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Les Bêtes du Sud Sauvage

Publié le 29 décembre 2012 par Tempscritiques @tournezcoupez

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C’est par la vision de Hushpuppy, fillette de 6 ans, que nous entrons dans l’univers des Bêtes du Sud Sauvage.Dès ce prologue explosif, l’ambiance du Bayou est palpable ; le rapport traditionnel à l’espace qui nous entoure est complètement bouleversé. A travers le regard de cette gamine atypique, le monde est transfiguré ; la subjectivité est fortement marquée à l’image par des mouvements de caméra à l’épaule, un travail organique sur le son et des jeux de mise au point déboussolant.

La voix-off qui accompagne le film possède toute la force de celles de Malick dans Les Moissons du Ciel ou la Ballade Sauvage. Loin d’alourdir les séquences, cette voix participe à l’atmosphère de l’œuvre, avec son parlé singulier et ses expressions imagées, elle présente une vision radicale du monde.

Les images chancelantes oscillant entre origine et fin du monde font des Bêtes du Sud Sauvage une véritable épopée

C’est bien ce que propose le film de Benh Zeitlin : la redécouverte de la complexité et de la beauté primitive du monde, une écoute des bruits de la terre, de ce qui se cache derrière l’écorce, sous le béton. Dans la même veine que le cinéma de Malick ou de Nichols, Les Bêtes du Sud Sauvage témoigne de la création et de la perte d’un monde. Il s’agit de filmer l’évanescent, la beauté de l’instant, de se retenirà tout ce qui part au fil de l’eau. Reconstruire sans cessesur les ruines d’une vie et s’attacher à ces riens. C’est ce qui donne au film l’effet magique qui fait que chaque image semble unique, exceptionnelle. Pendant la projection on a déjà une envie irrépressible de revoir les séquences, de vouloir arrêter quelques instants la machine pour profiter de la force des images.

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Le film entraîne dans un tourbillon de couleurs, de sons et d’émotions. De bric et de broc mais fait d’une énergie débordante, Les Bêtes du Sud Sauvage est un film organique. La matière et le vivant sont palpables. Zeitlin se place au plus près des êtres : il ponctue les scènes de gros plans sur le pelage des animaux ou sur la terre fourmillante. Le travail de la photo rend compte de l’aspect aquatique et surnaturel des scènes de déluge. Jusque dans la bande originale et le montage sonore, l’œuvre fait entendre le bruit du monde, les battements du cœur de chaque être vivant. Tout palpite à chaque instant.

Quvenzhané Wallis, la toute jeune actrice qui porte le film possède une grande spontanéité et une force incroyable. Elle joue avec une sorte de rage fière et effrontée, se tenant toujours droite malgré les rafales et les coups durs. Son honneur réside dans le fait d’être encore là, sur les ruines du monde qui l’a construite et l’on sent dans chacun de ses gestes son attachement viscéral à cet univers. Tous les héros sont en symbiose avec ce monde. Les déraciner de ce lieu revient à leur arracher une partie d’eux-mêmes. C’est dans cette nature cruelle et sauvage qu’ils sont pleinement vivants. Fabuleuse troupe de Robinson Crusoé, ils donnent à cette nature une dimension mythique et fantastique.

Les images chancelantes oscillant entre origine et fin du monde font des Bêtes du Sud Sauvage une véritable épopée.

Mona J.

Les Bêtes du Sud Sauvage – réalisé par Benh Zeitlin – avec Quvenzhané Wallis


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