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Lincoln : L’Homme Qui Tua L’Esclavage (Lui Aussi)

Publié le 30 janvier 2013 par Wtfru @romain_wtfru

lincoln

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Réalisé par Steven Spielberg
Écrit par Tony Kushner
Avec Daniel Day-Lewis, Sally Field, Joseph Gordon-Levitt, Tommy Lee Jones, David Strathairn, …
2h30

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Résumé
Alors que la Guerre de Sécession fait rage dans le pays, Abraham Lincoln, président fraîchement réélu, tente coûte que coûte de faire passer le 13ème amendement pour abolir l’esclavage aux Etats-Unis. Une stratégie qui va s’avérer payante, mais qui va malheureusement lui coûter cher

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Avis
Alors que Tarantino utilisait, il y a quelques semaines, la fiction pour nous rappeler ce que fut la lutte contre l’esclavage (quitte à modifier une partie de l’Histoire par goût de la provocation), Spielberg, autre grand ponte du cinéma outre-Atlantique, lui, préfère opter pour l’Histoire avant tout, quitte à s’écarter peu à peu de la fiction.
Lincoln était-il vraiment un projet qu’il fallait mettre entre les mains d’un réalisateur aussi patriote que Steven Spielberg ?
Après visionnage, on a de sérieux doutes…

Lincoln pourrait être résumé, en un sens, comme un anti- Django Unchained.
Là où le film de Tarantino fait tout pour apparaître jouissif, décapant et divertissant, celui de Spielberg s’acharne à ne rien proposer d’attrayant, si ce n’est via quelques joutes verbales, une photographie superbe, et un jeu d’acteur étincelant.
Au final, ne serait-il d’ailleurs pas plus juste de qualifier ce film de dernière œuvre de Daniel Day-Lewis plutôt que comme étant le dernier long métrage de Spielberg ?
La réponse est évidemment oui !
Qu’aurait été ce Lincoln si Daniel Day-Lewis n’avait pris, in extremis, la place de Liam Neeson, longtemps rattaché au projet (et qui préfère désormais cabotiner et faire les yeux noirs dans les productions Besson) ?
L’acteur doublement oscarisé possède cette qualité dantesque qui lui permet de se rattacher à n’importe quel rôle, et un pur talent de créateur qui, s’il n’est pas bien tenu, a tendance à surplomber le film et à laisser tout le reste à la ramasse.

C’est exactement ce qui se passe dans ce Lincoln : Day-Lewis fait son numéro (absolument brillant, ça, tout le monde en conviendra), mais c’est tout ce qu’on retrouve ici.
Spielberg semble autant en admiration devant l’acteur que nous, et il en oublie totalement son film (2h30 de parlotte monocorde, faut pas exagérer non plus !).
On voit également tous les américains vanter les mérites du scénario de Tony Kushner : il y a vraiment quelque chose qui ne va pas chez eux !
Bien sûr ce scénario n’est pas mauvais (on y trouve des passages très intenses qui auraient pu donner une véritable ampleur au film), mais il s’appuie constamment sur la mollesse et sur les pires clichés du cinéma traditionnel américain.
Que dire par exemple de ces passages dans la Chambre des représentants, déjà vus mille fois à l’écran, ou bien encore de cette présentation des sénateurs démocrates susceptibles de voter pour le 13ème amendement (scène qui brille constamment par son manque d’originalité).
Spielberg est considéré comme un cinéaste classique, mais il ne faut pas abuser malgré tout !

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LINCOLN

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On en revient donc encore une fois au même point : ce film n’est pas le film de son réalisateur, mais celui de son acteur principal !
Enfin, c’est peut-être un peu exagéré de dire cela : il serait sans doute important de préciser que Daniel Day-Lewis n’est pas le seul à briller ici, et que sa partenaire Sally Field (qui interprète sa femme dans le film, et qui est, elle aussi, doublement oscarisée) offre également une performance digne d’éloges.
Quel dommage cependant que la plupart des seconds rôles ne suivent pas… Joseph Gordon-Levitt, dont le personnage n’a strictement aucune importance, est ici d’une platitude exemplaire, Tommy Lee Jones cabotine encore plus que d’habitude (comment a-t-il pu recevoir le Screen Actors Guild Award ? A moins que ce ne soit grâce à sa perruque…), quant au petit Gulliver McGrath, il est finalement bien plus agaçant qu’autre chose.

La seule chose que réussi pleinement Spielberg (hormis le fait d’être toujours un excellent faiseur d’images), c’est de parvenir à utiliser au mieux les capacités de son héros.
Non seulement il le filme de la plus belle des façons (à l’instar de Ford filmant Henry Fonda dans Vers sa destinée… le lien via les jambes est évident), mais il parvient également à nous faire ressentir l’aura de Lincoln (à moins que ce ne soit celle de Daniel Day-Lewis ?) durant tout le film, et en particulier durant les séquences où il n’est pas à l’écran (et elles sont nombreuses).

Spielberg est un humaniste, un patriote, un américaniste convaincu. Pour lui, comme pour des millions d’autres américains, Lincoln est une légende, un demi-dieu. Et même s’il ne cherche nullement à glorifier ses actes ou sa politique, il s’efforce, malgré tout, de nous faire décrire un personnage mystique et au-dessus des hommes (il n’y a qu’à noter la façon dont les personnages parle de lui en son absence).
Il ne nous montre pas un homme idéal, mais il l’idéalise constamment. Il ne nous présente pas un Saint, mais il le sanctifie durant 2h30.
En clair, et en résumé, Lincoln, c’est long, c’est pas forcément passionnant, et comme le dit si bien cette affiche parodique, c’est surtout un film qui va faire rentrer Daniel Day-Lewis dans la légende.
Décidément, les films de Spielberg se suivent et ne se ressemblent pas…

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