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Back dans les BAC

Publié le 19 octobre 2012 par Wtfru @romain_wtfru

Back dans les BAC

Le scandale qui ébranle la BAC Nord (Brigade Anti Criminalité) de Marseille ne serait-il pas l’occasion de mettre un coup de pied dans la fourmilière et de jeter les corrompus avec l’eau du Vieux Port ? Avec trente membres, tous âgés de 25 à 50 ans, sous le coup d’une suspension administrative, 15 mises en examen et 7 détentions provisoires, « la BAC est au tapis » décrit Pierre-Marie Bourniquel, directeur départemental de la sécurité publique (DDSP). L’IGPN (police des polices) continue son enquête mais nous ne savons toujours pas combien de flics ont trempé dans la corruption. L’ampleur des dégâts est considérable car tout le monde « savait » et l’image de ce groupe d’intervention prend une réelle claque. « Quand tout le monde croque, ça finit par se savoir ». Ainsi, l’argument principal des avocats des prévenus est « pourquoi la hiérarchie n’a rien fait ? » Cette dernière se défend en expliquant qu’elle voulait laver son linge sale en famille. Il est maintenant trop tard et le coup de filet montre bien la volonté du ministre de l’intérieur, Emmanuel Valls, de faire le ménage chez les représentants de l’ordre. Les interventions s’organisaient de la manière suivante : l’interpellation du délinquant se suivait généralement de la devise suivante « donne nous ta sacoche et on en parle plus ». Certains agents ont donc amassés un véritable pactole composé de cannabis, bijoux, armes blanches et liquidités. Si une procédure faisait suite, il suffisait simplement de se servir avant le scellé.

Revenons maintenant sur la genèse de  cette brigade d’élite pour mieux en comprendre le fonctionnement et les raisons de cette affaire.

La France est l’un des rares pays à accorder une importance aussi grande à ses problèmes de sécurité intérieure. La reprise des thèses frontistes sur l’insécurité par la droite à conduit à l’utilisation de ce bras musclé de la police nationale pour reconquérir son électorat. Deux ministres de l’intérieur vont s’illustrer par cette pratique il s’agit de Charles Pasqua et de Nicolas Sarkozy. Beaucoup associent la BAC à sa cousine la brigade de nuit de Paris crée en 1971 mais elle est en réalité un corps de la police nationale à part entière crée en 1994 pour la BAC de nuit et en 1996 pour la BAC de jour. Elle est composée de gardiens de la paix armés et en civil à la recherche du flagrant délit dans les quartiers difficiles des grandes villes puis plus tard dans toutes les provinces.

L’image de la BAC est plus qu’ambigüe dans la police puisqu’elle est tantôt crainte par leurs pairs tantôt respectée. Tout dépend du point de vue, elle peut être perçue comme une brigade d’élite avec une entrée sélective basée sur des épreuves complexes ou à contrario comme un police brutale peu contrôlable, opérant à la limite de la légalité et dangereuse. En termes hiérarchiques, elle ne dépend que du chef de circonscription ce qui lui confère une très grande autonomie. Cette dernière conduit alors à décrire la BAC comme un Etat dans l’Etat  avec ses propres règles.

Le but initial, répétons-le, était de lutter contre la délinquance et la criminalité dans les quartiers difficiles usant du flagrant délit. Leur présence dans les quartiers est aujourd’hui complètement différente et la logique de leur fonctionnement est toute autre de celle instaurée ses concepteurs. Les contrôles d’identités et les fouilles au corps sont un élément de réponse. Souvent pratiqués de manière brutale et insultante, ils sont pratiqués en dehors des règles définies par le code de procédure. Les personnes interpellées ne répondent généralement pas sous peine d’être mises en examen pour outrage et rébellion. Les interpellations se font au faciès sur les populations habitant dans les cités ou les personnes d’origine étrangère ciblant ainsi des consommateurs de stupéfiants et des personnes en situation irrégulière. L’agressivité des policiers conduit à une crainte de la population qui reste tétanisée sous les assauts répétés. La fonction sociale de la BAC n’est pas la lutte contre l’insécurité mais l’instauration d’un ordre social ou chacun doit savoir trouver sa place et surtout ne pas en bouger. Les réactions démesurées de la police par rapport aux évènements et les expéditions punitives sont autant exemples qui illustrent le fait que l’ordre inégalitaire doit être maintenu.

La mise en cause de ces protagonistes dans les différentes affaires de corruption doit permettre une réelle refonte du système. Blâmer les forces de l’ordre pour avoir suivi les directives ministérielles motivées par la politique du chiffre serait aussi inutile que de tacler le problème de manière frontale sans en prendre la réelle mesure. Comprenons avant d’agir et surtout revenons au sens étymologique et strict du terme « gardien de la paix ».  


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