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Cogan : Killing Them Softly (Andrew Dominik, 2012)

Par Doorama
Cogan : Killing Them Softly (Andrew Dominik, 2012) Dans l'Amérique de Bush, deux petits truands braquent un cercle de jeu pour le compte d'un troisième. Le milieu de la pègre fait appel à Jackie Cogan pour trouver les responsables et leur faire comprendre leur erreur.
Thriller cynique et désincarné réalisé par Andrew Dominik, à qui l'on doit le sublime L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford, Cogan Killing Them Softly laissera sceptiques bien des spectateurs. Sorte de cousin de Tarantino, teinté de quelque chose des frères Cohen pour l'ironie qu'il dégage et son humour discret, Cogan Killing Them Softly est stylé, sombre, bavard, et furieusement désenchanté. Andrew Dominik est un homme dont la rédaction va guetter les prochains films avec attention et fébrilité...
Bien sûr il y a la forme de Cogan Killing Them Softly... Ses décors vides, ses quartiers transformés en no man's land, créés par les effets d'une économie en manque de souffle. Il y a aussi, ces discours de la présidentielle de 2008, McCain-Obama, omniprésents en fond sonore, sur une affiche ou un écran, pour souligner une Amérique malade et crispée, dont le Millieu ressent aussi les effets. Etonant paysage que ces gangsters qui évoquent les difficultés économiques du pays comme un paramètre indissociable de leurs affaire... Et comme c'est la deuxième fois qu'une de leurs affaires est braquée, le Millieu doit cette fois agir avec force pour éviter la répétition malheureuse qui nuit à leur prospérité. Cogan est celui qui exécute pour des décideurs (par ailleurs peu décidés ici !), mélange de jeunesse et d'efficacité dont l'expérience se limite à sa "discipline" et quelques visions générales du fonctionnement des choses...
"Moins de blah, blah, plus d'action" n'est pas ce qui caractérise PAS Cogan Killing Them Softly ! De longues scènes de conversations ordinaires, aux dialogues ciselés, rappellent l'univers de Tarantino et donnent à ces gangsters ce que leurs actions ne laissent pas percevoir : doutes, tergiversations, fonctionnement, problèmes et points de vue personnels, ou même encore sur le système... Ce ronron ne sera que rarement troublé, mais le changement de registre sera radical ! Un braquage en apnée, un passage à tabac froid et brutal (presque amical...), une exécution opératique et deux autres babioles inhérentes au Milieu... Cogan Killing Them Softly est un océan de calme et d'inaction, traversé de petits tsunamis ponctuels, mais ravageurs. Le tout filmé avec un style et un soin extrêmement travaillé (on se souvient encore de la gueule de L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford) comme l'exécution à un feu rouge ou même une superbe conversation avec un junkie... Cogan Killing Them Softly à du style, des couilles et du fond ! Il interpelle, stimule et surprend en jouant à fond sur un rythme distendu qui lui sied particulièrement bien.
Traversé de de paumés, de dépassés, ou de personnages presque désincarnés, froids et cyniques, Cogan Killing Them Softly tranche radicalement avec le lot des thrillers qui peuplent nos écrans. L'exercice y est ici virtuose, et bien que le Millieu règle y ses comptes, Cogan Killing Them Softly semble traiter de tout autre chose : de l'Amérique usée, des hommes fatigués... Il n'y a rien de positif dans Cogan Killing Them Softly, aucun personnage lumineux, ils s'effacent tous derrière un système et semblent ne retrouver d'espace de liberté que dans les mots qu'ils échangent entre eux ! Alors c'est sûr, on peut s'éloigner d'un thriller celui-ci, s'interroger sur sa nature véritable et sa réelle volonté ou non de nous conter son histoire. A la rédaction, nous sommes restés quelquepart admiratifs... Devant sa noirceur, devant son culot, son style, son rythme et la peinture qu'il fait du milieu. Après un western atypique, Andrew Dominik livre un thriller atypique qui derrière ses aspects bien calmes, recèle des trésors ! Nous retiendrons un morceau de dialogue de Brad Pitt (encore une fois génial d'ailleurs...) qui fait écho à un discours d'Obama diffusé sur la télévision mentionnant le peuple américain : "l'Amérique n'est pas un peuple (...), c'est une gigantesque entreprise"... Cogan Killing Them Softly est un film comme cette réplique : "ce n'est pas un thriller, c'est un gigantesque film sur..." et c'est ici que ça devient incertain, un thriller étonnant, peu commun, et superbement non identifié !
Cogan : Killing Them Softly (Andrew Dominik, 2012)

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