Magazine Cinéma

[Critique] WADJDA

Par Onrembobine @OnRembobinefr
[Critique] WADJDA

Titre original : Wadjda

Note:

★
★
★
★
½

Origine : Arabie Saoudite
Réalisatrice : Haifaa Al Mansour
Distribution : Waad Mohamed, Reem Abdullah, Abdullrahman Al Gohani, Ahd, Sultan Al Assaf, Dana Abdullilah, Rehab Ahmed, Rafa Al Senea…
Genre : Drame
Sortie : 6 février 2013

Le Pitch :
Wadjda, douze ans, ne rêve que d’une seule chose : obtenir un vélo pour pouvoir faire la course avec son ami Abdallah, mais cela va s’avérer plus compliqué que prévu, dans un milieu ultra conservateur. Elle va par la suite s’inscrire à un concours de récitations coraniques, pour obtenir le premier prix et la somme qui l’accompagne…

La Critique :
Wadjda veut un vélo, quelque chose de très banal à première vue, sauf que Wadjda vit en Arabie Saoudite. Et on ne peut pas dire que dans ce pays, les droits des femmes sont respectés, et à plus grande échelle également, le droit des citoyens. Il faut tout de même savoir en quelques faits qu’en Arabie Saoudite, les femmes n’ont pas le droit de conduire(d’ailleurs on le voit très bien dans le film, les femmes ne se déplacent pas sans leur chauffeur). Les femmes sont aussi placées dès leur plus jeune âge sous l’autorité d’un homme/un tuteur et sont obligées d’avoir sa permission pour accomplir la plupart des actes de leur vie. Les établissements imposent une stricte séparation des sexes. Il est primordial de rappeler qu’il n’est pas question ici de juger une nationalité ou un pays. Une poignée d’extrémistes et/ou un gouvernement corrompu et immoral ne sont pas représentatifs de l’ensemble d’une population et les hommes comme les femmes souffrent de cette situation.

Wadjda, interprété par la pétillante Waad Mohamed, nous plonge dans un univers où la tolérance et l’obscurantisme religieux règnent. Sans intolérance aucune envers les religions, la critique qui est émise ici concerne les dérives et les extrémismes.
Wadjda doit rentrer dans les rangs, aller à l’école puis rentrer chez elle, et surtout se conformer à une façon de penser qui réduit les libertés individuelles. Elle n’a pas non plus le droit de faire du vélo car c’est mal vu dans son pays. La constatation d’un tel fait, celui de priver un être humain de son droit le plus fondamental à savoir sa liberté, aurait pu être un gage de tristesse et de douleur dans la réalisation de ce superbe film, mais il n’en est rien. L’œuvre de Haifaa Al Mansour, est d’un positivisme étonnant, d’une fraîcheur incroyable, et ça fait un bien fou. Il s’en dégage une belle luminosité et le tout est accompagné d’une seule composition musicale tout à fait sublime.

Ce manifeste féministe est servi par un casting général excellent, non seulement par le jeu de chacun, mais aussi grâce à la palette très diversifiée des caractères. Ahd, qui interprète la directrice de l’école, est d’une sincérité et d’un réalisme impressionnant. Mais ce qu’il y a de plus intéressant, c’est quelle incarne à merveille cette dualité que l’on observe chez l’être humain. Elle illustre à elle seule toute l’hypocrisie d’un système qui prône l’extrémisme religieux et une conduite des mœurs complètement archaïque et anti-libertaire, en s’empourprant dans ses mensonges et sa frustration. C’est amusant de la voir patauger dans ses contradictions.

Le film apporte son lot de sourires et d’humour, il n’est pas non plus éprouvant certes, mais il déclenche une émotion puissante. À certains moments le cœur est pris dans un étau et nous ne pouvons que saluer cette formidable réalisation qui secoue et réussit à nous tirer quelques larmes. Le propos ne s’avère pas non plus manichéen, personne n’apparaît comme fondamentalement bon ou mauvais, les personnages agissent selon leurs codes, parfois louables, parfois méprisables. Même si notre charmante Wadjda incarne magnifiquement bien la gentillesse, la générosité et la bonté. Le jeune garçon interprété par Abdullrahman A Gohan incarne quant à lui comme une nouvelle ère qui arrive et qui sera beaucoup plus tolérante, peut-être.

Le long métrage se veut optimiste, le sentiment et l’action de révolte finiront par arriver pour clôturer un film mûr et intelligent. Wadjda est un soleil et apporte beaucoup de courage dans un monde où les femmes sont toujours en quête de leurs droits fondamentaux. Le vélo apparaît comme l’allégorie de la liberté, cette liberté chérie que recherche indubitablement et de bon droit Wadjda. La réalisatrice Haifaa Al Mansour signe ici un film sobre, simple et prenant, qui est aussi le premier film saoudien. Espérons que ce vent de liberté et cette immense lueur d’espoir sèment les graines du changement.

@ Audrey Cartier

Wadjda-photo
Crédits photos : Pretty Pictures


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Onrembobine 57561 partages Voir son profil
Voir son blog

Magazines