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Un guignol à l’Elysée

Publié le 15 avril 2013 par Alex75

Un guignol à l'Elysée dans Politique latern

A en juger les premières réactions autant dans la presse que dans les milieux politiques, François Hollande ne convainc guère, que ce soit avec son « choc de moralisation », pas plus qu’avec son « choc de compétitivité », ni son « choc de simplification ». Il est certain que ces recettes sur la transparence du patrimoine des élus, l’incompatibilité de certaines professions avec un mandat de parlementaire et la lutte contre les paradis fiscaux n’ont rien de très nouveau, ni de très original et qu’on voit mal comment elles pourraient être mises en œuvre. Mais le pire, bien sûr, c’est que plus personne ne croit un seul instant en ce que peut dire, affirmer, annoncer, promettre le président de la République. Pour les uns, il parle pour ne rien dire, pour les autres, il en devient inaudible.

Le double langage est un art ; exigeant subtilité, prudence matoise, art du tempo. François Hollande, qui imite en tout François Mitterrand, a encore des progrès à faire pour appliquer sa célèbre devise, empruntée au cardinal de Retz : « On ne sort de l’ambiguïté qu’à son détriment ». N’est pas sphinx qui veut. L’affaire Cahuzac l’a, bien sûr, terrassé. Mais ce raz-de-marée n’est que la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Pratiquement tous nos présidents ont eu leur(s) scandale(s) : l’affaire de Broglie, la mort mystérieuse de Boulin, le suicide de Grossouvre, l’affaire du Rainbow warrior, la cassette Méry, l’affaire Bettencourt et la liste pourrait s’allonger à l’infini. A chaque fois le trône présidentiel vacillait, mais quelques jours après le chef de l’Etat reprenait la situation en main, parce qu’il était précisément le chef de l’Etat. Ce qui a coulé, semble-t-il définitivement, François Hollande ce ne sont pas les aléas de l’affaire Cahuzac - qui fut la cerise sur le gâteau -, mais plutôt, associé à son évident manque de charisme, ces onze mois de reniements pendant lesquels, non seulement il n’a - mis à part le mariage homosexuel -, tenu aucune de ses promesses, mais pendant lesquels il a surtout fait preuve de sa totale incapacité à choisir entre l’austérité et la croissance, à tenir son équipe de ministres amateurs, à faire face à Angela Merkel, à fixer un cap précis, « à ré-enchanter le rêve français ».

Hollande n’est pas l’Etat. Il ne l’incarne pas. Il ne le fait pas respecter. Il essaye mais n’y arrive pas. Comme s’il était là par hasard, par erreur. Il est vrai que Sarkozy n’y arrivait pas plus que lui. Il compensait son manque d’incarnation par un activisme effréné. Il n’était pas Président mais jouait au Premier ministre, cumulant les deux fonctions. Sarkozy nous a très vite agacé par son agitation perpétuelle et contradictoire. Son successeur nous énerve par son apathique placidité. Sarkozy excitait les passions, Hollande nous les renvoie. Les socialistes ont retrouvé le pouvoir après dix ans d’absence. L’incroyable amateurisme qu’ils ont montré dans l’affaire du taux d’imposition à 75 % prouve qu’ils ont perdu une partie de leur culture de gouvernement. A l’époque, Jospin reconnaissait, penaud, que l’Etat ne peut pas tout. Ses héritiers découvrent que l’Etat peut toujours moins. D’où le désarroi des uns et la fureur des autres. Chacun cherche désespérément à dire quelque chose de gauche. Mais Hollande reçoit chaque jour sa feuille de route de Bruxelles : traité budgétaire, flexibilité sociale… Le rouleau compresseur libéral broie toute velléité d’originalité d’une gauche convertie à la sociale démocratie. Il inspire jusqu’aux réformes sociétales que la gauche défend ingénument au nom du progrès.

Ainsi tout le monde répète en boucle, que l’affaire Cahuzac a provoqué une grave « crise morale » dans le pays, ce qui est probable. Mais il ne faut pas faire trop d’honneur à l’ancien ministre du budget, la crise morale existe depuis bien longtemps. Certains avaient naïvement cru que François Hollande, sous son air débonnaire et son discours social-démocrate, allait nous redonner le moral avec un peu de morale et surtout une vision claire de l’avenir du pays, avec une farouche détermination à mener toutes les « révolutions » qui s’imposent pour que nous ayons une chance de pouvoir enfin remonter à la surface. Comme le souligne Thierry Desjardins, les uns sont déçus, les autres qui ne se faisaient aucune illusion ne triomphent pas pour autant. Tous sont désespérés. 

                                                                                                                                                                          J. D.


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