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Looper de Rian Johnson

Par Geouf

Looper de Rian JohnsonRésumé: Dans le futur, il est devenu quasi-impossible de se débarrasser discrètement d’un corps humain. A tel point que la mafia utilise le voyage dans le temps pour éliminer les indésirables, les renvoyant 30 ans dans le passé, où ils sont « pris en charge » par des assassins spécialisés, les loopers, grassement payés pour leur service. Joe (Joseph Gordon-Levitt) est l’un de ses loopers, un professionnel n’ayant jamais fait d’erreur. Jusqu’au jour où il se retrouve face à une victime particulière, qui n’est autre que lui-même (Bruce Willis).

Alléchant sur le papier, encensé un peu partout par la critique, Looper promettait un spectacle de qualité et le retour de Bruce Willis à un cinéma plus ambitieux que ses derniers essais. Le réalisateur Rian Johnson, aussi scénariste du film, avait prouvé lors de ses deux précédents essais (le polar lycéen Brick et le thriller Une Arnaque presque parfaite) qu’il possédait un univers bien à lui et qu’il pouvait dès lors proposer quelque chose de neuf.

Looper remplit d’ailleurs plutôt bien son contrat pendant sa mise en place pétaradante. Le futur décrit parait suffisamment proche pour être crédible, et Joseph Gordon Levitt campe à merveille une version rajeunie de Bruce Willis sans recourir à un maquillage trop lourd. La présentation de l’univers des loopers est claire, et on se prend très vite au jeu. Mais s’attaquer à un film de science-fiction portant sur le sujet du voyage dans le temps est toujours un défi dangereux pour un réalisateur. Car dans ce genre, un scénario approximatif et manquant de rigueur peut très vite faire s’effondrer  tout l’édifice soigneusement bâti. Et de ce côté-là le scénario de Looper révèle assez vite ses limites, oubliant de vraiment développer son univers (les évolutions technologiques du futur n’ont pas réellement de justification), balançant des éléments d’intrigue sans les expliquer, et a priori juste pour raccrocher les wagons artificiellement (une partie de la population du futur a développé des dons de télékinésie limités, et alors ?) et surtout foirant totalement la partie « voyage dans le temps » du film (je défie quiconque d’expliquer la logique d’un final ne collant pas du tout avec ce qui a été expliqué auparavant). Des défauts très agaçants, mais qui ne font pourtant pas de Looper un mauvais film, Rian Johnson compensant par d’autres éléments très positifs.

Looper de Rian Johnson

Refusant de céder à la mode du « toujours plus », Looper préfère se concentrer sur ses personnages et son intrigue, quitte à laisser sur le carreau les spectateurs attendant un film d’action pétaradant, notamment lors du dernier acte se déroulant dans une ferme isolée. Rian Johnson arrive habilement à rendre son personnage principal très humain et finalement attachant (que ce soit sa version jeune ou vieille), et ce malgré son caractère assez détestable (durant la plus grosse partie du film, Joe n’est qu’un égoïste ne pensant qu’à son propre bien être sans se soucies des conséquences sur les autres) et ses choix parfois extrêmes (le jeune Joe vend son meilleur ami à la mafia, tandis que le vieux Joe assassine des enfants pour tenter d’altérer le futur). Il offre d’ailleurs à Bruce Willis son meilleur rôle depuis longtemps (probablement depuis Sin City) et à Joseph Gordon-Levitt une nouvelle opportunité de prouver qu’il est l’un des jeunes acteurs les plus intéressants du moment. Au milieu de ce duo de choc, et malgré une arrivée assez tardive à l’écran, Emily Blunt réussit à imposer un intéressant personnage de mère célibataire tenant d’élever un enfant pas comme les autres. Enfant qui d’ailleurs bouffe la vedette à ses partenaires adultes à chaque apparition. Le jeune Pierce Gagnon, dans un rôle pourtant très casse-gueule, fait preuve d’un naturel confondant, et arrive à effrayer le spectateur pour l’attendrir la minute suivante.

Looper de Rian Johnson

Malgré un côté référentiel parfois un peu envahissant mais aux influences variées (on pense bien entendu énormément à Terminator, mais aussi au Furie de Brian de Palma lors d’une des scènes clés du final, ou à la trilogie de la Malédiction), Looper propose suffisamment d’images marquantes (comme cet enfant couvert de sang caché dans un champ de maïs), et d’idée novatrices pour retenir l’attention. On pense notamment à la façon très originale et déviante que les membres de la mafia utilisent en début de film pour forcer une victime échappée à se rendre. Et surtout, Looper est visuellement plutôt ambitieux, Rian Johnson emballant des images léchées, tout en variant les décors (environnement urbain nocturne en début de film, ferme perdue au milieu des champs de maïs en fin de film).

Looper de Rian Johnson

Sans être le chef d’œuvre annoncé partout sur le net, Looper réussit néanmoins à rester dans les esprits grâce à ses personnages forts et à sa réalisation ambitieuse. Dommage qu’il soit handicapé par un scénario manquant de rigueur et se plantant dans ses divers paradoxes temporels…

Note : 7/10

USA, 2012
Réalisation : Rian Johnson
Scénario : Rian Johnson
Avec: Joseph Gordon-Levitt, Bruce Willis, Emily Blunt, Pierce Gagnon, Paul Dano, Jeff Daniels, Garrett Dillahunt

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