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Au Français, "La Place Royale" prend des allures de salle des fêtes...

Publié le 03 décembre 2012 par Fousdetheatre.com @FousdeTheatre

L'une des quatre comédies de Corneille, plus connu pour ses tragédies, nous est proposée au Vieux-Colombier. Si l'on peut affirmer que l'auteur, dans ce registre,  ne parvint à égaler ce que fit plus tard l'ami Jean-Baptiste Poquelin avec brio, évidence, légéreté, et cocasserie (la pièce paraît longuette et un tantinet alambiquée), la plaisante relecture contemporaine de l'oeuvre par Anne-Laure Liégeois et l'incomparable densité des comédiens Français, Denis Podalydès en tête,  nous permirent de passer une excellente soirée.

L'argument en quelques mots. Alidor aime Angélique, qui l'aime en retour. Le garçon, s'apercevant que de tels  sentiments le privent de sa liberté, élabore un stratagème pour jeter sa douce dans les bras de son ami Cléandre afin de la recouvrer (sa liberté...). Ce dernier qui fréquentait par défaut Phylis, aux multiples amants, est enchanté de la proposition. De son côté Doraste, frère de Phylis, convoite également Angélique. Le carnage sentimental ne tardera pas, conduisant Angélique directement au couvent...

Des sombres arcades de la Place des Vosges du 17ème siècle  aux parquets des "bals pop" ruraux chichement éclairés de la seconde moitié du 20ème, il y avait plus d’un pas que la metteur en scène n’hésita à franchir afin d’exposer et explorer ces chassés-croisés amoureux  cruellement, égoïstement  provoqués  et orchestrés par le désir fou d’un homme ne souhaitant être attaché à rien ni personne, pour maîtriser coûte que coûte ses desseins.  La transposition fonctionne. Cette contemporanéité, malgré tout intemporelle, rapproche habilement  le spectateur du propos de la pièce.

Par ailleurs, la volonté de recourir à des interprètes plus âgés que les personnages imaginés par Corneille (ils ont ici entre 40 et 50 ans) place d'office les protagonistes à l'heure de choix de vie essentiels. Malin. Les uns sortent apparemment triomphants de cette arène-salle de bal quand d'autres, le coeur saignant et le maquillage coulant, se réfugient au couvent.

L'esthétique de l'ensemble, enfin, un brin désuète, un peu moche, un peu kitsch, assez mélancolique, accompagne subtilement l'aspect sombre et dramatique de cette comédie. Là encore, bien vu.

Cela ne surprendra personne, Anne-Laure Liégeois dirige une équipe irréprochable. Tous manient le verbe et le vers de Corneille avec dextérité. Nous l'évoquions plus haut, Denis Podalydès est un Alidor torturé, magistralement habité, terriblement convaincu, effroyablement convaincant.  Florence Viala une Angélique entière, pugnace et touchante. Eric Génovèse campe un élégant Cléandre. Elsa Lepoivre offre à la gourmande Phylis toute sa jovialité. Clément Hervieu-Léger compose un Doraste fort drôle. Enfin Alain Lenglet, Benjamin Lavernhe et Muriel Piquart (Polymas muette et pailletée observant dans son coin l'intégralité de l'action, telle la copine qui garde les sacs...)  complètent harmonieusement la distribution.

Réussi. 

Jusqu'au 13 janvier.

Photo : Christophe Raynaud de Lage


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