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Arles, An I, par Samuël Berthet

Par Citl
J’ai un aveu à vous faire avant qu’il ne soit trop tard : j’adore mon studio de la rue du Cloître. Ce n’est pas de gaîté de cœur que je vous dit cela. Il m’en coûte d’autant plus que c’est avec ma mine bourrue, outragée que je me suis dévoué pour prendre « la seule chambre où il n’y a pas Internet »… Ne sachant pas rester contrarié bien longtemps, j’ai voulu que nous portions des toasts -aux allusions un peu lourdingues au studio que je déclarai trop chauffé, ou pas du tout chauffé, ou je-ne-sais-quoi-encore. J’avais pourtant utilisé toutes les ressources de ma mauvaise foi pour obtenir la chambre qui m’avait tapé dans l’oeil, avec quelques arguments épiques dont le principal, l’ultime, l’argument massue devait être : je suis photographe, moi –en français dans le texte-, il est donc évident que j’ai un besoin vital de Lumière, comme vous-autres d’affection ou de vos pains au chocolat, d’où il ressort que dois être au dernier étage, sic. Voilà comment mon règne me fût contesté par mes coreligionnaires traducteurs dès l’An I de notre installation « en Arles ». Je sais, je sais, « Avec l'amour maternel, la vie vous fait, à l'aube, une promesse qu'elle ne tiendra jamais ». On croit apprendre cette leçon à ses dépens, avant de savoir que c’est pour son plus grand bonheur…
Mais je bavarde, je bavarde comme à l’accoutumée et mes collégilionnaire (cf : Thibaud) iront dire que je radote en revenant à une histoire antédiluvienne (qui « remonte à Chaille », n’est-ce pas Ursula ?) aux vues du flot des micro-évènements qui nous a emporté depuis. Depuis, nous nous sommes mis d’arrache-pied dans nos travaux de traduction, corps et âmes dévoués à nos auteurs. Cela dit, la vue sur notre situation serait partielle et donc partiale (et paf ! cf : Mirna et l’égalitarisme) si l’on omettait de parler des à-côtés qui jalonnent nos journées studieuses.
Pour être court et ne pas lâcher la bride à mon babil légendaire, je m’en tiendrais à l’évocation de quelques éléments infiniment minuscules (cf : Zlatko).
Le premier, c’est la bibliothèque du Collège, que chacun habite à sa façon, amenant avec lui son viatique de rituels, de gris-gris. Je ne répondrai que de moi : mon bureau ressemble déjà à tous les bureaux que j’ai jamais eus et aimés, une lampe rétro sortie d’un univers vaguement Moëbius (cf : Marie), des livres en pagaille qui forment toute une cohue (-bohue, cf : Jelena) de présences familières, l’un juché sur ma tour d’ordinateur, les pieds ballants, les autres entassés, communiant dans de profonde arguties littéraires ; un, deux couteaux prêt à prendre d’assaut les pommes et autres victuailles qui composent sur mon bureau une nature morte pittoresque avec ma tasse à café, mes stylos et toutes les babioles dont je ne me sépare jamais puisque j’en trouve toujours de nouvelles pour peupler mon antre spirituelle. Ici, on se promène dans les rayons de la bibliothèque à n’importe quelle heure du jour et de la nuit et l’on peut même y croiser un japonais inconnu traduisant en cachette je ne sais plus quel auteur extravagant (cf : Pascale). Cette bibliothèque à disposition 24 heures sur 24, c’est un rêve exaucé ici par le Citl, que je bénie au passage de tant de sollicitude à l’égard des pauvres plumitifs que nous nommes. Qui s’est baladé dans ce dédale de livres, à une heure indue, se joindra à moi dans cette bénédiction.
La deuxième chose, c’est Arles et surtout pour moi la Camargue, que j’évoquerai plus longuement une autre fois : un fond inépuisable de paysages oniriques, dont mon canasson commence à connaître tous les chemins, marquant le pas à ce tournant, partant au galop dans cette clairière soyeuse comme une hanche de femme (cf :…), où l’on a alors l’impression de s’envoler avec les buses et les flamands roses et les mouettes dans un tourbillon de feuilles aux couleurs argentées, de nuages fantasques, d’eaux miroitantes, de coquillages éternels (cf : Milos)… 

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