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Pour l'UMP, depuis 10 ans les violences ont baissé sur 90% du territoire. Sans blague ?

Publié le 01 mars 2013 par Pscauxcailly

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« Entre 2002 et 2012, les violences ont baissé sur 90 % du territoire »

Dans le clip de l'UMP sur la sécurité

Intox
L'UMP diffuse depuis peu un petit clip consacré au«laxisme de François Hollande». Elle y dénonce (sans surprise) l'action de la gauche. «Face à cette montée de fièvre insécuritaire, le gouvernement refuse d'affonter la réalité», martèle le commentaire sur une musique menaçante. Au tableau apocalyptique de la politique du gouvernement Ayrault, l'UMP oppose (sans plus de surprise) le bilan de la droite, forcément positif : «entre 2002 et 2012, les violences ont baissé sur 90 % du territoire».

 

Desintox
Pour les habitués des ritournelles de l'UMP sur la sécurité et des statistiques plus ou moins biaisées sur lesquelles elles s'appuyent (ici, un digest), l'intérêt de cette vidéo repose dans le surgissement d'un chiffre rarement usité : pour vanter le bilan de Nicolas Sarkozy,  la droite choisit cette fois de dresser un tableau géographique des violences en France, affirmant que les violences ont baissé sur 90% du territoire entre 2002 et 2012.

On se dit : Chic, voilà un nouveau chiffre !

Puis : sur quoi repose-t-il donc ? Et d'où vient-il ?

Du côté de l'UMP, on est incapable de répondre à la première question, mais, pour ce qui concerne la deuxième, on explique avoir repris pour ce clip les données avancées en janvier 2011 par Brice Hortefeux dans une interview au Figaro. Celui qui était alors ministre de l'Intérieur affirmait, dressant un bilan de la délinquance en 2010 : «Le phénomène des violences est désormais circonscrit géographiquement : sur 90% du territoire, les violences sont même en baisse». L 'UMP trouve cette source suffisamment probante : «ces chiffres n'avaient pas été contestés à l'époque, pas même par l'Observatoire nationale de la délinquance et des réponses pénales».

A l'époque, Hortefeux avait répété plusieurs fois le même chiffre. La veille de l'interview dans le Figaro, il avait expliqué, dans une interview au JT de TF1 : «en réalité, les violences aux personnes,  sur 90% du territoire, elles ont diminué».

Et quelques jours plus tard, il avait répété sa statistique, en la détaillant juste ce qu'il faut pour qu'on comprenne où se nichait l'arnaque.

Voilà ce que disait Hortefeux dans un discours prononcé le 24 janvier 2011 :

«Cette hausse (de la violence) est désormais géographiquement bien circonscrite. En effet, partout en zone gendarmerie, c'est-à-dire sur 90% de notre territoire, ces violences sont stables, voire très légèrement à la baisse»

Voilà donc à quoi correspondent les 90% du territoire : à la zone couverte par la gendarmerie (il s'agit des communes, le plus souvent rurales, de moins de 20 000 habitants).

Ce qui amène plusieurs remarques : 

Première remarque : Il s'agit d'une manière habile... mais faussée, de présenter les choses : en effet, si la zone gendarmerie couvre à peu près 90% du territoire, elle ne représente environ que 20% du total des violences constatées (lire tableau ci dessous), lesquelles sont très majoritairement situées dans les zones urbaines et les grandes agglomérations... Hortefeux se félicite donc que les violences constatées aient globalement stagné en zones rurales... en éludant le fait qu'elles ont continué d'augmenter en zone police (qui réprésente 50% environ de la population, et où on constate 80% des violences), et en masquant le fait qu'au total, elles ont donc continué de croître au niveau global. (1)

Par ailleurs, le fait que le volume de violences constatées ait globalement baissé dans la zone gendarmerie ne veut pas dire contrairement à ce que suggère Hortefeux que la violence constatée a baissé sur la totalité de cette zone. La violence peut parfaitement augmenter faiblement dans la moitié des communes concernées... et baisser un peu plus dans l'autre moitié.

Violences

Deuxième remarque : l'affirmation de Brice Hortefeux dans le Figaro et sur TF1 était un peu excessive. En zone gendarmerie, les violences sont passées entre 2009 et 2010 de 95808 faits constatés à 95547 faits constatés en 2010. Soit un recul de... 0,3%. La déclaration d'Hortefeux quelques jours plus tard parlant d'une «stabilité», ou d'une«très légère baisse», était plus honnête.

Troisième remarque : l'utilisation que l'UMP fait aujourd'hui de cette affirmation d'Hortefeux est totalement folklorique. Ce n'est pas parce qu'Hortefeux a affirmé il y a deux ans que les violences constatées en zone gendarmerie ont baissé entre 2009 et 2010 qu'on peut affirmer aujourd'hui qu'elles ont baissé entre 2002 et 2012. D'ailleurs, elles n'ont pas baissé, puisqu'entre 2002 et 2011, elles ont en réalité augmenté de 27%, passant de 75865 faits constatés à 96821 (on met de côté le chiffre de 2012 dont la forte hausse repose sur un biais statistique). Sur la même période, les violences aux personnes ont augmenté de 21% en zone police (de 305188 à 371191).

Et pour s'assurer du fait que le chiffre de l'UMP est totalement farfelu, on peut se plonger dans les bases de données de l'Observatoire nationale de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) qui propose  des outils pour dresser une géographie de la violence.

Le site cartoweb est un portail géostatistique d'accès et de téléchargement des données localisées des crimes et délits enregistrés par la police et la gendarmerie nationale . 

Si on regarde l'évolution des « atteintes volontaire à l'intégrité physiques aux personnes » entre 2002 et en 2011, on constate qu'il n'y a qu'une vingtaine de départements dans lesquels les violences constatées ont baissé ou faiblement augmenté (entre -14% et +14%).

Carte

Et sur ce total, il n'y en a en réalité que 8 départements (Hautes-Alpes, Côte-d'Or, Creuse, Doubs, Haute-Corse, Oise, Bas-Rhin et Haut-Rhin) qui ont enregistré une baisse des violences constatées. 

Ce qui confirme que le clip de l'UMP est un bel exemple de n'importe quoi.

C.P et C.Mt

(1) Rappelons que l'indicateur du nombre de violences aux personnes constatées, contrairement à ce qu'induit le raisonnement d'Hortefeux et de l'UMP, ne traduit pas nécessairement l'évolution desdites violences aux personnes. L’évolution du nombre de faits constatés variant notamment en fonction du comportements des victimes (dépot de plainte) et des forces de l’ordre (recueil des plaintes). Nous avons expliqué cela un grand nombre de fois. Ici par exemple.

source : http://desintox.blogs.liberation.fr


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