Autobiographie des objets, de François Bon

« Le monde des objets s’est clos. » Cette phrase a, bien sûr, un double sens : pour l’auteur, il s’agit d’abord des objets qui ont marqué sa propre existence et à partir desquels il peut écrire une espèce d’autobiographie, mais aussi qu’un certain rapport aux objets a disparu ces dernières décennies. En effet, si François Bon peut se souvenir du premier disque qu’il a acheté, la dématérialisation, la possibilité d’écouter des musiques sans support matériel et même sans achat modifie fondamentalement le rapport, par exemple, à la chanson. Il n’y a pas de nostalgie dans ce livre, François Bon choisit des objets qui, à la fois, lui rappellent sa propre histoire (père, mère, frères, grands parents, maisons de son enfance, voyages…) et peuvent renvoyer à l’histoire du lecteur. J’ai pensé plusieurs fois à certains textes de Georges Perec (« Je me souviens », « Les Choses ») et à un livre de Régine Detambel (« Marqueurs d’enfance »). Le style de François Bon est parfois heurté : l’élision de temps en temps du verbe être ou de quelques articles provoque cet effet. Avec ce livre, je saisis que le rythme des moteurs, les mouvements de la mécanique, les pièces qui s’entrechoquent dans des boites en fer où on les conserve, font peut-être ce même effet de heurts (de bon heurt, de mal heurt). C’est un livre qui donne envie d’écrire, François Bon animant des ateliers d’écriture s’y met lui-même à l’épreuve. C’est aussi un livre qui n’hésite pas à se frotter au présent, à « l’amas poussé à l’écroulement des livres qui ici m’entourent », mais aussi à cet ordinateur portable posé sur les genoux et sur lequel il écrit où qu’il soit.