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Rapport ACBD 2012 sur la #BD Numérique

Par Manuel Picaud
Rapport ACBD 2012 sur la #BD NumériqueNous fêtons aujourd'hui le 13e année du rapport annuel sur l'état de la bande dessinée en langue francophone concocté par Gilles Ratier assisté par quelques autres membres de la célèbre Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée. Pour cette année, j'ai notamment repris la totalité de la rubrique bande dessinée numérique. Voici donc un premier extrait du fameux rapport, un extrait consacré à l'évolution numérique du neuvième art francophone européen que j'ai rédigé et largement résumé. Chaque phrase nécessiterait en fait de vraies développements. Il faut bien sûr l'entendre comme une synthèse sur une matière bouillonnante. Les exemples sont loin d'être exhaustifs. Mille excuses à ceux que j'aurais omis.
L’émergence des bandes dessinées numériques offre de nouvelles pistes, mais leurs développements sont encore très hésitants !
Par analogie avec le livre numérique, la BD numérique pourrait se définir comme une bande dessinée éditée et diffusée sous forme numérique et destinée à être lue sur un écran. Dès lors, il faut distinguer la diffusion de la BD numérisée ou dématérialisée et la création de BD digitale. En 2012, la diffusion du 9e art sous forme digitale reste encore marginale. Selon une étude du MOTif (observatoire du livre et de l’écrit en Ile-de-France), 90% des lecteurs de bandes dessinées préféreraient le papier au numérique. Mais le piratage concerne 10 000 titres facilement accessibles, selon leur EbookZ 3 de mars.
L’offre légale progresse moins vite que l’offre pirate avec à peine 6 000 albums disponibles. Elle résulte des plateformes d'achat mondiales Amazon, Google Play et l'Apple Store, de la grande distribution (Fnac, Virgin, Cultura…), de quelques librairies généralistes (Gibert Jeunes, Dialogues, Chapitre, Furet du Nord…) et des magasins en ligne comme leslibraires.fr, librairie.immateriel.fr ou epagine.fr, mais surtout de quelques diffuseurs spécialisés.
Du côté de l’offre payante, Izneo regroupe désormais 19 maisons d’édition de bandes dessinées : les Humanoïdes Associés, Denoël Graphic, Futuropolis, Gallimard, Huginn & Muninn et Ici Même ayant rejoint ce leader en 2012. Izneo propose désormais un catalogue de 3 300 titres en entier, en direct ou via d’autres intervenants. Hachette Livre, diffuseur de Pika, Hachette et Mad Fabrik, a été rejoint par les groupes Glénat et Delcourt en début d’année et s’attaque aux défis de la transposition de ce catalogue BD en numérique et de sa distribution aux libraires indépendants et aux plateformes validées par les éditeurs, par l’intermédiaire de son ex-filiale Numilog(200 titres disponibles seulement). Le challenger Ave!comics a vu sa maison mère Aquafadas rachetée, en octobre, par le canadien Kobo dont la liseuse est commercialisée par la Fnac. Par ailleurs, digiBiDi continue de grossir son catalogue avec près de 4 000 titres proposés à la location et en preview. Enfin, l’application bdBuzz (plus de 100 000 chargements) prend de l’ampleur avec 3 200 titres à télécharger.
Lancée par le site d'hébergement de BD en ligne Webcomics (1 500 albums), lequel cherche des mécènes, l’offre de lecture gratuite, rémunérée par la publicité, se développe à l’instar de la plate-forme communautaire Youboox (50 titres) et surtout le portail spécialisé Delitoon (115 titres), conçu sur le modèle du Webtoon coréen.
Après plusieurs tentatives individuelles et collectives comme le feuilleton Les Autres Gens ou 8comix.fr qui se sont arrêtés en 2012 et la faillite de l’éditeur numérique Manolosanctis, la création spécifique de bandes dessinées pour le support numérique – hors blogs personnels - cherche de nouvelles voies comme l’application interactive Plumzi (utilisée pour le dernier Lucky Luke), le bonus de réalité augmenté avec Dassault Systems pour La Douce de François Schuiten, la fresque interactive et sonore pour L’Ouverture du Louvre à Lens de Will Argunas ou encore le site webellipses.comproposant une bande dessinée accessible uniquement par géolocalisation, à Metz. L’édition participative (crowfunding) se confirme avec Sandawe (28 projets, 500 000 € collectés), My Major Company (17 – 172 000 €) et Ulule (14 – 26 000 €) qui associent les internautes au lancement d’albums papier.
Avec le démarrage, en janvier, du magazine jeunesse de BD Numériques Amusantes et Gratuites (BD NAG), sous l’impulsion de Pierre-Yves Gabrion, et d’un hebdomadaire numérique de BD humoristiques, Mauvais Esprit, animé par Boris Mirroir et James, en octobre, l’une des tendances 2012 est la création de magazines numériques cherchant à dupliquer, sur le digital, l’essor des bandes dessinées de l’après-guerre par les périodiques. Franck Bourgeron, Olivier Jouvray, Kris, Virginie Ollagnier et Sylvain Ricard élaborent La Revue dessinée, un trimestriel numérique d’actualités en bande dessinée. Brüno, Gwen de Bonneval, Cyril Pedrosa, Hervé Tanquerelle et Fabien Vehlmann préparent Professeur Cyclope, un magazine numérique de fictions en bandes dessinées... Les modèles économiques se construisent grâce à un contenu partiellement payant, par des abonnements ou, encore, par des financements publicitaires.
Cependant, de nombreux obstacles et questions n’ont pas été résolus. Le marché attendait des liseuses couleurs plus abordables de meilleure définition ou dimension, une offre élargie, une clarification des normes avec transportabilité des formats numériques et un prix attractif, que les opérateurs souhaitent unique.
Cherchant à lutter contre le piratage, notamment des mangas, et confrontés à leur autoconcurrence avec le livre papier, les éditeurs veulent conserver leur place et les auteurs défendre leurs droits pour une rémunération plus équilibrée. Les négociations s’enlisent entre le SNE (syndicat des éditeurs) et le SNAC (syndicat des auteurs), plusieurs écueils polluant le débat, comme la numérisation d’office des œuvres indisponibles et la signature d’un contrat séparé d’édition numérique.
Au final, 2012 aura permis de poursuivre de nouvelles pistes et d’entamer un dialogue entre les acteurs, sans pour autant dégager une vraie tendance, ni aboutir à des accords. On s’attend, dans un futur immédiat, à une réflexion du droit d’auteur européen adapté à l’évolution numérique, à des décisions du Ministère de la Culture ou au lancement de deux nouveaux supports de BD numériques et de l’espace E.Leclerc
Toute la filière du livre se transforme donc, afin de réagir au mieux à la prépondérance imminente des nouvelles technologies et des soubresauts de l’économie. Cela génère, quelquefois, confusion et incompréhension entre les différents acteurs du secteur de la bande dessinée francophone ; d’où un contexte encore nébuleux qui permet, aux esprits réducteurs, d’agiter les habituels démons de l’édition : crise, surproduction, concentration et inflation.
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2012 - Une année de bandes dessinées sur le territoire francophone européen
© Gilles Ratier, secrétaire général de l’ACBD et Manuel F. Picaud / acbd.fr


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