Magazine Culture

Pour 98 petites voix de plus

Publié le 20 novembre 2012 par Blasphereblog @Blasphere_Blog

98 voix…sur 175 000 votes. L’élection du nouveau président de l’UMP vient de s’achever dans une forme d’hystérie générale où chacun s’est vu gagnant avant l’heure. Il aura fallu plus de 24 heures pour compter, recompter, décompter les voix, et que la désormais fameuse COCOE prononce les résultats définitifs. Mais comment a-t-on pu en arriver là ? Retour (presque) heure par heure sur ces deux folles journées.

A 9h, Copé et Fillon, après quelques semaines d’insultes se la jouent cool-détendu. Ils se félicitent de l’affluence et appellent déjà au rassemblement quelque soit le vainqueur. Il était tôt dimanche et tout le monde pensait que ce soir à 22h, l’UMP aurait son nouveau président dans la joie et la bonne humeur. Cette insouciance n’a duré qu’un temps.

Pour 98 petites voix de plus

Ils étaient si contents de voter

A 15 heures, des premières piques partent du camp Fillon. Le scrutin ne serait pas organisé comme il faut, les queues se forment devant les urnes, certains mettent plus d’une heure pour pouvoir voter. Copé relève à peine l’attaque, selon lui, Fillon n’aurait que l’insulte à la bouche. A ce moment-là on se dit que c’est la tension d’avant résultat qui commence à monter. Rien de plus normal, et personne ne voit arriver la grosse tempête, celle qui va faire passer cul par dessus tête à l’UMP.

A 17h, Fillon vote enfin. Il aura, lui aussi, attendu plus d’une heure avec les simples partisans. On sent que la moutarde commence à lui monter au nez. Faut dire que passer une heure à attendre dans une file scrutée par une dizaine de caméras, il y’a mieux comme dimanche après-midi. Tu vois, moi, j’ai regardé le match OL-Reims bien enfoncé dans mon canapé, c’était bien. Mais je m’égare…Donc Fillon est là dans la queue, et il ne sait pas quoi faire. On sent bien le regard embêté du mec qui est devant les caméras et qui sait pas vraiment comment se comporter (un peu comme quand un mec en soirée filme tout le monde et quand il arrive devant toi tu te dis « Oh mon dieu ! Qu’est-ce que je fais ? Qu’est-ce que je fais ? Je vais trop avoir l’air con/conne »). Doit-il jouer la connivence avec les journalistes, faire comme s’il ne les voyaient pas, commencer à gueuler toute suite contre l’organisation…

A 18h, le dépouillement n’a pas commencé que les lieutenants de Copé accusent déjà les fillonistes de tricherie à Nice. Qui dit lieutenant de Copé, dit style Copé…Autant dire que ça se la joue plutôt roquet enragé sans subtilité. Sur les chaînes d’infos, on commence à sentir la mayonnaise monter. Va-t-on revivre l’épisode Royal/Aubry de 2008 ? Tout le monde l’espère mais personne n’y croit encore.

Pour 98 petites voix de plus

Compter les voix de l’UMP ? Impossibru !

A 19h, les bureaux de vote voient leur ouverture prolongée. On comprend que les résultats vont arriver plus tard que prévu. La langue de bois est de sortie sur tous les plateaux télé. Oui, on sera réuni après les résultats mais pour le moment « le camp d’en face vous êtres vraiment des nuls vous savez pas organiser une élection ! » ou « vous êtes des tricheurs ! Une sale bande de tricheurs ! Vous salissez l’UMP » (ceci n’est pas un verbatim de ce qui s’est dit, seulement un résumé décrypté des différentes déclarations).

A 20h, tout le monde a triché. La guerre est déclaré, chaque défaite dans un département est contesté par l’autre camp. L’Oise est devenu un « swing state » comme l’Ohio. On sait maintenant que le résultat de la soirée ne sera pas le bon, que tout le monde va se déclarer gagnant dans les minutes qui viennent. Et ça ne loupe pas, Copé s’annonce vainqueur avec 1000 voix d’avances. Fillon annonce que d’après les informations des bureaux de vote, il serait devant. On sent la mine déconfite des reporters d’I-Télé et de BFM qui savent maintenant qu’ils vont passer la nuit sur place.

A 21h, la COCOE fait son apparition. Personne ne sait vraiment ce que veut dire cette acronyme, mais tout le monde le trouve drôle. C’était la dernière touche burlesque qui manquait à cette journée.

A 22h, on commence déjà à recompter les votes. On analyse les procès-verbaux des résultats. Et surtout on apprend que Maitre Nadjar, le fameux huissier de la Nouvelle Star, a été appelé dans un bureau de vote. On ne se refuse rien à l’UMP, pas même les plus grandes stars.

