Magazine France

Hollande, l'austérité n'est pas le récit.

Publié le 24 avril 2013 par Juan
Hollande, l'austérité n'est pas le récit.
Non, l'austérité n'est pas le récit qui convient à la France. C'est pourtant cette petite musique qui se répand à nouveau dans quelques uns de nos médias inquiets.
Les remous sociaux contre l'austérité, les ruptures politiques comme en Italie, et la prise de conscience de l'inefficacité récessive des politiques de rigueur ont semé le doute ou inspiré une relative résistance chez la plupart des exécutifs européens, sauf en Allemagne.
Le FMI reconnaît que cette austérité alimente la récession. Et de s'inquiéter de "l'échec européen face à la crise". Les agences de notation dégradent même les pays les plus austéritaires. La Commission de Bruxelles admet  que les objectifs de retour à l'équilibre ou à des déficits "maastrichtiens" soient reportés d'une année chez 6 pays européens, dont la France. Au Portugal, on se moque des erreurs de calcul de quelques économistes dont les travaux étaient cités en exemple pour justifier les coupes budgétaires. Les parlementaires du même Portugal ont rejeté quelque 1,3 milliard d'euros d'économies supplémentaires (qui seront compensées, a promis le gouvernement conservateur local effrayé, par d'autres économies dans les budgets de fonctionnement de tous les ministères).
Ce "relâchement", comme l'écrit le Monde dans son éditorial du 24 avril 2013, a fini par inquiéter quelques libéraux et conservateurs. Et de conclure, malgré un rappel du bordel ambiant, qu'il "faut tenir le cap" de l'équilibre en 2017. Au sein de notre simple espace national, la droite clame ainsi qu'il faut encore couper dans les dépenses. Le Commissaire Rehn, chargé des affaires budgétaires, reste sacrément obtus sur le fond. Il vient de suggérer à l'Espagne "d'augmenter encore la TVA et de rendre les licenciements encore moins coûteux" raille El Païs.
Reconnaissons que la rigueur française a peu à voir avec les austérités grecque, espagnole, ou britannique. Certes le pouvoir d'achat des ménages a baissé l'an dernier, en grande partie à cause du relèvement fiscal décidé par Nicolas Sarkozy l'année précédente. Qu'aurait-on dit si l'augmentation générale de la TVA pour 11 milliards d'euros décidée par Sarkozy avait bien pris effet le 1er octobre dernier ? A la place, le gouvernement Hollande a préféré une augmentation plus modeste (7 milliards), plus étalée (2014) et circonscrite à des secteurs dont on n'est même pas sûr qu'ils répercuterons cette hausse en inflation de prix sur les consommateurs.
La rigueur française n'est pas austère, mais le redressement des comptes publics reste un objectif central de l'équipe Hollande. Ce dernier a habilement négocié un report des objectifs de réduction des déficits. La situation économique l'imposait. Son prédécesseur n'avait pas la même excuse. En juin 2007, Nicolas Sarkozy s'était affranchi du retour en-deça de 3% du PIB pourtant promis trois mois plus tôt. Et la Grande Crise n'avait pas commencé. L'ancien monarque voulait financer son paquet fiscal de l'été.
Six ans plus tard, les caisses sont vides. L'exemple même de Florange - dont la fermeture des hauts fourneaux qui durera deux mois a débuté hier - est symptomatique. L'Etat pouvait - financièrement - envisager une nationalisation temporaire avant un retour à meilleur fortune. Mais aurait-il fallu alors généralisé la démarche à toutes les usines en difficulté ? 
Où sont les marges de manoeuvre ? Est-on condamné à régurgiter du TINA ?
Or la précarité se généralise. Le pouvoir d'achat est en baisse, modeste en général, dramatique pour les plus pauvres. Un indicateur parmi d'autres, chipé à l'excellent ouvrage de Michel Rocard et Pierre Larroutourou, "La gauche n'a plus le droit à l'erreur", les flux mensuels d'entrées au chômage sont massifs - 400.000 par mois, une secousse que masque le solde net des sorties d'inscription régulièrement publié par Pôle Emploi (quelques dizaines de milliers).
Le trouble politique se voit parmi les parlementaires de la majorité et dans la vraie-fausse opposition du Front de gauche. Jean-Luc Mélenchon se verrait bien premier ministre remplaçant Jean-Marc Ayrault. Le tout pour appliquer un "autre" programme. On attend son programme, justement, pour sortir des incantations et objectifs généraux. La CGT va aussi adresser une mise en garde au président Hollande avant la prochaine conférence sociale de la mi-juin, avec trois revendications principales: "l'opposition aux politiques d'austérité, à la rigueur budgétaire en France et en Europe, inefficaces pour relancer la croissance"; "poursuivre notre bataille d'explication sur le contenu et les conséquences de la loi "sécurisation de l'emploi", dangereuse pour les droits des salarié(e)s et sacralisant la dévalorisation du travail"; "les moyens de la lutte contre la fraude, l'évasion fiscale et les paradis fiscaux".
Le vrai sujet n'est pas tant dans le redressement des comptes que dans les moyens d'y parvenir. On peut envisager une réduction des dépenses publiques (option UMPiste euro-compatible), ou supprimer bien davantage de dépenses fiscales. Peut-on encore augmenter les prélèvements - mais lesquels ? Le débat gagnerait à sortir des incantations de part et d'autre.
Quelle que soit la voie qu'il emprunte, le redressement n'est pas le récit qui convient à la France. Rembourser ses dettes est aussi mobilisateur que régler une amende trop longtemps due. Et TINA n'est pas une option mais un repoussoir.
Il faut livrer un autre objectif.
Vu la situation du pays, il faut qu'il porte sur l'amélioration de la protection du pays et des égalités.



Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Juan 53884 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte