nerf de la guerre, et ce qui fait que parfois aussi, on se souvient à quel point Hillcoat est un réalisateur de talent, capable de filmer les scènes de course poursuite avec un sens de la mise en scène et du rythme rare, capable surtout d’insuffler une dimension épique à certaines scènes qui rendent parfois son western sublime et le feraient s’approcher du chef-d’œuvre s’il ne retombait pas dans ses travers à l’eau-de-rose.

On se souvient des excellents The Proposition et La route, films plus radicaux formellement sans doute et au genre plus défini.

Heureusement, Hillcoat peut aussi s’appuyer sur une pléthore d’acteurs prodigieux, au casting desquels il faut rajouter la présence de Gary Oldman dans le rôle d’une espèce d’Al Capone local. Les frères Bondurant auraient d’ailleurs eu des liens avec le vrai Al Capone, mais cela fait partie du mythe de la fratrie auquel Matt Bondurant, l’auteur du livre, a lui-même participé en romançant les épisodes de la vie de son grand-père dont il ne connaissait que des bribes et des histoires rapportées et la plupart du temps amplifiées.

Shia Labeouf, Tom Hardy et Guy Pearce font en tout cas la plus forte impression. C’est de leurs personnages que Hillcoat et Cave tirent les portraits les plus poussés, les études de caractère les plus fouillées. Jack, le plus jeune des Bondurant, est aussi le plus impulsif et le plus fonçeur. Ambitieux, alors qu’on le croyait emprunté et peureux, c’est lui qui décide de donner au début des années 30 une nouvelle ampleur au business familial, alors que la répression s’amplifie.

Jack est le frère qui surprend le plus, par le courage dont il fera preuve et qu’on ne lui soupçonnait pas. Face à lui, l’aîné Forrest est son antithèse, personnage beaucoup plus rentré, taiseux et introverti (pour ne pas dire ours) et qui s’inquiète de voir son autorité et sa place de chef remises en question. L’affrontement entre les deux frères donne lieu à un jolie confrontation cinématographique. Plus en retrait mais tout aussi courageux, Howard, alcoolique notoire et violent, est un personnage moins étudié, et davantage un spectateur des joutes et du duel à distance entre Jack et Forrest qu’autre chose.

Enfin, saluons la performance de Guy Pearce. Frôlant l’hystérie quand il ne tombe pas carrément dedans, il campe de manière remarquable un shérif dandy tiré à quatre épingles, à la fois maniaque et vaniteux. Sans doute l’un des personnages les plus vils et les plus immondes que l’acteur australien ait eu à incarner.

Le fil conducteur du film, c’est la légende d’Immortels que l’on prête aux frères Bondurant et qui leur colle à la peau. C’est aussi ce qui fera exploser Rakes dans un final épique et en apothéose.

http://www.youtube.com/watch?v=ZRiX8FIz084

Film américain de John Hillcoat avec Shia LaBeouf, Tom Hardy, Jessica Chastain, Guy Pearce, Gary Oldman… (01 h 55)

Scénario de Nick Cave d’après le roman de Matt Bondurant : 

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Mise en scène : 

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Acteurs : 

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Dialogues : 

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Compositions de Nick Cave et Warren Ellis : 

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