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Expo « L’ange du bizarre » à la Musée d’Orsay

Par Manveru

« L’ange du bizarre », est une exposition d’art (surtout peinture) que j’ai visité au Musée d’Orsay .
C’est une exposition ouverte jusqu’à 9 juin 2013, donc vous avez encore largement le temps pour la visiter !
La thématique d’œuvres concerne surtout le « romantisme noir », une manière empathique de voir le monde au travers des émotions, ici plongés plutôt dans l’obscurité, des émotions négatives.

20130413 124309 Paris Expo Musee d Orsay L Ange du Bizarre

En termes de artistes, nous y retrouvons les œuvres venant des époques assez éloignés, à commencer par les œuvres romantiques proprement dit de la fin de XVIIIème siècle (comme Goya) et début de XIXème siècle et en finissant avec des œuvres du XXème siècle (comme Salvador Dali ou Max Ernst).
Par quoi se caractérise ce romantisme ? Il ne s’agit pas des *histoires d’amour*, bien que celle-ci sont une des facettes de ce courant. Nous considérons plutôt un regard au-delà des apparences sur le monde, qui cherche un autre fond émotionnel, moral des choses tout en utilisant les moyens d’expression très diverses et la forme très riche. Ce romantisme ne se contente pas à raconter la vie réelle, donner la vision directe, seiche ou moraliste du monde mais il se plonge dans différentes strates des impressions qui peuvent être données par des lieux, situations, personnages.
Le romantisme noir fascine par la découverte des interdits, prise en compte des tabous, l’antimorale. Des artistes mélangent de l’amour métaphysique, purement physique avec la mort et frôlent des concepts du mal.

Paul Delaroche, La femme de l’artiste, Louise Vernet, sur son lit de mort, 1849

20130413 150019 Paul Delaroche La femme de l artiste Louise

Les artistes de ce courant reprennent des inspirations dans mythologie, mais aussi dans la tradition chrétienne, d’où lien très étroit avec de l’art du moyen âge et baroque.
Samuel Colman, Veille d’apocalypse,

20130413 145017 Samuel Colman Veille d apocalypse

Le romantisme noir cherche sa force dans l’obscurité, le mystère. Il n’est pas rare de retrouver des œuvres qui racontent l’histoire concernant des esprits, des démons dominant ceux qui sont faibles ou innocents et influençables (différentes images de corruption des femmes par démons ou encore épuisement des hommes par des créatures démoniaques féminines).
Les artistes se tournent vers la tradition populaire des légendes, croyances et superstitions ; le monde abandonne sa certitude d’époque des lumières du XVIIIème siècle (ou encore celle de positivisme plus tard en XIXème siècle… l’histoire refait un cycle complet à chaque fois).
Ce courant aime beaucoup mise en contraste de l’innocence et hédonisme, de bien et mal, de ce qui est beau et moche ou odieux. Des œuvres forcent la réaction d’observateur par leur violence exprimé à une manière plus ou moins indirecte et rien n’est définitif …
Une vierge sous emprise des démons peut même trouver un troublant plaisir dans ce qui l’arrive, … c’est tellement *Sadien* dans son sens…

Johann Heinrich Füssli, Le Cauchemar, 1741

20130413 145116 Le cauchemar Johann Heinrich Fussli

Je note également que Mr. Füssli a produit une bonne quantité des beaux œuvres qui étaient également présents dans cette exposition … cf. notamment :
Satan s'échappant sous le coup de la lance d’Ithuriel 1779
Satan invoquant Belzebuth sur  la mer de feu.1802
Thor luttant contre le serpent de Midgard 1790
Les trois sorcières, 1783
La folie de Kate
Le péché poursuivi par la mort
Ary Scheffer, Lénore ou Les Morts vont vite, 1830, motif d'une jeune fille ramené par un amant mort vivant

20130413 145857 Ary Scheffer Lenore ou Les Morts vont vite


Auguste Préault, Ophélie, 1842, montrant la souffrance dessiné sur le visage d’une jeune fille après sa noyade …

20130413 145320 Auguste Preault Ophelie

Un personnage très puissant tel que cette Hydra peut être tourmenté dans son sort pour l’éternité
Paul Dardé, L’Eternelle Douleur, 1913

20130413 154409 Paul Darde Eternelle Douleur


Gustave Moreau, Victime … peinture mise dans une cour de justice, qui montre une victime, sale, sali, tellement lointaine des filles innocentes vues dans les peintures d'avant, accusant ceux qui sont coupables de sa souffrance, encore avec une arme de crime dans son coeur.

