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Censure et censeurs… maîtres et serviteurs

Par Sergeuleski

   Quelques pistes de réflexion et de questionnement...

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(1)

Qui se souvient des censeurs ?


Personne.


Dans un système quel qu'il soit,  et quelles que ce soient son échelle et sa nature (un journal, un pays, une démocrassouille ou une dictature franche et directe comme le suffrage du même nom), le censeur est toujours méprisé et plus encore par celui qui paie son salaire, et toutes les élites avec lui, derrière cet employeur plutôt ingrat.

On n'aura pas manqué de remarquer ceci : les salaires les plus bas, appelons-les "salaires du mépris", c'est bien dans la police que les trouve, chez les matons aussi et les vigiles des supermarchés, ces derniers appartenant souvent aux minorités visibles - autre marque de mépris de la société qui confie ce travail à ceux qu'elle respecte le moins  -, car, dans les faits, c'est un travail que personne ne souhaite rémunérer et valoriser.

Les techniciens de surface partagent aussi leur sort ; eux, ils nettoient la merde, celle des autres. La merde dérange toujours ! car, avec la merde, on se sent tous visés, et en premier le pouvoir et l'argent même et surtout lorsqu'ils n'ont pas d'odeur (2).

Si l'esclave ou l'exploité finit toujours par mordre la main qui le nourrit, in fine le maître finit toujours par mépriser sa police ou son service d'ordre (Fouché/Talleyrand). Ce mépris à leur égard à tous, et ici, pour ce qui nous occupe... le mépris à l'endroit du censeur, vient du fait suivant : dans son "travail" on ne trouve aucune valeur ajoutée puisque le censeur n'a de cesse de retrancher. Sa contribution est purement négative et soustractive.

La censure, la vraie, ne cherche qu'une chose et n'a qu'un seul but : faire taire celui qui semble être sur le point de dire ce qui pourrait bel et bien être une vérité (vérité d'opinion ainsi qu'une vérité relative à des faits avérés...)... vérité jugée inaudible par celui pour lequel le censeur travaille car, soit cette vérité le concerne directement, soit cette vérité concerne des groupes d'intérêts que ce même employeur a toutes les raisons de craindre... craintes pour sa sécurité physique, son business ou bien encore, sa réputation  comme autant d'atteintes susceptibles de ruiner tout espoir de prospérité.

En ce qui concerne la presse et les médias, aujourd'hui, quand il est question de censure - et il n'est question que de cela finalement, les médias brillant par tous les feux de ce qu'ils ne disent pas ou mal -, il s'agit le plus souvent de chantage sur les emplois et les carrières.

Privé d'humour et d'ironie, primaire, le censeur ne fonctionne qu'au premier degré tel une trancheuse à charcuterie : pas de quartier ! Une tranche ou rien ! Quant à l'épaisseur de cette tranche...

Après la machine à jambon, voici la matraque du censeur-CRS qui s'abat sur ce manifestant... chercheur au CNRS qui a eu la mauvaise idée de mettre son nez dehors et de donner de la voix.

Le censeur a tout intégré de celui qui l’emploie, jusqu'à l'identification - il ne fait plus qu'un avec lui ; il a tout intériorisé de son employeur, et en premier lieu :  toutes ses craintes, toutes ses angoisses, toutes ses peurs et autres sueurs froides, tous ses partis pris,  toutes ses haines car, celui qui l'emploie, soyez en sûrs, est un craintif de premier ordre pour son petit commerce... faisant commerce de tout ; plus surprenant encore, il se pourrait bien qu'il soit lui-même au service d'un plus angoissé que lui ; et en ce qui concerne celui-ci, il s'agira plus précisément de terreur... terreur à l'idée que le masque de ce nouvel acteur d'une tout autre dimension cette fois-ci, ne tombe entre de mauvaises mains, comprenez... des mains vertueuses, éprises de justice, de liberté et de la vérité têtue des faits - ce qui est et... a été -,  car il y a fort à parier que le porteur de ce masque ait pour seule loi d'airain  : la connivence, la collusion, la cooptation, le trafic d'influence, la concussion, l'abus de confiance et les bombes.

En d’autres termes : tout pour sa gueule !

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La censure du censeur c’est aussi l'exercice du pouvoir par procuration car la censure est au pouvoir ce que le courage est à la corrida ;  corrida au cours de laquelle des milliers d'être humains très certainement lâches et veules au quotidien, toutes classes confondues (3) s'offrent trente minutes de courage sur le dos d’un taureau expiateur de leur lâcheté à eux tous, et d’un torero bravache, tendu comme un arc, arc- bouté à un orgueil aussi ridicule et désuet que rigide comme la féodalité... torero-serf (4) donc qui aura pris tous les risques qu'il soit possible de calculer au plus près des probabilités d’une mort aussi symbolique que chimérique en ce qui le concerne puisque... cela n’aura échappé à personne : c’est bien toujours le même qui cède et succombe (5), un genou à terre puis deux.

Torero dupe néanmoins car, bougie, il se croit "flamme" dans son bel habit de lumière alors qu'il n'en est que la cire, et pas davantage la mèche.

   Aussi, souhaitons  que le mépris puis l'oubli frappent le censeur plus sûrement et plus souvent que la mort le torero, à charge pour nous tous de cultiver un talent, voire le génie, qui célèbre et honore tout ce qui est rare, beau, difficile et courageux.

  

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1 - Contrairement à Maurice Clavel, on ne se retire pas du monde… on reste, on dénonce, le crachat en dernier recours une fois notre plume sèche.

2 - C'est comme ça,  on n'y peut rien ! Est-ce sans doute parce que tous les pouvoirs et toutes les fortunes reposent sur un tas de fumier ? Et du fumier à la merde... ou bien plutôt (respectons la chronologie !) ...de la merde au fumier...

3 - Qu'importe le niveau d'instruction de ceux qui fréquentent les arènes... on ne compte plus les discours aux justifications aussi fantasques que dévoyées autour de cet engouement pour la vache et son prisonnier, car nul n'ignore ceci : le barbare hautement civilisé a des arguments à nous revendre à chaque fois qu'il s’agit d’expliquer la tauromachie, la civilisation ayant fait de lui un bavard talentueux mais inconséquent. En revanche, regardez donc les grands primitifs : toute leur force et leur pouvoir ne sont-ils pas comme ramassés tout entier dans leur silence et parfois même, dans leur immobilité ?

4 - Rien de surprenant à cela : nombre d'entre eux viennent des milieux populaires ; d'autres encore... d'une adolescence délinquante.

5 – La corrida serait sans aucun doute un métier, un spectacle et un engouement respectables si le Torero mourait plus souvent ; disons… une fois sur trois, et le taureau « porté » en triomphe d’autant.


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