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Le sermon sur la chute de Rome

Publié le 18 novembre 2012 par Patrickmottard @patrickmottard
Le sermon sur la chute de Rome
N’en déplaise aux esprits chagrins, il n’est pas fatal que le Goncourt soit un mauvais livre choisi par défaut dans le petit cénacle des représentants des grandes maisons d’édition. Aussi, même si ce n’est pas une habitude, il m’arrive de lire le lauréat de l’Académie quelques jours après sa consécration chez Drouot (voir, sur ce blog, « Houellebecq ou le Goncourt Vache qui rit »).
Cette année, ma suppléante Joëlle Vacca, grande passionnée de littérature, m’a conseillé… et offert l’édition 2012 « Le sermon sur la chute de Rome » (Actes sud) de Jérôme Ferrari. Après lecture, je peux le dire sans ambages : ce livre – malgré une pagination assez réduite – est un grand livre.
L’histoire démarre comme un roman de Giono qui se déroulerait en Corse avant de basculer dans un universel troublant et dérangeant.
L’action se passe dans un village de l’Ile de Beauté où deux amis parisiens originaires de Corse décident d’abandonner leurs études (de philosophie) pour reprendre la gestion d’un bar perdu dans la montagne. Fidèles à Leibniz, ils veulent faire de leur rade « le meilleur des mondes possibles ». Mais, après une période idyllique, l’utopie va virer au cauchemar.
Aucune folklorisation qui aurait pourtant pu être encouragée par l’actualité insulaire même si l’un des héros « ne veut pas quitter son village pour aller s’enterrer dans un autre village désespérément semblable, accroché comme une tumeur au sol d’une île où rien ne change car, en vérité, rien ne change ni ne changera jamais ».
A des années lumière du roman provincial, Jérôme Ferrari fait de sa petite histoire de bistrot une somptueuse illustration du sermon de Saint Augustin, « Sur la chute de Rome », celui-là même qui explique la tragique propension de l’âme à se corrompre et la malédiction qui condamne les hommes à voir s’effondrer les mondes qu’ils édifient, « cette nouvelle inconcevable que des hommes existent encore mais que leur monde n’est plus ».
Paradoxale, l’écriture est à la fois sèche et riche, brutale et sophistiquée. Elle est parfaite pour disséquer tout un monde pathétique et même dérisoire aux prises avec un destin de tragédie grecque.
A lire. Le plus vite possible.

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