20130413 154106 Gustave Moreau Victime

Gustave Moreau, La débauche, 1893-96

20130413 164824 La Debauche Gustave Moreau 1893-96


Le diable, lui, peut être beau et puissant dans son pandémonium et pas odieux, comme avant, à l’époque de Baroque ou de Moyen Age …
John Martin, Le Pandemonium (photo de Wikipedia)

John Martin Le Pandemonium Louvre

Francisco de Goya est un de ceux qui étaient déçus pas l’époque des lumières, un rationalisme défaillant devant la vilaine nature humaine qui encore une nouvelle fois envahit les esprits… ce même Goya, marqué par des guerres napoléoniennes, qui peint avant une belle Maya (La Maja nue (La Maja desnuda)) … se met à peindre et dessiner des terribles horreurs…
Francisco de Goya, Estragos de la guerra (« Les ravages de la guerre », Désastre 30)

20130413 152038 Francisco de Goya Les ravages de la guerre

Francisco de Goya, Les Résultats

20130413 152103 Francisco de Goya Les Resultats

Une femme nature, c’est équivalent pour les hommes de motif plus classique des diables qui séduisent jeunes filles innocentes : la puissance naturelle d’une femme qui peut détruire la force vitale d’un homme, de la nature dévastatrice et perverse.
Jean Delville,  L’Idole de la perversité, 1891

20130413 164243 Jean Delville L Idole de la perversite

A notre époque ceci me fait penser de concept de Viriditas, introduit dans la série SF « Red, Green, Blue Mars » de Kim Stanley Robinson, ou la société des colonisateurs de Mars est en pleine mutation, notamment en forme d’introduction d’une nouvelle religion qui remplace monothéisme patriarcal par un monothéisme matriarcal.
Ce thème est proche également d’interrogation d’homme d’aujourd’hui sur sa rôle dans la société occidentale qui a devenu très flue, et sur sa valeur sociale qui diminue.
Franz von Stuck Le Baiser de Sphinx (Der Kuss der Sphinx), après 1895

20130413 165037 Franz von Stuck Le Baiser de Sphinx

Edvard Munch Vampire, 1893-94

20130413 165146 Edvard Munch Vampire

Léon Fréderic, Vanité

20130413 165303 Leon Frederic Vanite

Francisco de Goya, le vol des sorcières, 1797-98, cet œuvre montre la peur des hommes qui se cachent tandis que des sorcières aspirent la force vitale d’un homme soulevé par leur pouvoir magique…

20130413 151135 Francisco de goya le vol des sorcieres

Associée à ce motif est un autre : la sorcellerie et la sorcière, un personnage qui maintient le lien entre l’homme et la nature et qui est également la trace de très ancien monde matriarcal (souvent c’était une femme qui détenait la sagesse des anciens ce qui l’a donnait beaucoup de pouvoir sur les autres membres de la société)
Louis Boulanger, La ronde du sabbat, 1830

20130413 150647 Louis Boulanger La ronde du sabbat

Eugene Delacroix Sabbat des sorcières, 1831-33

20130413 150537 Eugene Delacroix Sabbat des sorcieres

Eugene Grasset Trois Femmes et trois loups, 1892

20130413 171740 Eugene Grasset Trois Femmes et trois loups


Des esprits, le spiritisme, des medium et d'autres phénomènes paranormaux et irrationnels font partie intégrale de ce style …

Pierre Bonnard, femme assoupie sur un lit ou l’indolente, 1899

20130413 172332 Pierre Bonnard Femme assoupie sur un lit ou

Une peinture assez curieuse, montrant une femme allongée sur un lit dans une pose bien sensuelle … cette impression est impactée par un élement d’incertitude, des ombres. Dans ses cheveux nous pouvons apercevoir un chat noir … symbole de sorcellerie par excellence ;).

Gabriel von Max la femme en blanc, 1900

20130413 172706 Gabriel von Max la femme en blanc

Louis Boulanger, Les Fantômes, 1829 (illustration pour « Les Orientales » de Victor Hugo)

20130413 150139 Louis Boulanger Les Fantomes

Le romantisme noir se manifeste d’une manière particulière dans le paysage : au XVIIIème et le début de XIXème siècle nous avons beaucoup des peintures plus classiquement « romantiques », dans les cadres des ruines, châteaux mystérieux, des monastères, des vieilles forêts et des montagnes sauvages inconnues, souvent liées aux motives des histoires populaires parmi jeunes dames de cette période où des jeunes filles innocentes qui se retrouvent dans ces lieux mystérieux avec des personnages spéciales, pas forcement bienveillants… et font des choses interdits par la moralité d’époque.

Carl Gustav Carus, Le colisée à Rome (Das Kolosseum in Rom), 1828

20130413 152433 Carl Gustav Carus Le colisee a Rome

Carl Gustav Carus, Nuages de brume en Suisse Saxonne, 1828

20130413 153703 Carl Gustav Carus Nuages de brume en Suisse

Franz Ludwig Catel, Moines à la chartreuse de San Giacomo à Capri,  1827-1830 ; j’aime bien des couleurs mystérieux des torches de cette peinture.

20130413 152520 Franz Ludwig Catel Moines a la chartreuse d

Theodore Géricault, Scène de déluge, 1818-19, c’est une belle scène qui a tout dans son ambiance particulière.

20130413 152640 Theodore Gericault Scene de deluge

Carl Blechen, Route de campagne en hiver au clair de lune, 1829, encore un autre paysage qui à mon avis dégage une impression particulière par son ambiance.

20130413 152708 Carl Blechen Route de campagne en hiver au

Odilon Redon, Temple vitrail, assez grand, des colonnes autour du vitrail indéterminé ; a droit en bas un ange tenant une sorte de crâne, 1904

20130413 172938 Odilon Redon, Temple vitrail assez grand


Edvard Munch, Dans la forêt II, 1915

20130413 172911 Edvard Munch Dans la foret II

Dans la deuxième moitie de XIXème siècle, l’imaginaire s’introduit dans la ville autour des concepts d’obscurité, silence et solitude, autour de ces ambiances sombres des nuits brumeux, des lumières adoucis par les ombres…
Wiliam Degouve de Nuncques, Nocturne au parc royal de Bruxelles, 1897

20130413 173057 Wiliam Degouve de Nuncques Nocturne au parc

Léon Spilliaert, Clair de la lune et lumières, 1909

20130413 173009 Leon Spilliaert Clair de la lune et lumiere

Léon Spilliaert, Digue la nuit Reflets de lumière, 1909

20130413 172842 Leon Spilliaert Digue la nuit Reflets de lu

D’autres œuvres qui m’ont marqué : Charles Lacoste, la main de l’ombre, 1896
Ensuite arrive le surréalisme, une manière de voir le monde tirant beaucoup d’inspiration de subconscient, souvent très associée aux rêves, à l'irréalisme, des impressions absurdes, des bribes des pensés de l’artiste…
Paul Klee, sans titre, 1940, j’aime bien le choix des couleurs !

20130413 173232 Paul Klee sans titre

Max Ernst, le banquet du Sphinx (Das Gastmahl der Sphinx), 1940
20130413 173845 Max Ernst le banquet du Sphinx

Un petit Dali tout sympa
20130413 173322 Salvador Dali

Autres peintures qui m’ont marqué :
René Magritte, le colloque sentimental, 1945

Pour aller plus loin ...d'autres expositions d'art intéressantes que j'ai vu:

Exposition HEY ! Modern Art & Pop Culture - Part II à la Halle Saint Pierre, Paris

Expo de Cabaret du Chat Noir au Musée du Montmartre à Paris

Visite au Musée d’Orsay… expo « Degas et le nu » du 23/06/12


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