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Les rencontre de l'Orme(2)

Publié le 04 avril 2008 par Pierre Mounier

Suite des rencontres de l'Orme avec un atelier de l'après-midi sur la question du partage et de l'échange dans la chaîne de production éditoriale numérique. Ici, on est davantage dans la présentation d'expériences (tant mieux).

Première présentation, par Odile Chenevez, coordonnatrice CLEMI dans l'académie d'Aix-Marseille, sur une expérimentation de production d'un journal d'établissement avec Spip. Plusieurs choses très intéressantes dans cet exposé : tout d'abord, cette idée que la forte séparation entre espace privé et site public qui caractérise ce CMS par rapport à d'autres, ou aux wiki, fonctionne très bien dans un contexte pédagogique, car, et la distinction entre les trois niveaux de validation de chaque article renforce cette dimension, il permet d'éduquer les élèves à la responsabilité de la publication. Autre chose, l'intervenante montre que les professeurs qui encadraient l'initiative étaient très inquiets du plagiat des contenus sur Internet. Or, ce que montre cette expérience, c'est que ce sont les élèves eux-mêmes qui, par le biais du forum interne, se sont auto-régulés directement, alors que les enseignants semblaient relativement dépassés par le phénomène. Autre chose intéressante, les capacités linguistiques des élèves (de l'expérimentation en question) apparaissent de manière frappante en comparant les textes que les élèves ont produit pour ce journal de classe et leur propre Skyblog. Les deux derniers points mettent en évidence la réalité des compétences numériques d'un certain nombre d'adolescents qui peuvent être capables d'adapter leur niveau de discours aux différents espaces de publication dont ils comprennent bien ce qui les distingue, ou savent identifier les comportements inacceptables (ainsi pas exemple une tentative d'usurpation d'identité sur un forum).

L'exposé suivant, proposé par Laure Endrizzi de la Cellule Veille Technique et scientifique de l'INRP, dont Homo Numericus avait remarqué un des derniers textes, porte sur Wikipedia. Malheureusement, il s'agit seulement d'une présentation, informée certes, de l'encyclopédie en ligne. Un des points importants sur lesquels elle insiste, ce sont les mécanismes internes à l'initiative qui visent à dégager ou mettre en valeur les parties de meilleure qualité de l'encyclopédie : les portail, le projet Wikipedia 1.0 (qui "fixe" les articles de qualité et en font un export distribué sur DVD), les labels de qualité, et les projets thématiques. Bref, l'idée est la suivante : ce qui donne de la qualité et qui se développe dans Wikipedia, ce sont les projets collectifs et concertés qui organisent l'acte éditorial plutôt que de le penser comme l'agrégation d'actes individuels. Dernier point important, ce travail collectif au sein de l'encyclopédie porte à la fois sur les contenus à promouvoir par ce que de qualité, et sur les articles qui ne le sont pas et qui sont à supprimer.

Troisième présentation : Sophie de Quatrebarbes, de l'association Deci-dela, présente un projet baptisé « le médiateur éducatif ». Son association conçoit, en partenariat avec un éditeur des contenus éducatifs multimédias (sites et cd-rom) sur des thèmes spécifiques. Dans le processus d'édition de ces contenus, cette association cherche à améliorer l'interaction avec les enseignants, les « remontées du terrain » comme on dit. Il s'agit donc d'ouvrir une plate-forme de blogs permettant aux enseignants d'échanger leurs idées d'usages de ces contenus (comme l'organisation d'ateliers, etc.) L'ensemble de ces blogs sont agrégés sur un portail afin de donner plus de visibilité aux pratiques pédagogiques dont ils rendent compte. L'initiative en est à ses débuts. La question qu'elle se pose porte sur le manque d'enthousiasme des enseignants à communiquer sur leurs pratiques et leurs expériences ; bref, cette initiative ne semble pas avoir le succès escompté.

Odile Chenevez prend la parole pour répondre à ces interrogations. En gros, la réponse est simple : quel est l'intérêt des enseignants à contribuer chez/pour un éditeur de contenus ? C'est simplement à cette question qu'il faut répondre.

Finalement, le débat s'engage sur la question de la construction de l'autorité, en particulier sur Wikipedia. Laure Endrizzi évoque la manière dont l'autorité sur l'encyclopédie en ligne n'est pas du tout construite sur la biographie du contributeur, mais bien plus sur l'historique de ses contributions sur Wikipedia. Elle évoque le Trust Coloring Tool, un système de calcul automatique de l'« autorité » d'un contributeur en fonction de la pérennité de ses contributions. Le résultat de ce calcul est ensuite manifesté par une coloration progressive des contributions. Ainsi, sur un article, on pourra voir certains passages plus ou moins colorés en fonction de l'autorité dont jouissent leurs auteurs. On pourra donc en déduire qu'ils sont moins fiables.

Une première réaction me vient à l'esprit : ce mécanisme de construction de l'autorité par agrégation d'actes individuels est contradictoire avec les initiatives éditoriales qu'elle a évoquées précédemment. Finalement, c'est l'aspect qui me semblait le plus intéressant dans cet atelier : le partage et l'échange dans la chaîne de production éditoriale, peuvent être encouragés de manières très différentes.


Crédits photo : « Power law of participation », par Ross Mayfield, sur Flickr en CC by-nc 2.0


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