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Drogue et terrorisme: un « stupéfiant » aveuglement médiatique

Publié le 28 mars 2013 par Eldon

aveugle2 300x199 Drogue et terrorisme: un « stupéfiant » aveuglement médiatiqueLe Nouvel Economiste

Tout le confirme : l’aveuglement est la pire pathologie de la société de l’information. Une maladie d’ailleurs prédite dès 1954 par Martin Heidegger : “Il y a pire que la cécité, c’est l’aveuglement, qui croit qu’il voit – et voit de la seule façon possible – quand c’est pourtant cette croyance où il est qui lui bouche toute vue.”

Cet aveuglement touche d’abord les quotidiens des milliardaires, notamment dans le domaine de la drogue et de la toxicomanie.

Trop occupés à radoter sur la dépénalisation de drogues (dont on verra plus bas que l’usage diminue) ou à dénigrer les criminologues qui osent dénoncer leurs bobards idéologiques ; recopiant les fiches de divers lobbies ou, pire, pompant la sinistre usine à désinformer qu’est Wikipédia, ces néo-médias ne perçoivent pas que le monde change autour d’eux – et avec quelle brutale force et rapidité.

Stupéfiants : en la matière, scruter les évolutions au Royaume-Uni est crucial, cette nation étant d’usage en tête de l’usage des drogues en Europe. Depuis un demi-siècle, le “modèle” britannique de toxicomanie tend ensuite à gagner, d’abord le nord de l’Europe, Pays-Bas, Danemark, pays scandinaves, puis le reste du continent.

Or ce mois-ci, le “Crime survey for England and Wales”, du bureau national des statistiques britanniques, publie de sidérants chiffres sur la baisse – l’effondrement, parfois – de l’usage des drogues dans ce pays, ces cinq dernières années.

Un cas isolé ? Non : fin 2012, l’Office européen des drogues et de la toxicomanie (OEDT) et Europol signalent aussi conjointement une “stabilisation”, voire des “baisses” dans la consommation des drogues dans l’Union européenne (UE).

Car – comme souvent, ce fut signalé en premier dans cette rubrique – voici désormais quatre ans que l’usage des stupéfiants baisse chez les toxicomanes britanniques les plus jeunes (16 – 24 ans). Et dans quelles proportions ! Depuis un pic atteint en 2007, la chute de la consommation est spectaculaire.

Par rapport à ce pic, observons les chiffres de 2012. D’abord, les stupéfiants “classiques” : cannabis, moins 17 % ; cocaïne, – 30 % ; héroïne, – 50 % ! Même cette drogue chimique qu’est l’ecstasy baisse sur cette période de 25 %. Ces cinq dernières années, le nombre des “usagers fréquents” juvéniles diminue ainsi de 15 %; usagers de drogues “stimulantes”, de 30 % ; toxicomanes toutes drogues confondues, – 20 %. Des chiffres énormes – songeons à l’enthousiasme que susciterait, par exemple, l’annonce d’une baisse du chômage, ou des cas de Sida, de 20 à 30 % ! Et la tendance s’accélère, les chiffres 2012 de l’usage “sur le dernier mois” le démontrent : cannabis, – 25 %, cocaïne, – 37 %, ecstasy, – 40 %. Le plus merveilleux pour les 16-24 ans étant la quasi-disparition de l’usage d’une héroïne désormais “statistiquement imperceptible”.

Or émerge fin 2012 un fait nouveau, plus révélateur encore : naguère limitée aux jeunes, cette baisse gagne désormais les adultes (“16 à 59 ans”) : Consommation “sur le dernier mois” de cocaïne : -23 % ; de cannabis : – 14 %. Pour les drogues chimiques : ecstasy : – 37 % ; amphétamines – 40 %. Seule l’héroïne reste stable, à niveau bas. Adultes et juvéniles confondus, on constate désormais (sur 2007-2012) une baisse de 11 % de l’usage des drogues dites “dures” (héroïne et cocaïne, surtout) et de 11 % aussi des “récréatives” (drogues chimiques, surtout).

Attention : cette tendance désormais lourde s’étendant en Europe, le choc sera d’évidence énorme pour le milieu criminel, forcé d’envisager, et vite, un repli vers des “métiers criminels” de remplacement. Mais la drogue n’est pas le seul domaine de l’illicite à souffrir sur le continent européen : le terrorisme régresse, lui aussi.

Un second événement lui aussi crucial, car lors du demi-siècle écoulé, les drames liés à la drogue et au terrorisme ont représenté les pires cauchemars des gouvernements européens, tout comme les plus difficiles missions de la police et des services spéciaux.

Considérons ceci, qui provient de statistiques d’Europol d’ici peu publiées. Durant l’année 2012, le terrorisme disparaît virtuellement d’Europe. Sur l’année, 25 des 27 pays de l’UE ne signalent presque plus d’attentats, ni même de tentatives sérieuses. La sortie d’ETA de la lutte armée en Espagne (fin 2011) n’aura fait que confirmer la tendance. Restent le Royaume-Uni et la France, où la plupart des attentats sont commis sur deux micro-territoires : l’Ulster et la Corse. L’occurrence d’un attentat est désormais si limitée pour les 500 millions de citoyens de l’UE, qu’une “Nuit bleue” de plus ou de moins dans l’Ile de Beauté affecte sérieusement la statistique du terrorisme pour l’Europe entière. Restent évidemment quelques nigauds singeant le jihad sur YouTube et neutralisés à la première occasion, et des cas quasi-pathologiques comme Breivik ou Merah, capables d’atrocités mais isolés ou presque – et de ce fait, limités dans leurs capacités criminelles.

Un paysage nouveau émerge ainsi en Europe, où l’on distingue désormais à grands traits :

- Que la drogue fascine moins la jeunesse,

- Que production et trafic changent de mains (“Cannabis social clubs”),

- Que le terrorisme s’estompe à mesure qu’il passe de mode.

Le criminologue imagine la frustration de chefs de services antidrogue, ou de magistrats antiterroristes actifs ou retraités, à la lecture de ces lignes. Cependant, dit le philosophe Clément Rosset : “La réalité est insupportable, mais irrémédiable.” Dès lors, deux voies s’ouvrent à eux. Nier ces manifestes réalités nouvelles et préparer la guerre d’hier, avec l’aide de leurs complices médiatiques. Ou prendre en compte cette évolution – pour l’heure continentale et demain qui sait, planétaire – et agir en conséquence. Déceler, comprendre – mais surtout prévenir ! – les nouveaux avatars du crime et de la terreur à l’horizon maîtrisable (2013-2020) : telle est la voie exaltante qui s’ouvre devant ceux qui auront admis et assimilé ce qui précède.

Par Xavier Raufer

Source: Le Nouvel Economiste


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