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The Dark Knight Rises (2012) de Christopher Nolan

Publié le 29 septembre 2012 par Flow

The Dark Knight Rises.

(réalisé par Christopher Nolan)

La figure du héros.

 

 

J'attendais le dernier volet de la trilogie de Nolan avec une impatiente quasi-psychotique, bien que paradoxalement, je le redoutais tout autant. En effet, après le flamboyant Dark Knight, comment ne pas être déçu? Et la déception est bien présente à la fin du film car jamais il ne parvient à égaler son aîné. Pourtant, il a de sacrés arguments. Pas un carton plein donc, mais un carton tout court.


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Il y a huit ans, Batman a disparu dans la nuit: lui qui était un héros est alors devenu un fugitif. S'accusant de la mort du procureur Harvey Dent, le Chevalier Noir a tout sacrifié au nom de ce que le commissaire Gordon et lui-même considéraient être une noble cause. Et leurs actions conjointes se sont avérées efficaces puisque la criminalité a diminué à Gotham.

Mais c'est un chat – aux intentions obscures – aussi rusé que voleur qui va tout bouleverser. À moins que ce ne soit l'arrivée à Gotham de Bane, terroriste masqué, qui compte bien arracher Bruce à l'exil qu'il s'est imposé. Pourtant, même si ce dernier est prêt à endosser de nouveau la cape et le masque du Chevalier Noir, Batman n'est peut-être plus de taille à affronter Bane…

 

Le Joker, ce personnage magique dont je ne cesserai jamais de vanter les mérites, a hélas disparu avec Heath Ledger. C'est lui qui imposait au second volet des aventures de Batman, façon Nolan, son tempo enlevé, sa folie et sa noirceur dépressive. Il manque à The Dark Knigt Risesun joker pour transcender son statut de blockbuster estival.

En voyant l'entrée en jeu de Bane (excellent Tom Hardy) on aurait pu être rassuré. Mais la joie fut de courte durée. S'il fait un excellent bad guy, il reste un peu trop caricatural et somme toute un peu creux. Pire, le sort qui lui est réservé après le twist final (connu d'avance) est tout simplement honteux. C'est toute la construction du personnage qui part en fumée afin de mettre en valeur une méchante portée par une actrice qui n'avait pas la carrure pour endosser ce rôle. Dommage.

Du coup, il manque au film un rythme (même si son extrême longueur ne se fait jamais ressentir). Décousu, il se perd dans un imbroglio scénaristique et politique. A trop vouloir côtoyer les cimes du 7ème art, Nolan se brule un peu les ailes. Questionnements métaphysiques de comptoir qui porte à rire. Le passage de la prison est assez symptomatique de cette tendance (qui se dessinait quelque peu dans Begins) avec son maître Yoda et sa métaphore graphique (le puits à grimper). Et ce même si l'idée n'est pas mauvaise (nous y reviendrons).

Le volet politique laisse quelque peu pantois. Nolan avait fait preuve d'une cohérence totale dans l'opus précédent (chaque personnage représentait une façon d'aborder le pouvoir politique pour se conclure sur un nihilisme désabusé). Ici, il multiplie les références politiques jusqu'à ce que le film devienne un fourre-tout étonnant. On a un peu de lutte des classes (l'attaque de la bourse, le monde souterrain), un peu de marxisme (la Révolution de Bane qui n'est qu'un prétexte à la destruction de la ville tant est si bien qu'on se demande pourquoi il se prend pour Lénine), des tribunaux populaires qui rappellent la Terreur ou encore une statue érigée en l'honneur de Batman qui fait très culte du chef. Ah et le fantôme du terrorisme et de la politique sécuritaire, toujours présent.

Bref, on frôle le trop plein même s'il est évident que tout est mis là volontairement. Nolan a voulu mettre en garde les américains. En temps de crise, la société part dans tous les sens. Hélas, ça ne rend pas très bien à l'écran.

Malgré tous ces défauts, The Dark Knight Risesest une réussite.

C'est un blocbuster monumental qui ne lésine pas sur les moyens pour divertir et offre des moments de cinéma inoubliables. L'attaque de la bourse avec sa poursuite en moto, la prise de la ville par le criminel masqué, le combat entre les forces de l'ordre et les hommes de Bane et surtout ce morceau de bravoure extrêmement douloureux: la première confrontation entre le fléau et Batman. On ressent chacun des coups et on souffre avec le héros la destruction de son corps.

Selina Kyle, ensuite, fausse Catwoman mais excellent personnage. Mystérieux, sensuel, envoûtant. Porté par une Anne Hathaway en grande forme (le cuir lui va si bien), il constitue un excellent pendant féminin à Bruce Wayne.

On en vient enfin à lui. C'est la plus grande réussite du film: le personnage de Bruce Wayne. En retrait lors du précédent opus, il reprend ici la place qui lui revient de droit, au centre du film. Brisé par le Joker, cet homme qui croyait en ce qu'il faisait et en son idéal de justice s'est rendu compte de son échec cuisant et s'est enfoui dans un exil intérieur pour ne pas s'y confronter.

Pourtant, lorsque John Blake, en qui il s'identifie immédiatement, vient le voir, il a un déclic. Sa mission n'est pas terminée. Il renfile la cape et le masque. Oui mais voilà, on ne peut être un héros (encore moins un super) quand ça nous chante. Et Wayne va l'apprendre de manière douloureuse pour lui et pour le spectateur (on l'a déjà évoqué).

 

Christopher Nolan ramène le super-hérosisme à son essence. Alors que la tendance est à la banalisation (tout un chacun peut-être un super-héros -de Chronicleà Heroes), il prend le chemin inverse. Simon Merle, dans son bouquin, Super-héros et philo, critiquait la voie empruntée par le cinéma contemporain qui avait perdu de vue le caractère premier de ces personnages. Ils doivent être au-dessus de la condition humaine. C'est ce que Nolan fait avec son Batman. Bruce Wayne accepte enfin, les sacrifices que nécessite sa position. Et il va au bout de sa logique.

 

La transmission, enfin, est logiquement de la partie et fonctionne dans les deux sens. Bruce Wayne est entouré de figures paternelles (Alfred bien-sûr avec lequel il partage les meilleures scènes du film, Lucius Fox ensuite et bien évidemment le commissaire Gordon) mais il est lui-même le père de substitution pour une flopée d'orphelins et plus particulièrement pour John Blake.

The Dark Knight Risessouffre de sa volonté de grandeur. Il veut en dire beaucoup trop, donc il le dit mal (incohérences, sacrifices scénaristiques, superflu). Mais il demeure pourtant un grand film car il propose énormément de choses (un spectacle grandiose, une flopée de personnages charismatiques et une étude psychologique de Bruce Wayne qui renouvelle la figure du héros). Certains grincheux seront déçus mais se plaindre d'une telle proposition de cinéma, aussi imparfaite soit-elle, c'est être de mauvaise foi.

Note:

Pastèque de premier choix


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