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Comment faire de la pub pour le papier toilette ?

Publié le 14 novembre 2012 par Unoeilsurlapub @ccilepineau

Étienne Chatiliez est surtout connu pour ses films, de Tatie Danièle à Agathe Cléry en passant par Tanguy. Il a aussi une remarquable carrière de réalisateur de films publicitaires, dont la qualité contribue à rehausser le niveau de la publicité. Particulièrement actif dans les années 1980, il a su mettre son empreinte sur le paysage publicitaire de cette décennie pour notre plus grand plaisir.

Le spot pour le papier toilette Le Trèfle est un parfait exemple pour montrer que la publicité peut être décalée, originale, divertissante à partir du moment où on laisse s’exprimer la créativité de réalisateurs de talent.

La catégorie de ce produit est particulièrement difficile à aborder. Pourtant les choix Étienne Chatiliez, entre humour et ironie, placent ce message en complet décalage avec la banalité et la trivialité du produit qu’il vante.

Ce décalage s’opère à plusieurs niveaux :

L’HISTOIRE

Ce spot nous raconte l’histoire d’un homme venant acheté un cadeau dans une boutique pour sa femme. Ce qui rend tout d’abord la situation cocasse c’est la nature du cadeau : du papier toilette.

Puis tous les éléments constitutifs de l’histoire se mettent à être en décalage avec la nature de cet achat.

Le décor où prend place cette scène fait plutôt penser à une boutique spécialisée (en lingerie, pull, ou pelote de laine). Il s’agit bien d’une boutique spécialisée, mais en papier toilette.

En outre, le jeu des acteurs, exagérément naïf, est une autre clé de la réussite de ce message. Ils vont jusqu’à chanter leur texte et exercer de petits pas de danse dans le magasin au gré du rythme de la chanson.

Il n’y a aucune connivence avec le spectateur sur la nature incongrue de la scène. Les protagonistes sont complètement dans l’histoire et la défendent, devenant ainsi ridicules à l’instar du scénario.

LES DIALOGUES

L’image comme les dialogues donnent au spot son ton particulièrement décalé, voire ridicule. J’ai retranscrit le texte. Lu pour lui-même, nous appréhendons bien mieux l’incongruité de la situation :

 Homme en violet : Vous désirez ?

Homme en vert : Je voudrais faire un cadeau à ma femme. Il paraît que vous en avez reçu un nouveau ?

Homme en violet : Oui, ma femme est en train de l’essayer. Mais je suis au courant. C’est un bleu.

Homme en vert : Bleu comme ?

Homme en violet : La vivacité du citron se fond dans la bergamote.

Homme en vert : Et la vanille apporte sa fraîcheur matinale.

Homme en violet : Et vous verrez la qualité a été perfectionnée.

Homme en vert : Ma femme va être extrêmement touchée.

Homme en violet : C’est pour offrir je vous l’emballe.

Homme en vert : Non, non, je suis pressé. Ma femme attend dans la voiture.

Voix Off : Le trèfle parfumé, une nouvelle collection.

LE STYLE

Reprenant des caractéristiques propres à une majorité de spots de l’époque : une publicité chantée et joyeuse, un ton décalé, un style graphique coloré et épuré, le réalisateur arrive à sortir du modèle proctérien rendant une publicité pour du papier toilette sympathique et ludique à regarder.

LE FOND

Si nous extrayons des dialogues les arguments du vendeur, nous retrouvons la promesse du produit : une nouvelle collection de papier toilette parfumé et de meilleure qualité. Le discours du vendeur conserve un caractère informatif.

D’un autre côté, la mise en forme de ce message fonctionne plutôt sur l’émotionnel : le chant, les envolée lyrique et poétique sur les caractéristiques odorantes de la vanille ou du citron.

En outre, la situation dans laquelle est émis le message contribue à renforcer le décalage entre le caractère informatif du fond et le caractère émotionnel de la forme.

ÉTIENNE CHATILIEZ ET LA PUBLICITÉ DES ANNÉES 1980


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