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Parenthèse malickienne ou plus inquiétant essoufflement ?

Par Borokoff

A propos de A la merveille de Terrence Malick ★★☆☆☆

Ben Affleck, Rachel McAdams - A la merveille de Terrence Malick - Borokoff / Blog de critique cinéma

Ben Affleck et Rachel McAdams

Au Mont-Saint-Michel (surnommé La Merveille), Neil (Ben Affleck) et Marina (Olga Kurylenko) filent le parfait amour. Du moins en apparence. Neil est un ingénieur américain basé dans l’Oklahoma tandis que Marina est une jeune Ukrainienne, installée à Paris et mère d’une petite fille de 10 ans. Mais lorsque Marina et Neil décident de s’installer ensemble aux États-Unis, les problèmes commencent. Marina et sa fille ont du mal à s’acclimater à la vie dans la petite communauté de Bartlesville tandis Neil lui-même a l’air indécis, comme si la vie en couple semblait avoir figé, brisé quelque chose en lui, la fraicheur et la jouvence originelles de son amour. Marina se rapproche alors de Quintana (Javier Bardem), un prêtre d’origine espagnole qui comme a elle, a vécu le déracinement et se veut très proche des habitants. Mais Quintana semble douter lui-même de sa vocation comme de son amour en Dieu…

Un film de Terrence Malick ne laisse jamais indifférent. Son sixième long-métrage (seulement) n’échappe pas à la règle même s’il est loin d’égaler la puissance lyrique de La ligne rouge ou la beauté de Les moissons du ciel.

A la merveille de Terrence Malick - Borokoff / Blog de critique cinéma

Construit (à nouveau) comme une sorte de long rêve et de poème solaire dont on suit chronologiquement les évènements et dont la voix-off constitue autant de monologues des protagonistes que le reflet de leurs questionnements métaphysique et amoureux, A la Merveille (pourquoi avoir traduit le titre original To the wonder ?) entremêle les destins de plusieurs personnages issus de divers origines et qui vont se croiser, se frôler, s’aimer ou se rater mais confier à chaque fois leurs inquiétudes et leurs espoirs, le tout sur un fond social qui est une nouveauté chez Malick, revenu filmer non pas dans cette bourgade charmante de Waco (Texas) dont il est originaire mais pas loin, dans l’Oklahoma, et un bled tout aussi paumé : Bartlesville.

Bartlesville, lieu de perdition, ville polluée par les usines environnantes sur lesquelles Neil enquête en bon ingénieur de l’environnement qu’il est. La nouveauté chez Malick, c’est de montrer cette face cachée de l’Amérique, avec ses paumés, ses drogués, ses fauchés, ses déshérités. Tous ces « losers magnifiques », ces  » fleurs sacrées » que Kerouac a si bien décrits et su magnifier dans ses livres.

Olga Kurylenko - A la merveille de Terrence Malick - Borokoff / Blog de critique cinéma

Olga Kurylenko

Comme souvent chez Malick, la photographie est superbe, les plans non moins somptueux, à l’image du visage rayonnant, baigné de soleil d’Olga Kurylenko, courant en zigzag sur le sable ou dansant, heureuse et insouciante, chez Neil, dans la rue ou dans un supermarché. C’est l’Amour. l’Amour avec un grand A avant que le destin ne s’en mêle et que tout se complique.

Tous les éléments du cinéma de Malick sont là : l’omniprésence du soleil, l’attrait pour les champs de blé, pour les champs et contrechamps, les cous coupés, visages tendus métaphoriquement et symboliquement tantôt vers le ciel tantôt vers la terre. La voix-off de Marina confie d’abord son bonheur avant que ne vienne le désespoir. Comme Neil, Marina ne comprend pas pourquoi son histoire d’amour part à vau-là, elle qui avait si bien commencé. En se rapprochant du prêtre Quintana, lui-même en plein doute sur Dieu, Marina espère résoudre et démêler les fils d’une relation mal engagée alors qu’elle était si bien partie.

Javier Bardem - A la merveille de Terrence Malick - Borokoff / Blog de critique cinéma

Javier Bardem

Comme dans The tree of Life, A la merveille évoque un rapprochement avec Dieu de son réalisateur. Des questions sur la croyance, la religion que Malick semble se poser de plus en plus en vieillissant. Seul hic, c’est que dans A la merveille, il y a un certain nombre de redites par rapport à The tree of Life. Des redites comme des longueurs, des plans trop répétitifs voire redondants sur Marina errant dans Bartlesville. Il y a des moments de grâce dans A la merveille, mais ils sont rares.

Car Malick se perd un peu dans un trop grand nombre de thématiques qu’il voudrait aborder : amour, religion, écologie, social, etc… Le réalisateur américain n’en fait-il pas un peu trop, ne se mélange-t-il pas les pinceaux en voulant parler de tout et de n’importe quoi, ce qui a pour don de diluer l’intrigue et affaiblir la tension du film ? On aurait aimé par exemple que le scénario reste centré sur cette histoire d’amour entre deux êtres qui s’aiment passionnément mais ne parviennent pas à vivre ensemble. Car là était le vrai sujet du film.

A la merveille de Terrence Malick - Borokoff / Blog de critique cinéma

Tree of life était un film autobiographique, n’en déplaise à son réalisateur, ce qui le rendait émouvant. Moins personnel, A la merveille en perd de sa force.

Quant au personnage joué par Ben Affleck, souvent filmé de dos, il est ce qu’il y a de plus intriguant finalement dans le film, de plus mystérieux. Neil est un personnage complexe, d’autant plus étrange dans son comportement qu’il est souvent taiseux voire silencieux. On ne sait pas trop ce qu’il pense. Sans doute est-il amoureux fou de Marina mais son installation avec elle aux Etats-Unis semble avoir raidi ses ardeurs, glacé quelques chose en lui. Comme s’il était devenu froid soudain, hermétique à un amour qu’il ne parvient plus à donner. Sa brève idylle avec une ancienne amie (Rachel McAdams) ne changera rien à son dilemme ni à son malheur. La principale force du film est là, dans sa subjectivité, la foule d’interprétations que ce personnage offre.

Quant à Malick, dont on a ouï dire qu’il a trois nouveaux films déjà en post-production et sur le feu (soit la moitié des films qu’il a réalisés en quarante ans de carrière !), gageons qu’il retrouve un peu d’inspiration et qu’un vent d’inspiration nouveau souffle sur sa plume. C’est tout le mal qu’on lui souhaite. Et l’impatience qu’A la merveille suscite…

http://www.youtube.com/watch?v=H4dI99GPF4w

Film américain de Terrence Malick avec Ben Affleck, Olga Kurylenko, Rachel McAdams (01 h 52)…

Scénario de Terrence Malick : 

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Mise en scène : 

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Acteurs : 

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Compositions d’Hanan Townshend

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