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Service public: notre dû...

Publié le 31 janvier 2013 par Jean-Emmanuel Ducoin
La République que nous voulons s’inscrit résolument dans une redéfinition de la cohésion sociale : les services publics en sont constitutifs…
Service public: notre dû...À chaque moment de l’histoire, ses combats. Et son dû. Ces temps-ci, dit-on assez à quel point les salariés de la fonction publique sont au bout du rouleau, confrontés aux sous-effectifs, à la multiplication des CDD, à la flexibilité toujours accrue, aux contraintes de la sacro-sainte «rentabilité», avec son cortège de dépressions et de suicides, sans parler de tous les secteurs concernés par les «privatisations rampantes»? Victimes du talon de fer austéritaire du quinquennat sarkozyste et de sa meurtrière RGPP, les fonctionnaires espéraient du changement. Huit mois après l’élection de François Hollande, ils attendent. Ce jeudi, ils exprimeront donc leurs revendications à l’occasion d’une journée d’action nationale. Les motifs ne manquent pas. Jour de carence en cas d’arrêt maladie ; salaires ; indices ; précarités ; statuts menacés, etc. Pour les fonctionnaires aussi, ça craque!
Originellement, la notion même de service public constitue l’un des remparts essentiels de la République contre le chacun pour soi, les inégalités, les divisions. Pilier de la cohésion sociale, les services publics ont même servi d’amortisseur «spécifiquement français» depuis le début de la crise. Paradoxe. Alors que la paupérisation de la population augmente à une vitesse exponentielle et que la fonction publique, au sens large, devrait se renforcer pour réduire les fractures béantes d’un pacte social en voie d’atomisation, c’est le contraire qui se produit. Au royaume globalisé de la prospérité pour les financiers et de la rigueur pour les salariés, les valeurs du bien commun sont-elles encore une priorité? Le gouvernement va devoir répondre.
Car nous ne sommes pas là pour remâcher ou ruminer une fable pour quelques vétustes, avec la honte d’être arrivés trop tard dans un pays trop vieux qui a dérogé à l’un de ses invariants historiques : les nouvelles générations ne vivent plus forcément mieux que les précédentes. Non, nous sommes là parce que nous savons que les Français sont inquiets pour leur avenir, hantés par la perspective de leur déclassement, et parce que nous n’oublions pas que la notion d’intérêt général se trouve plus affectée en période de crise, au profit d’objectifs individuels et nihilistes. Or, qui parle le mieux de l’intérêt général, sinon les agents de la fonction publique?
Dans les conditions du libéralisme idéologique dominant, il était sans doute inévitable que soit contesté au cœur de la société même le rôle de la fonction publique, historiquement fondé et solidement ancré dans l’ADN de notre État depuis le Conseil national de la Résistance. Les libéraux, quels qu’ils soient, souhaitent la banalisation de la situation des agents publics, considérant ce qu’ils appellent une «particularité» comme une anomalie. Nous pensons tout le contraire! Face à la dégradation de la situation salariale, qui procède d’une «dé-collectivisation» achevant d’isoler les individus, il convient d’imaginer un renforcement de l’intervention publique, avec, à la clef, un «nouveau compromis social» ayant peu de choses à voir avec l’accord de compétitivité signé récemment par le Medef et quelques syndicats…
La République que nous voulons s’inscrit résolument dans une redéfinition de la cohésion sociale, réaffirmant ses valeurs universelles : les services publics en sont constitutifs. Mais, qu’on se le dise, par les temps qui courent, rien n’est jamais acquis qui ne se passe des combats. À chaque moment de l’histoire, son dû.
[EDITORIAL publié dans l'Humanité du 31 janvier 2013.]

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