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Election de Copé : le scénario d’une UMP bousculée par l’UDI?

Publié le 20 novembre 2012 par Delits

Délits d’Opinion : Copé élu sur le fil, la motion « Droite forte » portée par G. Ddidier et G. Peltier qui arrive en tête. L’UMP a t-elle pris un tournant droitier ?

Emmanuel Rivière : Le fait que les adhérents UMP aient mis à égalité François Fillon au profil plus rassembleur et Jean-François Copé, dont la capacité de séduction se limite à la droite, suggère que les adhérents ont un positionnement plus à droite que les sympathisants. Et la désignation de Jean-François Copé positionne de fait la direction du parti plus à droite que si son adversaire l’avait emporté. La question se pose : est-ce que cela ne met pas en péril l’ensemble de l’édifice UMP, mis sur pied en 2002, et dont la vocation était d’en finir avec les divisions historiques de la droite qui contrastaient avec les modèles d’organisation politique en place chez nos voisins Allemands, Britanniques ou Espagnols.

La réponse doit être  nuancée, car le casting des soutiens dans chaque camp, pas plus que les débats, n’ont transformé  cette élection en  une opposition entre d’un côté les tenants d’une ligne social-libérale de centre droit et de l’autre une ligne droitière autoritaire. La présence autour de  J-F Copé, des principaux signataires de la motion France Moderne et Humaniste  L. Chatel, M. Tabarot, J. Leonetti ou encore J-P Raffarin et M-P Daubresse  montre que ce clivage existe y compris au sein du camp vainqueur. Il convient donc de voir comment  le résultat des votes  de dimanche façonnera le visage « décomplexé » que l’UMP offrira aux Français en général et surtout à ses électeurs, qui ont été en parti désavoués par ce choix interne.

Délits d’Opinion : Est-ce que Jean-Louis Borloo n’a pas des raisons de se frotter les mains ?

Emmanuel Rivière : Clairement, J-L Borloo est dans le jeu, avec un profil plus consensuel et une popularité plus établie, au moment où il pose les premières pierres de l’UDI. Quand on étudie les  cotes  d’avenir,  J-F Copé est distancé par François Fillon chez les sympathisants UMP, et fait jeu égal avec J-L Borloo chez les sympathisants de droite.  Ce dernier pourrait donc miser sur  une  recomposition on ne peut plus classique autour des trois droites, telles qu’on pouvait les connaître il y a quelques années.

Délits d’Opinion  : Mais existe-il encore un centre ? L’élection présidentielle de 2012  sème le doute.

Emmanuel Rivière : A contrario, l’élection présidentielle de 2007 a aussi montré qu’il y avait une place pour le centre ou en tous cas pour un candidat se réclamant du centre. En réalité, le système présidentiel est par nature bipolaire et  rend difficile la naissance d’un pur centre. Mais pour les français, J-L. Borloo, qui a été ministre des gouvernements Fillon, Villepin et Raffarin, est une personnalité de centre-droit. Jean-Louis Borloo n’est pas François Bayrou, son image reste meilleure à droite qu’à gauche.

L’enjeu est donc, non pas faire émerger un centre toujours fragilisé par le fonctionnement institutionnel, mais de voir si  l’UDI peut s’imposer dans des scrutins locaux ou nationaux comme première force politique à droite. Et dans cette perspective, les élections intermédiaires de 2014 et 2015 vont être clés. Les municipales sont caractérisées par une inertie des appartenances politiques des sortants. Mais, pour les européennes, le jeu est toujours très ouvert.  On se souvient qu’en 1999 les  listes souverainistes avaient devancé le RPR, et que le scrutin de 2009, vit le parti  Socialiste talonné par Europe-Ecologie. Le scénario d’une UMP bousculée par une liste de centre-droit n’est pas impossible, d’autant que la question européenne ne va pas être facile à traiter pour le  parti de J-F Copé, pris en étau entre l’UDI et le FN.

Délits d’Opinion : Est-ce que Copé a pris une longueur  d’avance pour 2017 ?

Emmanuel Rivière : J-F Copé a joué sa campagne en dissociant la présidence du parti et la désignation du candidat pour 2017. Mais sa  victoire lui donne une avance incontestable sur François  Fillon, qui pour sa part avait clairement placé la perspective de 2017 comme enjeu du scrutin. Elle lui confère une légitimité et lui offre des marges de manœuvres déterminantes. Pour autant, les conditions de sa victoire ne sont pas triomphales. Une bonne partie de commentateurs considèrent même  que le résultat  étriqué du scrutin laisse béante la porte que Jean-François Copé avait lui-même ouverte à un retour de Nicolas Sarkozy.

Et quand on se réfère au camp d’en face, on constate que la victoire arrachée par Martine Aubry en 2008, dans des conditions similaires, ne lui ont pas vraiment permis de se construire une stature de présidentiable incontournable. Et plus tôt, le destin présidentiel de Michel Rocard stoppé net en 1994, et celui de François Hollande qui doit renoncer à concourir en 2007 à cause du référendum de 2005 restent des exemples à méditer. Même dans l’opposition, diriger un parti n’est pas une rente de situation qui rende automatique la désignation comme candidat à la présidentielle suivante. On peut y essuyer des défaites et des revers rédhibitoires.


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