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Dernière pub pour la Golf 7, les femmes ont aussi le droit de prendre du plaisir en conduisant

Publié le 18 mars 2013 par Unoeilsurlapub @ccilepineau

La publicité n’est pas si misogyne

On se plaint souvent du fait que la publicité nous donne une mauvaise image de la place qu’occupe la femme dans notre société. C’est un fait avéré et établi dans de nombreuses études toutes très sérieuses (cf. le rapport de Brigitte Grésy sur l’image de la femme dans les médias, http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/114000703/index.shtml).

Pourtant, un exemple me donne un peu d’espoir, pour plusieurs raisons :

  • ce n’est pas une énième exception qui confirme la règle
  • ce spot s’inscrit dans l’histoire de la communication publicitaire du secteur automobile
  • il démontre une réelle évolution du discours publicitaire sur les femmes et l’automobile
  • il s’agit d’une pub pour la Golf 7, voiture vedette de Volkswagen, élue voiture de l’année 2013

Étude des différents personnages intervenants dans le spot

  1. Une jeune femme rousse, cheveux ondulés, conduit sur une route boisée de bon matin. Le soleil brille, la musique est douce.
    Séquence très « nature » : naturel de la jeune femme, peu maquillée, sobrement heureuse, elle arbore un joli et discret sourire. L’environnement nous donne envie, nous aussi, de faire une virée en voiture avec ce bon soleil et cette forêt accueillante. 
  2. Deux jeunes femmes roulent au volant de la même voiture. Mais l’ambiance est très différente. La musique devient, tout à coup, plus entraînante  L’environnement est urbain et nocturne. L’ambiance est festive. Il s’agit de deux copines qui vont faire la fête.
  3. Cette fois-ci la Golf est à l’arrêt. Nous sommes sur une plage, soleil couchant. Les occupants de la voiture profitent du soleil couchant, assis sur le sable, enlacés, il s’agit d’un jeune couple amoureux.
  4. Le dernier personnage est un homme. Mais contrairement aux précédentes conductrices, il semble plus âgé. En revanche, son look : gilet en cuir sans manche, tatouage et bijoux nous laisse penser qu’il a aussi un mode de vie nocturne et festif. L’ambiance nocturne et l’environnement urbain appuient cette impression.

La cible semble essentiellement féminine pour cette publicité,  surtout que Volkswagen nous dit  :  » nous avons pensé à vous pour concevoir la Golf ».
Les personnages dans cette annonce correspondraient à la cible potentielle. Ou plutôt à l’image qu’elle a d’elle même ou comment elle a envie d’être montrée, comment elle a envie que l’on parle d’elle, comment elle a envie que l’on s’adresse à elle. En somme, une image idéalisée mais réaliste.

Comment parler d’automobile aux femmes 

Le secteur automobile a commencé à s’intéresser sérieusement à la clientèle féminine dès la fin des années 1970.  Dès lors, le discours est très différencié entre celui adressé aux hommes et celui adressé aux femmes.

  • Aux hommes, les arguments d’achats émotionnels sur le plaisir de conduire, la passion, la séduction, la vitesse et la puissance du moteur, symboles de virilité.
  • Aux femmes, les arguments d’achats rationnels, basés sur la praticité de la voiture, la faible consommation et un coffre suffisamment grand pour pouvoir ranger toutes les courses et la poussette du petit dernier.

LN, Citroën, Elle, 1976

La petite voiture pratique et à la faible consommation d’essence a comme corollaire une absence de plaisir de la route, la vitesse et la puissance du moteur n’étant pas des arguments vendeurs pour la cible féminine. Ceci est vrai pour la LN de Citroën en 1976 ou pour la Twingo de Renault, plus récemment.

Ici, Volkswagen n’exclut pas les femmes de sa cible potentielle. Bien au contraire, le constructeur allemand tente de les séduire elles-aussi et avec des arguments d’habitude utilisés pour convaincre la clientèle masculine. Il est donc question de plaisir et en toutes circonstances.

  1. Dans la première séquence, il s’agit du pur plaisir de conduire. Ce plaisir que Citroën nous a si bien retranscrit récemment dans sa dernière pub pour la DS3 cabriolet. (mais avec un conducteur masculin)
  2. La deuxième séquence, dans une ambiance plus festive, fait référence de manière très lointaine à la puissance et à la vitesse (ces deux arguments ne sont plus acceptables aujourd’hui dans une annonce pour vanter une voiture, car ils entrent en opposition avec les messages de la prévention routière). L’ambiance survoltée et festive ainsi que la musique qui s’accélère sous-entendent puissance et vitesse, par opposition au calme de la séquence précédente.
  3. Le plaisir est toujours sous-entendu dans la troisième séquence avec ce couple enlacé sur la plage.
  4. Le dernier conducteur est plus énigmatique. Il faut se rappeler que la publicité aime les stéréotypes et cette figure masculine reprend un certain nombre de codes de représentation de la population homosexuelle : tatouage, bijoux, habillement. Il est plus âgé que les autres personnages du spot mais tout aussi branché. Sa présence est utilisée de manière habile et ne remet pas en cause sa masculinité et sa virilité. La main sur le pommeau de vitesse est un poncif pour signifier la conduite sportive, la vitesse et le plaisir de conduire.

Je finirai par cette citation de Roland Barthes (Mythologies, Paris, Seuil, 1957, p 140) :

L’automobile est [...] consommée dans son image, sinon dans son usage, par un peuple entier qui s’approprie en elle un objet parfaitement magique.


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