A 23h, tout le monde abandonne, sauf la COCOE. Qui compte, et recompte, toujours. Les candidats en appellent à la COCOE pour toutes les occasions. Un mauvais résultat dans l’Oise, on appelle la COCOE. La Somme a fini de voter, on appelle la COCOE. Elle est partout.

A 8h, le lendemain, on apprend que la COCOE a fait une pause. Elle reprend ses travaux à 10h. La Gauche se frotte les mains, le FN aussi.

Pour 98 petites voix de plus

Valoche commence à perdre un peu confiance

A 12h, on apprend que le résultat sera sûrement donné dans la soirée. L’UMP a enfin compris qu’elle commençait légèrement à se ridiculiser devant toute la France. Alors tous les lieutenants sont appelés pour aller combattre l’incendie, trop tard. Leurs appels au rassemblement semblent à côté de la plaque, l’UMP est un parti divisé en deux. Certains en appellent à un nouveau vote, d’autres à la mise en place d’un collège de vieux sages pour contrôler les votes et remplacer la COCOE. Oui ce n’était pas déjà assez ubuesque. D’autres aimeraient voir l’UMP gouverné par les deux camps, comme ça pas de vainqueur, ni de perdant.

A 15h, rien ne se passe. A part la COCOE qui compte.

A 22h, le résultat tombe. Jean-François Copé est roi du monde ! Enfin président de l’UMP, comme avant. 98 voix séparent les deux hommes, bien loin des 1000 voix annoncées la veille. Il se la joue place au rassemblement, il ne s’est rien passé de ridicule, ni de grave ces deux derniers jours. Mais on ne réconcilie pas deux hommes qui viennent de se monter dessus pendant deux jours. Et Fillon, de toute façon, il boude.

Pour 98 petites voix de plus

Copé est content, Copé a gagné

12h, mardi, Jean-François Copé fait une bonne blague à François Fillon. Il lui propose de devenir son vice-président, genre « hé on est les meilleurs amis du monde maintenant que tout ça est fini…Et puis ça me donnera l’occasion de te rappeler continuellement que tu as perdu et que tu restes mon sous-fifre ». Ce qu’il ne savait pas JCF, c’est qu’il allait nous énerver notre Droopy.

15h, mercredi, Laurent Wauquiez, Valérie Pécresse et Eric Ciotti réunissent la presse. Et l’annonce est de taille: François Fillon revendique à nouveau la victoire. Les lieutenants affirment que les départements d’outre-mer n’ont pas été comptés…ce qui est dommage quand on sait que les quelques milles voix supplémentaires donne François Fillon gagnant avec 26 voix. Plus de 100 000 votants et seulement 26 voix d’écarts, normal…

20h, les deux rôles principaux de la sitcom UMP s’invitent aux JT de 20 heures. Jean-François Copé choisit France 2 et François Fillon TF1. On pensait que ce serait une nouvelle bataille de mots, quelques effets d’annonce et on en serait quitte pour une accalmie progressive. L’UMP n’allait pas continuer à se ridiculiser de la sorte, faudrait être vraiment têtu et peu futé. Apparemment, c’est le cas. François Fillon se fait un kiffe incompréhensible: il ne veut pas accepter la présidence de l’UMP si le recompte des voix le donne gagnant mais en même temps il ne veut pas que Copé reste à la tête du parti. Il propose de mettre Jupé en tant qu’arbitre du conflit. Si on change de chaîne, Jean-François Copé, lui aussi kiffe,sa vibes. Et il attaque directement sur le dépouillement effectué à Nice. Il est peut-être possible qu’il y ait eu un léger bourrage des urnes. La démocratie à l’UMP, c’est pas pour tout de suite.

15, jeudi, le directeur du cabinet de Jean-François Copé donne une conférence de presse. Et là, devant toutes les caméras des chaines d’infos, Jérôme Lavrilleux se met à sortir des photocopies de ce qu’il appelle des preuves de bourrage massif des urnes. Mieux que le théâtre, les Ch’tis à Mykonos ou la grève de Knysna, on passe un nouveau cran dans le grand déballage en public. De son côté François Fillon ne veut plus voir les votes recomptés par la COCOE, un organe contrôlé en sous-main par les copéistes.  On ne se demande plus qui sera le président de l’UMP mais si le parti de droite va survivre.

20h, Alain Juppé lance un ultimatum aux deux opposants: il se propose de présider une instance collégiale chargée de réexaminer les résultats sous dix jours. Et il semblerait bien que la solution proposée soit acceptée. Vivement le prochain épisode.

Pour 98 petites voix de plus

Et pendant ce temps-là, Nicolas Sarkozy regarde tout ça à la télé



Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Blasphereblog 112 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte