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Le 200e tableau du mois

Publié le 12 avril 2013 par Louvre-Passion

Le « tableau du mois » c’est l’occasion de découvrir ou redécouvrir les peintures du musée. En ce mois d’avril 2013, il s’agit du 200e tableau du mois, cette manifestation ayant débuté en 1993. Ce mois-ci, l’œuvre exposée est un tableau de Louis Lagrenée intitulé « L'Amour des Arts console la Peinture des écrits ridicules et envenimés de ses ennemis » (ouf !).

L'amour des arts INV 5556
Louis Lagrenée (1724 – 1805) est un peintre d’histoire formé par l’Académie, il devient d’ailleurs en 1781 Directeur de l’académie de France à Rome. C’est donc un artiste tout à fait classique qui a bénéficié de commandes royales. A chaque Salon il expose de grandes compositions sur des sujets antiques. Il aurait sans doute été le plus heureux des hommes sans les critiques notamment celles de Diderot qui, régulièrement s’en prenait à lui.

Je vous avais déjà raconté ici que tous les deux ans l’académie royale de peinture organisait une exposition dans le Salon carré du Louvre qui ouvrait à la Saint Louis (le 25 août), fête du patron du roi. Cette exposition appelée le « Salon », en raison du lieu où elle se déroulait, était un évènement artistique majeur. A partir de 1759 Diderot devient le critique d’art attitré de la « Correspondance littéraire » une sorte de gazette confidentielle destinée à une quinzaine de princes européens. Comme les peintres n’étaient pas censés lire cette publication Diderot ne se privait de critiquer, voire « démolir » certaines œuvres et, le moins qu’on puisse dire c’est qu’il n’aimait pas les œuvres de Lagrenée. Ainsi au salon de 1759 sur la toile « Vénus aux forges de Lemnos demandant à Vulcain des armes pour son fils », Diderot écrit « Au lieu de cela c’est une grande toile nue, où quelques figures muettes et oisives se perdent. On ne regarde ni Vulcain, ni la déesse ». Il continue sur une autre œuvre en 1767 « Dans la composition de Lagrenée, les vieillards sont debout à gauche, bien beaux, bien coloriés, bien drapés, bien froids (…) Les vieillards sont donc froids et mauvais ». Sur les grandes compositions de l’artiste son jugement est sans appel « Plus sa toile s’étend, plus son talent diminue ». En 1775 « Cet homme se plaît à faire des carnations de cuir bouilli On s’attend à des contours élégant ; rien de cela ; le dessin est pauvre et sans goût ».

Pour répondre à aux attaques de Diderot et des autres critiques Louis Lagrenée expose donc au salon de 1781 « L'Amour des Arts console la Peinture des écrits ridicules et envenimés de ses ennemis ». La Peinture est personnifiée par une jeune femme le sein découvert qui se cache le visage de désespoir le pinceau et la palette abandonnés sur ces genoux. Un petit amour tente de la consoler en lui offrant une couronne d’étoiles. Il piétine des papiers qui symbolisent les écrits des critiques dont les auteurs sont symbolisés par une sorte de harpie tapie à droite dans la pénombre. Malgré cela les commentateurs ne désarmèrent pas bien au contraire. Déjà en 1767 de grands peintres tels que Boucher, Greuze ou Quentin de la Tour avaient refusé d’exposer lassés par ces critiques incessantes. Le Directeur des bâtiments du roi (sorte de ministre de la culture de l’époque) essaya lui aussi de s’y opposer en vain. Certains critiques se justifiaient en déclarant que leur but était d’améliorer les artistes. Chardin qui était l’ami de Diderot, lui avait d’ailleurs reproché la virulence de ses écrits, « De la douceur, de la douceur ! » clamait-il.

Remord ou lassitude, on constate que Diderot arrête sa carrière de critique d’art après le Salon de 1781.


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